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Le canon classique des Mémoires, élaboré au fil de cinq siècles, n'est pas loin d'apparaître aujourd'hui comme vidé de sa substance. Jugés partiels et partiaux au regard des méthodes de l'histoire critique, les Mémoires ont subi en outre la rude concurrence d'un modèle narratif auquel ils avaient en grande partie donné naissance, l'autobiographie. De cette double perte de légitimité a résulté une véritable crise du genre.
Pourtant, la tradition littéraire des Mémoires a perduré tout au long du XXe siècle et n'a même jamais été aussi florissante et polymorphe : ces récits font toujours preuve d'une indéniable vitalité jusqu'à constituer encore la majeure partie des écrits à la première personne. Comment expliquer ce paradoxe ? En dépit de l'élargissement et de la dispersion du genre, ils continuent d'être l'une des deux grandes formes de récit de soi, à côté de l'autobiographie : le parcours d'un individu dans sa dimension publique et collective, acteur et témoin d'une histoire mémorable qu'il contribue à reconfigurer. En témoignent d'illustres mémorialistes : Charles de Gaulle, André Malraux, Simone de Beauvoir.
L'enquête explore donc ce vaste corpus jusqu'ici largement négligé par la critique, en reconsidérant la place et la valeur qui lui sont accordées à une époque submergée par la montée en puissance des mémoires collectives et par l'abondance des travaux historiques sur le passé récent.
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