"On n'est pas dans le futurisme, mais dans un drame bourgeois ou un thriller atmosphérique"
Deen libraire new-yorkais, est spécialisé en livres anciens et précieux. Plusieurs fois par an, il séjourne sur les terres de son enfance à Kolkataen en Inde. Lors d’un de ses voyages, il a vent d’une mystérieuse fable, celle d’un marchand persécuté et poursuivi par la déesse des serpents. Entre l'Inde, le Bangladesh et l'Italie, un formidable roman d’aventures. Entre les mystères des mythes indiens et une actualité mondiale des plus brûlante. Magnifique !
Le Déluge de Feu, c’est celui qui va s’abattre sur les jonques et forts chinois en cette année 1840 où la Royal Navy est chargée de faire respecter le droit des trafiquants anglais à vendre en Chine l’opium récolté aux Indes. Nous retrouvons les personnages des deux premiers tomes de cette trilogie toujours aussi passionnante tandis qu’un couple de guerriers apparaît. Le premier est indien :
« Rares étaient les spectacles comparables à celui de l’infanterie indigène du Bengale en marche. Chaque membre du paltan en était conscient – dandia-wallahs, danseuses, palefreniers, berry-wallahs, bhisties porteurs d’eau- mais aucun plus que le havildar Kesri Singh, dont le visage devenait la figure de proue du bataillon quand il chevauchait à la tête de la colonne. »
Le second est anglais et le supérieur direct du premier : « Quand il était jeune officier, son agressivité lui avait souvent causé des problèmes, lui bâtissant la réputation d’un « Kaptan Marpeet » - capitaine bagarre. Toutefois le capitaine Mee était, à sa façon, un excellent officier, sans peur au combat et d’une équité scrupuleuse dans ses rapports avec les sepoys (cipayes en fr.). Kesri en particulier avait de bonnes raisons de lui être reconnaissant. »
Ils ne vont pas tarder à partir avec le corps expéditionnaire pour la Rivière des Perles, dans le triangle qui relie Hong Kong, Macao et Canton. Ils y croiseront les autres personnages de la saga. Ceux qui tentaient de faire fortune grâce à l’opium et sont pour l’heure ruinés, celle qui s’émancipe (Shireen la veuve découvrant la double vie de son défunt mari), ou ceux qui espèrent se retrouver après un amour de jeunesse contrarié. On s’immerge dans la condition féminine de ces temps et de ces lieux, on suffoque sous le poids des traditions et convenances familiales indiennes, on déteste la morgue des officiers anglais et le cynisme des trafiquants, on est saisi d’effroi au vu des conditions de vie sur les navires de l’époque et on tremble pour l’enfant qui s’embarque seul à la recherche de son père.
C’est un délicieux mélange d’Alexandre Dumas (pour les aventures), de Zola (pour la corruption et le cynisme de certains) et de Balzac (à vous de découvrir le Rastignac de l’histoire). On ne s’ennuie jamais et, une fois le roman refermé, on se dit que rien n’a vraiment changé. L’océan d’opium qui partait des Indes vers la Chine a simplement changé de lieux de production et de destination mais il se déverse toujours au mépris des lois interdisant son trafic et sa consommation. Il fait toujours des fortunes en causant autant de malheurs.
On pense aussi à la Chine, celle de 1840 vaincue en quelques canonnades et humiliée pour cent cinquante ans. A ce sujet, à Beijing les touristes visitent le « Palais d’été ». Beaucoup ignorent qu’il s’agit du nouveau « Palais d’été ». Quant à l’ancien, rasé et dévasté par les troupes franco-anglaises en 1860, il est toujours visité par les Chinois qui sont invités à bien regarder les graffitis laissés en anglais ou en français…
Et on espère que la sagesse de Lao Tseu est toujours aussi respectée :« Si quelqu’un t’a offensé, ne cherche pas à te venger. Assieds-toi au bord de la rivière et bientôt tu verras passer son cadavre. »
Et surtout, il y a la cupidité, celle des négociants qui mènent le jeu. Ce qu’un des personnages résume de fort belle manière : « Regardez, à l’intérieur de ce navire brûle le feu qui réveillera les démons de l’avidité cachés dans tout être humain. C’est la raison pour laquelle les Anglais sont venus en Chine et en Hindoustan : ces deux contrées sont si peuplées que si l’avidité s’y répand, elle consumera le monde entier. Cela a commencé aujourd’hui. Et ne se terminera que quand l’humanité entière, unie dans une grande folie d’avidité, aura dévoré la terre, l’air et le ciel. »
Comment ne pas faire le parallèle avec notre époque où les frontières s’effacent pour le grand marché. La mondialisation ne serait-elle pas la victoire des commerçants et des multinationales dont certaines sont nées à Hong Kong dans ces années-là ?
