Découvertes littéraires, auteurs à suivre et lectures indispensables
Quelques sons parviennent encore à l'oreille droite de Louise, mais plus rien à gauche. Celle qui s'est construite depuis son enfance sur un entre-deux - ni totalement entendante, ni totalement sourde - voit son audition baisser drastiquement lors de son dernier examen chez l'ORL. Face à cette perte inéluctable, son médecin lui propose un implant cochléaire. Un implant cornélien, car l'intervention est irréversible et lourde de conséquences pour l'ouïe de la jeune femme. Elle perdrait sa faible audition naturelle au profit d'une audition synthétique, et avec elle son rapport au monde si singulier, plein d'images et d'ombres poétiques.
Jusqu'à présent, Louise a toujours eu besoin des lèvres des autres pour entendre. C'est grâce à la lumière qu'elle peut comprendre les mots qu'elle enfile ensuite, tels des perles de son, pour reconstituer les conversations. Mais parfois le fil lâche et surgissent alors des malentendus, des visions loufoques qui s'infiltrent dans son esprit et s'incarnent en de fabuleux personnages : un soldat de la Première Guerre mondiale, un chien nommé Cirrus ou encore une botaniste fantasque qui l'accompagnent pendant ces longs mois de réflexion, de doute, au cours desquels elle tente de préserver son univers grâce à un herbier sonore. Un univers onirique qui se heurte constamment aux grands changements de la vie de Louise - les émois d'un début de relation amoureuse, un premier emploi à la mairie, une amitié qui se délite. Le temps presse et la jeune femme doit annoncer sa décision...
Dans ce texte plein d'humour et de douceur, Adèle Rosenfeld tient en joue la peur du silence en explorant les failles du langage ainsi que la puissance de l'imaginaire. Les méduses n'ont pas d'oreilles est une plongée dans le monde des sourds et des malentendants, un premier roman éblouissant.
Découvertes littéraires, auteurs à suivre et lectures indispensables
Dans « Les Méduses n’ont pas d’Oreille », premier roman d’Adèle Rosenfeld, nous faisons la connaissance de Louise. Elle a toujours été malentendante mais son audition a encore baissé drastiquement. Les médecins lui proposent un implant cochléaire mais la jeune femme hésite, cette action impliquant la destruction totale de l’ouïe naturelle qui lui reste …
En proie à ce dilemme, Louise tente en parallèle d’avoir un emploi et de s’investir dans une relation amoureuse. Mais difficile de trouver sa place quand on navigue dans une sorte de brouillard où une situation banale peut vite devenir magique ou absurde, où l’on tente de reconstruire des phrases, des consignes, des demandes en se basant sur les quelques sons entendus, et où tout finit par manquer de sens.
Ce livre écrit par une autrice elle-même malentendante, est vraiment original. Louise est un personnage attachant, et Adèle Rosenfeld a le sens du tragi-comique, notamment dans le cadre du parcours médical de la jeune femme ou de son expérience professionnelle à la mairie.
Pour autant, l’autrice a créé tout un imaginaire dans lequel Louise se réfugie – avec un chien, un Poilu … – qui m’a rendu le texte parfois un peu confus, difficile à suivre, et j’ai eu à plusieurs reprises l’impression de passer à côté de ce qu’elle proposait.
Je ne suis pas une lectrice vraiment réceptive à un univers poétique donc je ne doute pas que d’autres accrocheront beaucoup plus que moi à ce livre. Il n’en reste pas moins que « Les méduses n’ont pas d’oreilles » montre la naissance d’une autrice prometteuse et à suivre !
Louise, la narratrice, est sourde d’une oreille depuis l’enfance, et le diagnostic tombé lors de la dernière visite chez le spécialiste révèle une aggravation de la surdité de l’autre oreille. La pose d’un implant cochléaire est suggérée, sachant que le risque de ce dispositif électronique ne soient pas à la hauteur n’est pas écarté. Dans l’indécision, Louise s’accroche et se bat pour comprendre les propos en lisant sur les lèvres de ses interlocuteurs.
Dans cette lutte permanente, outre les incompréhensions ou erreurs sur les mots et phrases reçus transformés parfois en humour et dérision, le risque de s’isoler est grand. Dans le monde du travail, ce ne sont pas les fausses amitiés et autres leurres de ses supérieurs et collègues qui permettent de « s’insérer ».
