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L'odeur d'un père compte parmi les textes les plus personnels de Catherine Weinzaepflen, romancière et poète reconnue. Il lui a fallu des années pour aller au plus près d'elle-même et aborder la figure de son père, du courage pour sortir ainsi de l'artifice qu'offre la fiction et du jeu de la poésie.
Suivant la trace de sa mémoire olfactive, l'autrice en fait ressurgir les fragments d'une enfance tiraillée entre plusieurs pôles. À l'âge de onze ans, elle quitte Strasbourg où sa mère s'est installée avec elle après avoir soudainement quitté le foyer conjugal, et se rend en Centrafrique pour passer les vacances scolaires dans la maison que son père partage avec sa nouvelle épouse au bord d'un lac.
Quoi que jouissant de prérogatives coloniales, il y mène une vie simple. L'odeur du père est celle, opiniâtre et agressive, de l'aftershave Gillette Bleu mêlé à la lotion Pantène contre la chute de cheveux ; mais aussi, plus douce, la fragrance du savon Camay rose. Livre de réconciliation autant que « Lettre au père », ce récit à la première personne porte un regard rétrospectif humain sur le déclin d'une figure paternelle, sans en épargner les aspects les plus brutaux. À l'horizon, les vestiges du temps passé à Bangui, berceau d'une enfance africaine débordante de vitalité, à jamais présente dans la chair du souvenir.
Extrait « Comment pourrais-je dormir en pleine journée ? Aujourd'hui je vis la sieste comme un luxe, à douze ans je suis tenaillée par une pulsion de mort. Alors je repousse ces siestes mortifères en écrivant. Je vois encore le grand cahier cartonné à couverture marbrée vert et noir, les pages à petits carreaux. J'ai le souvenir de poèmes et de collages, d'une sorte de journal codé, car je me sais sous surveillance. C'est néanmoins à l'heure de la sieste que je commence à écrire en Afrique, prémisses d'une activité qui déterminera ma vie. » C.W.
Catherine Weinzaepflen refait le chemin de la fille séparée de son père, de leurs relations compliquées, des découvertes et des incompréhensions. Un beau voyage, une belle histoire.
C'est un court roman qui raconte les souvenirs d'une fille de onze ans, d'une femme de quarante ans, d'une écrivaine de soixante ans. Onze ans, c'est l'âge qu'elle a lorsqu'elle débarque en Afrique équatoriale trois ans avant l'indépendance du pays qui deviendra la République de Centrafrique. Dans cet endroit à «la terre rouge, au fleuve immense et à la végétation intense» elle retrouve son père et sa compagne qui ressemble à l'Olive de Popeye. Une femme qui la déteste et avec laquelle elle va devoir composer. Et un père qu'elle n'arrive pas à cerner: «Quand j'ai onze ans je ne sais pas trop à quoi ça sert, un père. Toi tu as l'air de le savoir, moi j'ai beaucoup de mal à trouver une position de fille. Tout me semble faux: la façon dont tu me réprimandes, l'affection que tu revendiques comme un dû. Tu as l'air sincère, moi je ne sais plus qui je suis. Ce doit être le propre de l'adolescence de se construire secrètement, sans pouvoir dire sa pensée, sans pouvoir parler, alors que les parents ont sur nous pouvoir de vie et de mort.»
Alors, en cherchant une explication, elle revient sur ses premiers émois, sur sa prime enfance et ce souvenir de sa mère penchée sur un bidet et perdant son sang. Elle apprendra plus tard qu'il s'agissait d'un avortement. Quelques mois plus tard, les disputes au sein du couple vont mener au divorce. Quand, après un séjour dans les Vosges où sa mère dirigeait une colonie de vacances, elle regagne leur domicile, tout a disparu, y compris son père.
Elle grandira chez son oncle qui lui fera découvrir la littérature en lui racontant L'Odyssée, une formation culturelle qu'elle complètera des années plus tard avec des séances de cinéma hebdomadaires. Un bagage intellectuel qui lui permettra à quinze ans, d'être embauchée à l'Ambassade de France, chargée du tri des dépêches. Une première expérience professionnelle qui prendra fin trois plus tard, quand son père rentre en France pour ouvrir un garage dans le Roussillon.
Aujourd'hui, à soixante ans passés, elle a un regard nostalgique sur cette période. «Sans doute aurions-nous pu nous réconcilier de ton vivant si ta femme n'avait veillé à ce qu'il n'y eût aucun rapprochement entre nous, jamais. Aujourd'hui je me dis que si tu n’étais pas mort, je saurais t'aborder calmement, délestée de ma colère. Et je t'appellerais Fernand. Je ne m'adresserais plus à toi en t'appelant papa comme je m'efforçais de le faire, sans conviction, avec toujours la sensation d’un parler faux. Aujourd’hui j'ai une vie derrière moi, une vingtaine d'ouvrages publiés, et je ne sais pas ce que tu as pensé de mes premiers livres si jamais je t’en ai offert un. Black-out...»
Catherine Weinzaepflen aura trouvé dans l'écriture les passerelles susceptibles de lever ce Black-out, l'Indochine de Marguerite Duras se révélant proche de son Afrique. Qui donne au paradis perdu de l'enfance les couleurs et les parfums d'une époque révolue. Aujourd'hui, on sent la citoyenne du monde qu'elle est devenue, apaisée et même reconnaissante face à un père auquel elle offre ici un bel écrin, à l'image du paysage qui entoure le cimetière où il repose.
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