"On n'est pas dans le futurisme, mais dans un drame bourgeois ou un thriller atmosphérique"
Cécile Pivot raconte dans un livre très touchant sa relation avec son fils, Antoine, autiste. Elle revient sur la naissance de son enfant, les premiers doutes, les difficultés rencontrées avec les médecins qui ne la prennent pas au sérieux. Puis le diagnostic tardif à 4 ans et demi. Ensuite commence son parcours du combattant, les difficultés pour trouver des lieux adaptés, le combat mené au quotidien pour gérer les bizarreries de son caractère, les périodes de doute et même de déprime qu'elle a traversées, le départ de son compagnon qui ne supportait plus la maladie d'Antoine.
Ce livre est le récit d'un combat mais surtout une lettre d'amour d'une mère à son fils.
« Lorsque tu n’y arrives plus avec nous, que c’est trop difficile, incompréhensible, retourne dans ta citadelle pour y reprendre des forces, barricade-toi le temps nécessaire, mais reviens parmi nous. Rapproche toi des bienveillants. Fuis les autres. Cela ne devrait pas être trop compliqué pour toi, qui détectes comme personne la moquerie ou le mépris dont tu peux être l’objet. Ne te laisse pas faire, bats-toi, fais entendre ta voix ».
C’est à l’âge de quatre ans et demi que le diagnostic de troubles du spectre autistique tombe pour Antoine, le fils de Cécile Pivot, autrice de ce livre-lettre-témoignage-document. Quatre ans et demi de questions sans autre réponse que des flous non artistiques de la part des médecins … Quatre ans et demi à côtoyer l’autisme sans qu’il soit pour autant authentifié , à lutter contre un ennemi invisible, et pourtant pressenti depuis longtemps.
Cécile Pivot décrit le quotidien, le parcours chaotique depuis la naissance, la souffrance, les cris, les innombrables courses aux urgences, le désespoir, la fatigue, le découragement et la culpabilité. Elle raconte l’incompréhension d’autrui (non, tous les autistes ne sont pas Rain Man), sa propre incompréhension. Elle dit avec ses mots à elle les mois, les années qui passent, le naufrage de son couple, la difficulté éprouvée par ses sœurs à trouver une place au sein de la famille, elle dit la lutte constante qui est la sienne. Elle dit cet enfant, celui qui ne grandit pas comme les autres, qui se cogne à la vie, avec toutes les normes qu’il ne comprend pas, ses multiples rituels. Elle dit ses moments de colère, ceux où elle n’arrive plus à l’aimer.
« J’en ai assez de tes questions qui sont toujours les mêmes, de te voir manger depuis quinze ans les mêmes gâteaux, à la même heure… de tes obsessions…de ton pouvoir de résistance. »
Elle dit l’amour qu’elle lui porte. Cet Amour indéfectible. Au-delà des mots. 22 ans d’Amour.
Elle raconte aussi toutes ces petites victoires , ces pas vers l’autonomie. Elle lui écrit une lettre… qu’il ne lira jamais !
Ce récit m’a touchée car l’autisme, je le côtoie professionnellement. La détresse des familles aussi. Celle des enfants plus encore. On n’imagine pas leur souffrance, leur isolement, leur douleur. Je rejoins Cécile Pivot lorsqu’elle évoque les manquements et les carences du système scolaire français, lorsqu’elle pointe du doigt le parcours du combattant qu’est la pseudo-inclusion de ces enfants . Il faut le savoir, le dire, et le redire, 80% des enfants autistes français ne sont pas scolarisés.
je ne peux pas dire que je sois déçue de ce livre vérité mais il est vrai que le vécu des parents ayant des enfants autistes se ressemble.
Cécile Pivot raconte avec son coeur les jours heureux, malheureux, les jours avec espoir, les jours sans avec son fils Antoine.
Elle se livre sans pudeur et son plus grand regret est que ce livre est écrit POUR Antoine et que malheureusement celui-i ne le lira JAMAIS ......
En ce jour de la Saint-Valentin, j’ai décidé de vous parler d’une lettre d’amour - pour rester dans la thématique - un peu particulière - parce que les romances et moi ne nous entendons pas particulièrement. En effet, Comme d’habitude, avant d’être un témoignage - rôle qu’il joue cependant à merveille - est une lettre d’amour d’une maman à son fils autiste. C’est d’ailleurs ceci qui m’a fait choisir cet ouvrage parmi les dizaines et dizaines d’autres témoignages de parents qui siégeaient sur les étagères de la bibliothèque. Ajoutez à cela que le titre et la couverture m’avaient déjà fait de l’œil lors d’une précédente Masse Critique Babelio (mais je n’avais pas été retenue …), et vous comprendrez pourquoi je me suis laissée tenter par un énième témoignage de maman d’enfant autiste (à savoir : ce n’est pas le dernier que vous allez croiser, toutefois !).
