"On n'est pas dans le futurisme, mais dans un drame bourgeois ou un thriller atmosphérique"
Dan et Richard, deux vétérans de l'Afghanistan et amis d'enfance, vivent dans la même ville depuis leur retour des zones de combat. Encore gravement perturbés par ce qu'ils ont vécu, ils peinent à retrouver une vie normale.
Le cas de Dan est à peu près réglé - il s'oblige à une hygiène de vie très rigoureuse, travaille assidûment ; mais celui de Richard - bagarreur, récidiviste, infidèle - semble définitivement perdu.
L'arrivée de Marlène, la belle-soeur de Richard, va redistribuer les cartes. Jusqu'à la tragédie?
Condensé dans sa forme, nerveux, Marlène est un roman tout entier tendu par la brusque fuite en avant de ses héros.
Richard et Dan sont deux amis inséparables, de ceux dont les liens se sont tissés et renforcés à travers les épreuves communes. Et les épreuves sont de taille puisque les deux hommes sont des vétérans. Revenus de la guerre irrémédiablement abîmés. Si Dan essaie de retrouver un semblant de normalité grâce à une vie parfaitement réglée, cela est plus dur pour Richard qui sort d’ailleurs de trois mois de détention pour excès de vitesse. Il retrouve sa femme, Nath, et sa fille, Mona, mais le dialogue semble compliqué au sein de la famille. Et pour ajouter à la complexité des relations, voilà que Marlène débarque. Marlène est la sœur de Nath et personne ne l’a vue depuis de nombreuses années. Cette arrivée va provoquer un déséquilibre dans la relation qui s’était installée entre Dan, Richard, Nath et Mona. Au point de provoquer un drame ?
Disons-le tout de suite, ce livre n’est pas mon préféré de Philippe Djian. Je l’ai trouvé parfois un peu difficile à suivre. L’auteur construit des dialogues sans tirets ni guillemets et on a du mal à savoir quel protagoniste prend la parole. Il faut alors faire une véritable gymnastique intellectuelle pour s’y retrouver. Par ailleurs, il y a très souvent des passages d’un personnage à un autre sans qu’une réelle transition soit marquée et j’ai trouvé parfois difficile de me repérer temporellement. Si au début cela interpelle, à l’usage cela fait finalement perdre la concentration. J’ai ainsi eu l’impression que Djian privilégiait l’exercice de style à la profondeur de l’histoire.
Mis à part ces bémols, qui sont quand même d’importance, les personnages de Dan et Richard sont extrêmement bien campés, nous faisant toucher du doigt toute la difficulté pour des hommes qui ont été confrontés à une violence extrême à retrouver une vie normale et une vie de famille apaisée. Les fantômes ne sont jamais loin qui peuplent leurs rêves et les font de réveiller en hurlant. Les personnages féminins, à part Marlène, sont peut-être un peu moins réussis. Nath, empêtrée dans une relation extra-conjugale n’est pas spécialement sympathique et surtout je n’ai pas compris pour quelle raison elle semblait en vouloir autant à sa sœur. Quant à la jeune Mona, totalement perdue au milieu de ces adultes eux-mêmes paumés, son sort semble assez vite scellé.
Bref, si j’aime habituellement Philippe Djian pour ce style qui me fait toujours penser aux auteurs américains que j’apprécie comme Richard Ford, ce roman me semble moins abouti que d’autres qui me restent en mémoire comme Incidences, Echine ou Sotos.
Du pur Philippe Djian avec des personnages déglingués par la vie; les figures masculines sont deux anciens militaires rentrés d'Afghanistan bousillés par des bouffées de stress post-traumatiques (c'est un sujet dont se sont emparés assez récemment plusieurs auteurs comme L'Insouciance de Karine Thuil), unis par une amitié virile non dénuée d'orages; les 3 personnages féminins ne sont pas dans un meilleur état et veulent désespérément être aimées; elles ont entre elles des relations plus que conflictuelles comme il en existe dans de nombreuses familles entre soeurs ou entre mère et fille adolescente.