Un roman passionnant et profond !
Deen est indien et travaille à New-York où il est marchand de livres anciens. Généralement il passe l'hiver à New-York et l'été en Inde. Lors de son retour en Inde, sa tante lui parle d'un temple au fin fond des Sudarbans et de la légende d'un marchand qui aurait eu des mésaventures à cause de la déesse aux serpents. Deen s'en fiche un peu mais pour faire plaisir à sa tante il va visiter le temple... S'en suit alors une formidable aventure qui nous transporte sur 3 continents : Amérique du Nord, Europe et Inde. Deen se prend au jeu et cherche à déchiffrer chaque symbole découvert dans le temple mais au fur et à mesure il découvre que ce qu'il est en train de vivre ressemble exactement à tous les évènements dont parle la légende. Tous les grands sujets de société comme les grands incendies, la pollution, les migrations, l'informatique, le manque d'eau, les récoltes perdues, les catastrophes naturelles... Tout est savamment introduit dans l'histoire. Tout en étant un passionnant livre d'aventures, ce livre nous fait réfléchir sur notre avenir. J'en lirai d'autres.
Passionnant et magnifique !
Si vous rêvez d’exotisme, de lointains voyages, le tout dans un contexte historique bien balisé et superbement documenté, il est temps d’embarquer sur le brigantin Redruth depuis Port Louis à l’île Maurice ou bien sur le trois mâts Anahita depuis Bombay. Tous deux cinglent vers « un fleuve de fumée » c’est-à-dire la Rivière des Perles entre Macao, Canton et Hong Kong. Le premier est affrété par un horticulteur anglais désireux d’échanger des arbres d’Amérique contre des camélias rarissimes et inconnus en Europe, le second est rempli de caisses d’opium.
Nous sommes en 1839, l’opium est interdit à la vente et à la consommation en Chine depuis plus de cents ans mais, corruption aidant, les livraisons de la marchandise venue des Indes n’ont cessé de croître (200 caisses en 1730, 40 000 en 1838) et toutes aboutissent à Canton, seul port autorisé à commercer avec les « diables étrangers » par Fanqui Town, l’enclave contigüe concédée aux négociants étrangers. L’empereur, conscient des ravages causés sur toutes les couches de la population chinoise, décide de sévir et de faire enfin respecter l’embargo. Les cales des navires sont pleines d’opium, un nouveau gouverneur incorruptible vient d’être nommé et la tension monte.
Nous retrouvons certains des personnages de la saga débutée par « Un océan de pavots », Paulette la jeune botaniste, Neel le raja déchu, l’intendant Nob Kissin Baboo et son patron anglais Burnham, mais le personnage principal est, cette fois, un négociant hindou, parsi plus précisément, qui se trouve être un très gros trafiquant d’opium du nom de Bahram Moddie.
Les événements historiques servant de trame sont rigoureusement exacts et les personnages secondaires du roman respectent leurs attitudes, discours et écrits de l’époque. Ainsi on croise et on écoute : William Jardine (de Jardine & Matheson), le gouverneur chinois Lin Xexu, le capitaine anglais Elliott, le journaliste John Slade ou l’Américain Charles King, seul occidental à respecter l’interdiction d’introduire de l’opium en Chine.
La langue est toujours aussi chatoyante et inventive pour immerger le lecteur dans l’action. Au milieu des saveurs étranges, des couleurs, des fleurs innombrables et des parfums exquis, Bahram le Parsi mène, depuis vingt ans, ses affaires en apportant sa pierre à l’empoisonnement du pays qui fait sa fortune. Aimé de tous ses employés et apprécié des Chinois avec qui il commerce, il n’est pas qu’un vulgaire et ignoble trafiquant. Sa vie est plus riche, plus exaltante à Canton qu’à Bombay. En cette année 1839, son bateau, comme tous les autres, n’a pas pu s’engager dans la Rivière des Perles et attend près d’un îlot désolé nommé Hong Kong. Il s’inquiète de savoir s’il va pouvoir enfin se débarrasser de son énorme cargaison pour rembourser prêts et commanditaires en engrangeant le plantureux bénéfice de son entreprise. On dit que l’opium apaise les angoisses…à quel prix ? Vous le saurez sans doute à la fin de ce voyage ensorcelant.
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