Cécile Pivot s’adresse donc à son fils, Antoine, âgé de 22 ans à l’heure où elle écrit ces quelques deux-cent pages. Elle lui raconte ses premiers mois, ces longs et difficiles et éprouvants premiers mois, lui qui était un bébé pleurant sans cesse, régurgitant sans cesse, dormant à peine. Elle lui raconte son enfance, les difficultés croissantes de scolarisation, les nombreux passages aux urgences pour des situations toujours plus improbables - et qui pourraient être comiques dans un dessin animé mais pas dans la vraie vie de parents débordés -, l’écart de plus en plus important qui se creuse entre lui et les autres enfants de son âge … Elle lui raconte comment il a fini par être diagnostiqué, les conséquences de ce diagnostic sur la vie familiale … Elle lui raconte ses efforts, permanents, pour être une « bonne mère » en dépit de la fatigue, du ras-le-bol, du découragement. Elle lui dit à quel point elle l’aime, à quel point elle s’inquiète pour lui, à quel point elle veut le voir heureux … Elle lui écrit ce livre, cette lettre d’amour, qu’il ne lira probablement jamais.
La quatrième de couverture promet « un livre vibrant d’émotion » : je ne peux que donner raison à cette invitation de lecture. Cécile Pivot raconte tout, avec sobriété mais surtout avec honnêteté : elle n’enjolive rien, elle n’omet rien. Elle admet bien volontiers ses erreurs, cassant ainsi le mythe bien connu de la « super-maman d’enfant autiste, forte et optimiste face à toutes les situations, qui par son lien fusionnel avec le petit sauvageon parvient à faire exactement ce qui est bon pour lui sans jamais se tromper ». Elle fait également part de ses nombreuses phases de découragement, de doute, de désespoir, d’inquiétude. Elle porte sa culpabilité comme un étendard, elle demande régulièrement pardon à Antoine pour ses maladresses, mais aussi sa négligence, pour toutes les fois où elle l’a consciemment et volontairement poussé à dépasser ses limites en dépit de l’angoisse que cela faisait naitre chez lui … Ce livre est un concentré d’émotions brutes, Cécile Pivot déverse sur le papier toutes ces années de silence, de faux sourires, de crainte … C’est tellement fort qu’on devine presque à quels moments elle pleurait face à son écran d’ordinateur, à quels moments un petit sourire attendri accompagnait son travail d’écriture … On ne peut pas rester insensible face à cet ouvrage.
Ouvrage qui, donc, ne se contente pas de décrire l’enfance d’Antoine, ne s’arrête pas à la seule évocation des troubles autistiques. Sont également évoqués les nombreux établissements, scolaires comme spécialisés, qui ont accueillis Antoine, les différentes nounous, plus ou moins compétentes, qui se sont succédées chez eux … Mais aussi les conséquences du handicap d’Antoine dans la dynamique familiale : père qui nie le diagnostic et finit par s’éloigner lorsque celui-ci s’imposera brutalement à lui, petite sœur qui contrebalance inconsciemment le retard de son frère en grandissant trop vite, grand-mère qui décide de ne pas s’arrêter à ce diagnostic et agir comme si de rien n’était pour laisser Antoine vivre sa vie, tout simplement … Cécile Pivot parle également des réactions de son entourage, tantôt attentif, bienveillant et réceptif, tantôt indifférent voire méprisant. Et surtout, elle se questionne : comment Antoine fera-t-il quand elle ne sera plus là pour lui ? Comment parviendra-t-il à vivre, seul, dans ce monde qui n’est pas adapté à lui, si elle n’est plus là pour le guider ? Et comment feront toutes ces personnes avec autisme, le jour où elles seront livrées à elles-mêmes ? Elle s’interroge sur notre société et sa capacité à accueillir et à s’occuper de ces personnes différentes … Questions en suspens que le lecteur est invité à faire siennes.
En bref, vous l’aurez compris, cet ouvrage m’a énormément touchée. Bien plus qu’un simple témoignage sur l’autisme, ce livre se fait le reflet de l’amour qui unit Cécile Pivot et son fils. Cet amour, il est présent de la toute première à la toute dernière phrase, il est le fil rouge de ce récit : l’auteur ne raconte pas l’enfance, puis l’adolescence, puis l’entrée dans l’âge adulte d’Antoine selon un ordre chronologique, mais multiplie les anecdotes, les rapprochements de situations … Et pourtant, pas moyen de s’y perdre, on reconstitue très facilement le puzzle formé par ces dizaines et dizaines de pièces que représentent ces chapitres éparpillés. Ce livre m’a vraiment bouleversée, par sa simplicité peut-être, par sa sincérité également. Cécile Pivot ne parle pas de son fils, elle lui parle, et voilà ce qui fait toute la différence : derrière chaque phrase, un amour immense et une tendresse incroyable se cachent, et c’est juste terriblement émouvant. Un très beau livre, vraiment !
https://lesmotsetaientlivres.blogspot.fr/2018/02/comme-dhabitude-cecile-pivot.html
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