Le décor n'incite pas plus à l'allégresse : une maison presque vide pour un des 2 militaires (Dan) comme s'il ne voulait pas s'installer dans sa vie, la prison pour l'autre (Richard) qui a l'art de se mettre dans tous les plans foireux pour se sentir exister, pour retrouver un peu de l'adrénaline d'Afghanistan, un bowling miteux où les installations tombent souvent en panne, un salon de toilettage pour chiens où les chiens mordent les soigneuses.
Tous les ingrédients sont là pour conduire aux drames; l'écriture directe, ciselée, sans fioriture de Philippe Djian y conduit irrémédiablement.
Malgré tout l'art de l'auteur, j'avoue que je ne suis plus aussi fan qu'avant car aucune note d'espoir ne vient légèrement adoucir le récit, c'est glauque et j'accroche de plus en plus difficilement aux changements brusques et sans indice de personnages; on ne sait plus qui parle ou de qui parle l'auteur. Philippe Djian ne me surprend plus même si une curiosité addictive à chaque nouveau roman me pousse à m'y plonger.
Une femme sème le trouble entre deux vétérans d'Afghanistan qui se serrent les coudes pour se réinsérer chacun à sa manière.
Les livres de Philippe Djian ne m'ont jamais attiré car le sexe et la violence y tiennent une place importante (Oh..., 37°2 le matin, etc.). J'avais donc une certaine appréhension avant de lire Marlène. On retrouve toujours ces thèmes (chers à l'auteur) mais cette fois sans excès, le tout savamment maîtrisé.
Le style de Djian peut paraître quelque dérangeant car les éléments de ponctuation sont bannis (hormis les points et les virgules) et les dialogues insérés dans le texte sans tirets nous induisent parfois en erreur (qui parle ? Qui fait quoi ?). Mais on finit par s'y habituer.
Djian analyse ici les rapports complexes entre hommes et femmes. Les personnages ont vécu des épreuves douloureuses sur les plans sentimental et psychologique. Richard et Dan subissent ainsi de plein fouet les ravages de la guerre comme le retour difficile à une vie normale. Les relations familiales deviennent alors fragiles et instables. Ils tentent de se reconstruire et de se rapprocher les uns des autres malgré les conflits que cela engendre. Les femmes jouent un rôle essentiel dans l'histoire. Marlène, la sœur de Nath, est une bombe à retardement et va tout "renverser" sur son passage comme dans un jeu de quilles.
L'histoire est très prenante et j’avais hâte d'arriver aux dernières pages du livre pour voir comment elle se termine.
Conclusion : pas de la grande littérature mais cela reste un bon roman.
Philippe Djian. Voilà longtemps que je n'avais rien lu de cet auteur. Je me souvenais de 37,2 le matin, Zone érogène...Je gardais en mémoire : des lieux oubliés, des personnages paumés et des ambiances sombres et pesantes. Lorsque j'ai appris la sortie de ce nouveau roman Marlène, j'ai eu envie de retenter l'expérience. On y retrouve tout à fait l'environnement Djian.
L'histoire se déroule dans une petite ville de garnison quelque part en France. Un duo : Dan et Richard, anciens militaires traumatisés par l'Afghanistan. Une amitié de galère. Autour d'eux, Nath (femme de Richard), Mona (leur fille, adolescente en révolte) et Marlène (sœur de Nath, revenante, paumée et enceinte). Tout ce petit monde va tenter de vivre ensemble avec des hauts et surtout des bas jusqu'au drame qui au fur et à mesure des pages apparaît comme inévitable
Un roman sombre dans lequel il manque à mon sens un petit peu de lumière. On s'attache aux personnages de Dan (qui au prix d'effort de survie, mérite le bonheur) et Marlène (qui apporte un peu de renouveau dans ce paysage immobile et sinistre). Mais l'histoire en décidera-t-elle ainsi? Dan et Marlène seront-ils enfin au bout de leur peines?
