Que mettons-nous en jeu quand nous partons à la rencontre d'une oeuvre créatrice, qu'elle soit littéraire ou picturale ? D'abord un ensemble d'images et de propos que nous a transmis notre entourage. La sociologie de la littérature s'attache à déborder ce savoir confus, souvent hagiographique, en montrant par exemple, à propos de Flaubert, comment l'effort que s'imposait le romancier sanctionnait tout en les bouleversant les règles de l'art admises par l'époque. Appliquée à un peintre comme Manet, dont nous ne savons à peu près rien, cette démarche se révèle à la fois fructueuse et réductrice. Si elle aide à « situer » l'artiste, elle ne laisse pas apercevoir le renouvellement permanent grâce auquel un Manet se plaçait au-delà des règles. S'attachant à décaper les discours tenus sur le peintre depuis cent cinquante ans, le livre cherche à aborder ses toiles avec un oeil libre, sans cacher le fait que pèsera toujours sur notre jugement ce qui a été dit, avant nous, de Manet.
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