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Le film est une ville de signes, de formes, de lumières, il n´est pas impossible que s´y déroule dans l´image une vie où entre en jeu ces éléments. Mais ce n´est pas là ce qui me charme dans l´hypothèse du film. Je suppose que celle-ci constamment va naître, est née, va mourir, est morte : qu´elle est un enchevêtrement maniéré de tombes et de berceaux.
Éric Rondepierre (extrait) Qu´est ce qui demeure dans une image quand on la prive de mouvement ? Et qu´on la garde, ainsi déplacée dans l´immobile d´une page, récit coupé du monde ? Qu´on la regarde enfin, et qu´on l´écrive, dans l´espace manquant entre le film et ce qui lui donnerait sens ? Le travail de Rondepierre, en décapant les formes mortes du film, prélève et travaille l´image du cinéma non comme une image prélevée seulement, mais manquante : manque du film autour, manque de l´image qui pourrait achever le film (le mettre à mort).
L´Hypothèse que propose Rondepierre à la collection Portfolio de publie.net (et c´est pour nous marque de confiance et d´encouragement que nous fait l´artiste en confiant ce travail à cette jeune collection) est traversée fulgurante à la fois d´un travail personnel entrepris depuis près de vingt ans, et traversée diffuse de ce qu´on aimerait nommer histoire(s) du cinéma, si le titre n´avait pas déjà été celui utilisé il y a quelques années par Godard. Traversée non pas latérale, mais en profondeur, dans les entrailles de ce qui fait l´image et défait le récit cinématographique : le montage, la ligne, le mouvement.
Traversée non de son histoire, mais des histoires que dépose chaque image d´un film qui dirait l´histoire même de l´origine de l´image.
Traversée de chaque image, fouillée, éventrée, creusée d´autres images sans doute, dans l´excédent apporté de la griffure ou de l´exposition : creuset multiple des morts et des renaissances qui peuplent l´image.
Sur un espace court et puissamment dominé, ce que l´artiste traverse également, c´est son propre regard devant l´image cinématographique, et c´est l´écriture qui en retour recueille ce regard pour l´écrire littéralement, déterminer ce qui, entre le regard et l´image manque aussi. Si on a voulu que cette collection joue l´articulation d´un travail plastique et d´un travail d´écriture, Eric Rondepierre travaille précisément la plasticité de l´écriture dans les réseaux secrets constitués entre chaque page, et l´écriture de l´image dans ce qu´elle peut raconter, isolément.
L´hypothèse d´un manque à partir de laquelle se construit cette traversée est le levier quasi-hypnotique qui conduit autant l´écriture que la lecture : ce qui manque, c´est toujours ce qui achèverait le tout ; le film qui manque, c´est celui qui reste à faire, celui qui donnera sens à ceux qui ont été faits, celui qui achèvera l´origine autant que la fin. L´hypothèse :
Et si ce manque était toujours ce mouvement qui donne naissance à l´image, et si la traversée (de l´écriture, de la lecture) était ce geste au-devant du manque pour le maintenir à l´état de manque, c´est-à-dire finalement, d´appel ? Évocation trouble et mouvante, peut-être, de ce que disait René Char lorsqu´il écrivait « Le poème est l´amour réalisé du désir demeuré désir » Arnaud Maïsetti Artiste et écrivain, Eric Rondepierre à réalisé de nombreuses expositions en France et à l´étranger et publié plusieurs livres aux éditions du Seuil (Placement, La nuit Cinéma), Léo Scheer (Toujours rien sur Robert, Carnets) et Filigranes (Contrebandes, Apartés, Moires) notamment. Son travail est présent dans les plus prestigieuses collections internationales, le Moma New York, le Centre Pompidou Paris, le FNAC et à inspiré de nombreux textes et articles de la part d´auteurs tels que Daniel Arasse, Jean-Max Collard, Bernard Comment, Hubert Damisch, Catherine Millet ou encore Marie-José Mondzain. Il enseigne à Paris 1 depuis 1996.
Attiré dès ses années de formation autant du côté du texte que de l´image, comédien, performer, c´est au début des années 90 qu´Eric Rondepierre commence à explorer les « angles morts » du dispositif cinématographique extrayant des photogra
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