Je peux comprendre que ce roman puisse plaire. De mon côté, je recherche plus d'optimisme et plus de lumière dans mes lectures!
Marlène est-elle une fille toxique ou une femme fatale ? Djian répond de façon un peu foutraque dans ce nouveau roman, sans doute pas son meilleur, mais qui propose tout de même les ingrédients habituels de sa cuisine. Et on aime bien ça, se faire promener entre deux, trois voire quatre personnages et se prendre des situations couperets au coin d'une page sans les attendre. Paresseux certes ce roman nous rappelle une fois encore que Djian est une fine lame en matière de description des rapports humains.
Deux amis d’enfance, deux frères d’armes, reviennent du bout du monde, fracassés par ce qu’ils ont vu, cabossés par les guerres , notamment celle d’Afghanistan. L’un (Dan) est rigoureux à l’extrême, l’autre (Richard) frôle la bipolarité. Il n’empêche que l’un veille sur l’autre, fraternellement. C’est d’ailleurs ce qui va être la base du récit, ce lien entre eux.
Désireux de se réinsérer, à moins qu’il ne s’agisse que de s’insérer tout court, en dépit du choc post traumatique qu’ils trimballent et gèrent de deux façons totalement opposées, en proie toutefois à une certaine résignation qui frôle le fatalisme, ils vont être confrontés à une même femme, Marlène, qui va tout balayer sur son passage.
Marlène est la sœur de Nath, qui est elle-même l’épouse de Richard. Enceinte, paumée, fragile et torturée, totalement déglinguée, elle arrive à l’improviste dans cette petite ville, ce microcosme, que l’on situe volontiers en province. Et là, tout va se compliquer…
Le souci, c’est que tout se complique aussi au niveau de l’écriture… Ce style , propre à Djian (ponctuation, pas de guillemets, chapitres découpés à l'emporte-pièces) ne facilite pas les choses, et on se perd bien vite dans ce dédale qui semblait pourtant prometteur.
Certes, les personnages sont scrupuleusement disséqués dans ce qu’ils ont de plus intime et de plus ambigu … Certes, les sujets (la reconstruction des soldats de retour chez eux, la famille, la « normalité » ) sont intéressants, certes la construction déroutante peut accrocher le lecteur… Certes, la fin du roman est inattendue.. Seulement voilà, la magie Djian n’a pas opéré avec moi cette fois. Autant Betty (37°2 le matin avait su me prendre par le cœur, autant Marlène m’a laissée de marbre).
https://alombredunoyer.com/2017/05/10/marlene-philippe-djian/
« C’était loin, tout ça. Mais bon, quelques éclairs surgissaient parfois, des éclairs de chaleur, d’irrésistibles envies d’elle malgré la cargaison de jeunes femmes qui traînaient dans le coin, qui débarquaient par vagues, qui s’installaient avec leurs maris et leurs mioches et parmi lesquelles il n’avait qu’à choisir, toutes ces adorables petites salopes qu’il avait, quelque part, méritées – il estimait qu’il s’était suffisamment battu pour elles, pour son pays, pour Dieu sait quoi, et même pour ces connards qui lui avaient flanqué trois mois pour excès de vitesse, récidiviste ou pas. »
Dans sa dernière publication, Philippe Djian nous démontre une nouvelle fois que la forme est plus importante que le fond, que le style sera toujours sa préoccupation principale par rapport à l’intrigue.
