"On n'est pas dans le futurisme, mais dans un drame bourgeois ou un thriller atmosphérique"
Plus une activité est conditionnelle et dangereuse, plus elle est entourée de rites. et de mythes ! Sur les bords de tous les océans du monde, les hommes ont inventé des histoires de pêches pour rêver, se faire peur, respecter certains interdits, ou rire, tout simplement ! Les contes collectés dans cet ouvrage permettent de s'immerger dans le quotidien des marins où réel et imaginaire se mêlent lorsque la fatigue, la météo ou le temps se jouent des hommes. Extrait du recueil :L'or rouge de Leïla la maudite d'après un conte marocain recueilli par S. Boussen et R. Voituriez.Jamais dans ce tranquille village de pêcheur on avait connu de tels changements. Les pères transmettaient à leurs fils leur savoir-faire et leur embarcation, et la vie coulait, douce et tranquille. Et puis un jour, tout changea : l'or rouge était apparu sur les côtes.Les fières felouques avaient été remisées dans les hangars du port et de modestes barques sortaient maintenant pour des pêches miraculeuses. Les pêcheurs remontaient dans leurs filets des fleurs de sang qui valaient à elles seules le prix d'une saison de pêche. Alors, à quoi bon travailler encore le poisson ? Ceux qui n'étaient pas doués pour la cueillette du corail avaient ouvert des ateliers dans lesquels ils polissaient cet or rouge si parfait que des marchands venaient de loin pour l'acheter.Et il y avait la belle Leïla, belle et mystérieuse. Ses regards ensorcelaient irrémédiablement les coeurs des jeunes hommes, mais ne dévoilaient aucun de ses secrets. La seule chose que l'on pouvait dire, c'est que depuis son arrivée au village, la vie avait changé de teinte, et on eut dit que tout prenait une couleur rouge : cerise les lampions accrochés sur les places les soirs de fête où chacun rêvait de l'approcher, carmin les lèvres riantes de la belle et vermillon le corail que l'on trouvait désormais dans la mer.Oui, la vie avait changé. Fêtes et cueillettes, éclats pourpres et rêves inavouables dans lesquels la mystérieuse Leïla avait le premier rôle. Et les jours filaient.Las, les hommes se posent peu de questions, surtout quand la richesse semble leur être offerte, surtout quand il y a une belle à conquérir, et pas un ne s'était demandé s'il était vraiment raisonnable d'abandonner la pêche pour aller ramasser du corail. Pas un non plus ne s'était réellement interrogé sur les disparitions des jeunes hommes de la ville. Parce que le rouge bordait aussi les yeux des mères dont les fils partaient un soir pour ne plus revenir.C'est sans doute une mère d'ailleurs - ou était-ce une soeur ? - qui a un jour établi le lien entre l'arrivée de Leïla au village et le bouleversement de la vie quotidienne. Elle eut le courage, un soir de fête, de suivre les amoureux. Elle vit la belle ensorceleuse accompagnée du jeune homme qu'elle s'était choisi pour la nuit partir vers le bord de l'eau. Elle ne détourna pas les yeux lorsqu'ils s'étreignirent, mais son regard ne put soutenir la suite. À peine son amant alangui, Leïla la parfaite se transforma en une monstrueuse méduse qui, de ses tentacules noya le galant avant de le dévorer dans une gerbe d'écume écarlate.Lorsqu'en rentrant au village elle raconta ce qu'elle avait vu, on sut quelle était l'origine du merveilleux corail si soudainement arrivé sur les côtes : c'est l'océan qui, en dispersant le sang des garçons sacrifiés donnait naissance à l'or rouge.Si l'histoire ne dit pas ce qu'il est advenu de la belle diablesse, elle raconte en revanche que les hommes ont abandonné à jamais la pratique de cette pêche miraculeuse.
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