"On n'est pas dans le futurisme, mais dans un drame bourgeois ou un thriller atmosphérique"
J’ai lu le recueil de nouvelles Lâle la blanche d’Ömer Seyfettin paru aux éditions Turquoise dans la collection Écriturques en 2008, traduit pas François Skvor.
Ces nouvelles sont comme une archive historique, par sa plume Ömer Seyfettin témoigne de cette période trouble, période où les frontières fragiles de l’Empire ottoman s’écroulent les unes après les autres. Morcelé et tiraillé de part et d’autre, ce grand corps malade est à l’agonie, sur le point de rendre son dernier souffle. Dans cet empire où coexistaient depuis des siècles de nombreuses ethnies, cultures et religions, les frontières éclatent, les peuples s’affrontent, l’identité ottomane s’effrite, un peuple turc qui se cherche et a soif d’affirmer son existence et clamer son identité nationale. Des cendres de l’ancien empire naîtront les prémices de la République turque. Des nouvelles drôles, des nouvelles où il y a une leçon à tirer, des nouvelles où les atrocités perpétuées dépassent l’entendement jusqu’à vous glacer le sang.
Arc-en-ciel : une petite fille qui rêve d’être un homme pour être libre.
La bombe : le rêve d’une vie meilleure qui est violemment arraché.
Le bonnet d’âne : Tel est pris qui croyait prendre.
Refrain : La barrière de la langue qui mène à des interprétations erronées.
Pot de vin : l’intelligence de la fourberie qui l’emporte sur la droiture.
Lâle la blanche : la barbarie des hommes qui vous donne froid dans le dos.
Le Bâtard : être fier ou ne pas être fier d’être turc, là est la question.
Trois conseils : des conseils qui valent de l’or
Les Drapeaux de la liberté : l’identité des peuples de l’empire ottoman réuni sous un même drapeau
Harem : la jalousie qui peut jouer de vilain tour
Signe : Un signe est la croyance en une victoire renaît
Le temple secret : L’Orient vu à travers les yeux d’un français
Après les Dardanelles : un homme dont la vie est suspendu pendant le conflit
Les papillons du printemps : Le fossé entre générations et la place de la femme dans la nouvelle Turquie
Boycott : le problème de l’identité dans un empire fini et une Turquie naissante
Primo l’enfant turc 1 et Primo l’enfant turc : l’identité d’un enfant issue d’un couple turco-italien…un choix s’impose…la balance penche d’un côté
La maison hantée : Il faut croire que ce que l’on peut toucher. La supercherie démasquée
Préparez-vous à remonter le temps et à voyager dans les Balkans et l’Anatolie au début du XXe siècle.
Début du 20ème siècle, dans l’actuelle Turquie. En pleine déliquescence de l’empire Ottoman, entre nations reprenant leur indépendance comme la Bulgarie ou la Macédoine, et pays qui lorgnent sur les reliefs de cet effondrement, la Turquie peine à trouver son identité.
Omer Seyfettin éprouve durement, dans sa chair, cet effondrement. Egalement officier, il est témoin d’atrocités, de vains combats. Nationaliste, il souhaite réunir le peuple turc grâce à une langue commune et renouvelée, retrouver une identité et une fierté nationales.
Ces nouvelles, fortement ancrée dans l’histoire du pays et dans son histoire personnelle, témoignent de sa vision de son temps. Beaucoup sont dures, voire cruelles, certaines témoignent d’une douceur de vivre. Toutes sont empreintes d’un nationalisme et d’un message politique fort et très daté.
La langue, bien que traduite, traduit avec beaucoup de précision et de dépouillement les sentiments de l’auteur, qu’il prête presque systématiquement à ses personnages.
J’ai apprécié la longue introduction qui replace ces textes dans leur contexte historique, permettant de prendre le recul nécessaire à une lecture plus objective.
Une belle découverte, à la fois d’un écrivain, d’un moment de l’histoire et de la force des mots pour faire passer un message.
https://mesmotsmeslivres.wordpress.com/2016/10/22/lale-la-blanche-de-omer-seyfettin/
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