Louise déploie faux-semblants, joie de vivre entre autres, avec humour et dérision, ces boucliers brandis à chaque moment qui touchent le lecteur. Cependant, le monde imaginaire qui entoure Louise, un soldat de la Première Guerre, un chien, un botaniste … prend une si grande place qu’il brise la fluidité du texte, et heurte le sérieux de cette histoire. Mais n’est-ce pas l’expression du déni dans lequel vit Louise ?
Louise malentendante commence à basculer totalement vers la surdité. Un implant pourrait remédier à cette fatalité.
Alors qu'on pourrait penser qu'elle ne va pas hésiter, la narratrice nous emmène dans ses hésitations, ses peurs et ses angoisses.
D'une plume délicate, parfois un peu ironique, l'auteure nous plonge, en alternant réalité et songes, dans ses réflexions ; le choix est difficile.
Elle transcrit très bien la pression des proches, les personnes qui veulent l'aider mais dont le handicap va vite les irriter.
Le choix narratif m'a permis de m'approcher un peu de ce que doit ressentir quelqu'un qui voit les lèvres des autres bouger tout en restant inaccessible à ce qui se dit.
Un lecture éclairante.
Lu dans le cadre du prix des lecteurs du Livre de Poche 2012
Un étonnant voyage en surdité vous attend auprès de Louise. A peine quelques sons déformés dans l'oreille droite et le néant dans l'oreille gauche. Alors même si depuis l'enfance elle a appris à lire sur les lèvres, à compenser, à imaginer, à combler, lorsque les derniers sons disparaissent peu à peu, elle entreprend de les consigner dans un herbier sonore pour ne pas les oublier. Louise est un personnage attachant à l'imagination fertile et quelque peu débridée. Elle fait apparaître des personnages tout droit sortis de son inconscient, un soldat bien amoché de la Première Guerre mondiale, un chien errant qui s'attache à elle et une botaniste qu'elle ramène de sa visite au Musée d'histoire naturelle. L'univers de Louise nous transporte entre poésie et rêverie aussi lorsque l'unique solution proposée est la pose d'un implant, le choix de Louise l'obligera à sortir de son monde bien à elle pour ce confronter au réel. J'ai pris beaucoup de plaisir à découvrir le talent de l'auteur à tordre les mots, à manier un humour décalé et à vivre des scènes kafkaïennes comme celle de son entretien d'embauche où encore ses rendez-vous avec le corps médical. Ce handicap invisible est un combat de chaque instant pour comprendre et se faire comprendre sans quoi la vie serait faite de malentendus et d'incompréhension à vivre au quotidien on comprend à quel point ce doit être épuisant. Les descriptions de la langues des signes, de la gestuelle ou encore de sa vision de la bouche des autres afin de comprendre ce qu'ils disent sont des moments intenses dans le récit. La peur du silence y est constamment évoquée mais aussi celle d'entendre à nouveau, à travers un implant où les sons qui lui parviendront ne seront plus ce qu'ils étaient. Un superbe premier roman qui lève le voile sur ce handicap avec sensibilité. Bonne lecture.
http://latelierdelitote.canalblog.com/archives/2023/02/10/39784244.html
Louise entend de moins en moins bien de l’oreille droite, sa seule oreille encore entendante. Et peu à peu, même cette audition-là va disparaître. Les différents examens, et surtout sa propre expérience le lui assurent, elle doit absolument programmer rapidement une opération avant de devenir complètement sourde. Mais l’implant cochléaire qu’on lui propose va transformer aussi sa façon d’entendre, enlever le naturel pour passer au métallique, au synthétique.
Pour celle qui vit entre deux mondes depuis l’enfance, le choix et la décision sont bien difficiles. Doit-elle rester dans ce brouillard opaque dans lequel elle évolue depuis si longtemps. Il faut croire que malgré les inconvénients elle s’en satisfait puisqu’au fond il la rassure, ou doit-elle sauter le pas. Bien sûr, elle a appris à lire sur les lèvres, elle doit se faire à l’idée que très bientôt il lui faudra aussi apprendre le langage des signes. Mais elle se complaît d’une certaine façon dans cet univers dont elle connaît les contours, souvent flous, parfois opaques, ces conversations tronquées, ces échanges faits de quiproquos et d’isolement, mais qui semble-t-il la rassure, car elle s’y reconnaît.