« Il avala un cachet pour neutraliser sa pompe à protons. Vint ensuite la phase de stupéfaction douloureuse qui désorientait totalement, qui égarait, comme être pris par un soir d’orage au milieu des éclairs. »
« Page-turner » fluide et efficace, Marlène déroule une histoire banale : l’espoir d’une vie différente à travers une reconstruction. Richard dont la vie est un mix de séjours en prison, de bagarres, de baise et de magouilles louches, est marié à Nath avec qui il a une fille prénommée Mona. Avec Dan, son meilleur ami, ils essaient de se reconstruire après la guerre, tout comme Marlène, la sœur de Nath, qui débarque un matin et deviendra l’élément central de l’intrigue. L’atmosphère est de plus en plus pesante au fil des pages, on sent que quelque chose va se passer mais on ne sait quoi. Cela tarde à venir, Djian prenant un malin plaisir à retarder l’échéance avant de nous laisser littéralement le bec dans l’eau dans les dernières lignes.
« Il y avait longtemps que leur vie de couple n’était plus très réjouissante. Et voilà que son mari avait de nouveau l’œil qui brillait et la bouche sèche. En fait, ils étaient mus par cet instinct animal, primaire, qui prêtait à sourire. Richard en avait le front emperlé et il lui malaxait les mains sans trop savoir ce qu’il faisait, la lippe rêveuse, la queue dressée dans son pantalon de toile »
Si les premiers chapitres sont extrêmement courts voire faméliques, l’écriture réduite à son minimum, le style totalement déstructuré du fait de l’absence de ponctuation, ils s’étoffent par la suite avec des phrases de plus en plus belles, longues et travaillées. Mélangeant érotisme, mots crus et littérature classique, Djian manie avec maestria non-dits, métaphores, twists et rebondissements à volonté afin d’obliger son lecteur à rester attentif. Il est impossible de tomber dans la facilité malgré le caractère très fluide de l’ensemble tant il passe du coq à l’âne dans une même phrase ou dialogue par exemple. C’est d’ailleurs fort perturbant et il m’a fallu un peu de temps pour m’adapter et accepter ces procédés.
« Il n’envisageait pas de la perdre. Il ne se voyait pas du tout reprendre son ancienne vie, entre solitude, cauchemars en tout genre, aigreurs, tocs en veux-tu en voilà, et la batterie de molécules qui lui maintenait la tête hors de l’eau. Il allait mieux, ou du moins il n’allait pas si mal depuis qu’elle était là. Et tous les vétérans qu’il connaissait, sans exception, auraient tué pour un soupçon d’amélioration de leur état, pour la plus petite goutte de lumière susceptible de les soustraire aux ténèbres de leur cerveau »
Malgré une sensation de parfois trop en faire, d’un côté « surfait » et/ou de platitude par moment, le tout reste cohérent et maîtrisé. C’est un bon roman mais qui ne me laissera pas une trace indélébile.
3/5
Adolescente, j’avais apprécié de lire « 37,2° le matin » et après avoir vu le film «Elle », j’avais très envie de me replonger dans les phrases nerveuses et brutes de Philippe Djian.
C’est donc avec « Marlène » que je renoue avec le style si particulier de l’auteur qui arrive à créer avec peu de mots et sans description une atmosphère très prenante et un suspens à couper le souffle.
Sous sa plume alerte et qui surprend, par l’enchaînement rapide des événements et par l’absence de transition d’un personnage à un autre, j’ai ressenti sa vibrante communion avec les hommes et les femmes de son roman qui forment comme un noyau où je me suis demander au début du livre qui est le père, qui est l’époux, et à qui est l’enfant.
La tragédie couve sur cette famille portés par Dan et Richard, deux vétérans des combats au Moyen Orient rendus à la vie civile. Ils vivent leur vie après la guerre, à leur manière, quitte à prendre des chemins de traverses minés par leurs traumatismes vécus là-bas.
Nath, Mona et Marlène sont là, elles-aussi avec leurs personnalités tourmentées et des fêlures qui se craquellent laissant apparaître le vide et un urgent besoin de vivre un bonheur qui ne les rend pas moins dangereuses.
Mais où est donc le vrai danger quand l’ennemi aux aguets se cache sous les fausses apparences d’une prétendue normalité dont les contours ne cessent de se dérober ?
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