D’autant que dans ce brouillard auditif, Louise s’est fait des amis, les sons et les mots perdus se sont transformés en un soldat, un chien, une botaniste aux curieuses manières, qui viennent peupler son monde du silence.
C’est une étrange expérience que de découvrir les sons et les mots à travers tous ces silences, ces manques, ces interprétations. Ne pas comprendre les failles mais savoir qu’elles sont là, qu’elles ont une réalité que moi, bien entendante, je ne peux même pas imaginer. Comprendre la difficulté du handicap, le regard des autres, l’isolement, le rejet. Entendre aussi le doute, la peur, les questions que posent un changement radical et les conséquences d’une opération que l’on ne maîtrise pas. En ce sens, j’ai apprécié ce roman, même si je dois avouer que le coté surréaliste m’a un peu perdue.
chronique en ligne sur le blog Domi C Lire https://domiclire.wordpress.com/2022/03/13/les-meduses-nont-pas-doreilles-adele-rosenfeld/
Les mots s'échappent.
Se taisent.
Les mots deviennent soldat. Botaniste. le chien Cirrus...
Les mots s'échouent sur la marée silencieuse qui petit à petit recouvre l'ouïe de Louise.
C'est eux, finalement, ces personnages fantasques et tellement desespérés, qui vont porter Louise jusqu'à l'inévitable. La surdité. La surdité ou l'implant. Ce qui semble évident.
Pourtant, Louise ne sait pas. Oscille.
A force de lire sur les lèvres, de les déchiffrer comme des textes à trous. de les combler comme elle peut. S'empare d'une voyelle telle une voleuse. Dérape sur une consonne, se rattrape, maladroite, malhabile, mal comprise. Par les entendants. Et les sourds. de malentendus en malentendus.
Sa mère qui l'encourage à accepter l'opération irréversible. L'amoureux, et les mots qui n'ont plus besoin d'être lus, qu'on va pêcher à même la bouche. Les collègues malintentionnés et la copine engagée...
C'est un sujet très sérieux. Très appliqué. L'auteure, par une grâce inattendue, parvient à donner de la légèreté et de la douceur à une situation troublante. Ce silence qui vient prendre toute la place.
J'ai été très touchée par ces personnages fabuleux, inattendus, sortis tout droit de l'imagination de Louise. Qui viennent mettre de la poésie là où se loge toute l'angoisse du monde.
Lu dans le cadre du #prixsagan
Louise est malentendante depuis la naissance. Restée longtemps sourde moyenne, elle est parvenue jusqu’ici à le cacher en lisant sur les lèvres de ses interlocuteurs. Mais l’aggravation de son handicap la met désormais au pied au mur. Maintenant sourde sévère, elle ne comprend plus ce qu’on lui dit et ne peut plus tromper personne. Il lui faut prendre une décision : accepter la pose d’un implant et perdre immédiatement ce qui lui reste d’audition naturelle, ou assumer une surdité bientôt totale et irréversible.
L’histoire de Louise est tout droit inspirée de celle de l’auteur. A ses côtés, l'on découvre les difficultés directement liées à la surdité, mais aussi, les répercussions psychologiques et sociales du handicap, dans une restitution qui questionne notre rapport à la normalité. Honteuse de sa différence, Louise s'est longtemps appliquée à la gommer dans sa relation à autrui, s'appliquant farouchement à donner le change pour ne pas sembler déficiente parmi les entendants. Ses efforts pour paraître comme tout le monde deviennent contre-productifs, lorsque, son audition se détériorant encore et personne ne prenant la peine de comprendre la véritable raison de ses difficultés relationnelles et professionnelles, Louise s’enfonce dans un malentendu - quoi de plus pré-destiné – propre à la faire passer pour demeurée. C'est ainsi que, très insidieusement, la pression normative de la société mène la jeune femme à se condamner, quasi de fait, à l'échec, instituant une inadaptation sociale qui n'avait pourtant aucune raison d'être.
Pour Louise qui, dans sa situation intermédiaire de malentendante, avait toujours pu (se) convaincre de faire partie de l’univers "normal" des entendants, se pose soudain la question de son identité et de son rapport au monde. Rejoindra-t-elle la communauté des sourds ? Un implant lui permettra-t-il de continuer à s’assimiler aux entendants ? Quoi qu’il en soit, Louise doit faire le deuil de toute perception auditive naturelle et n’envisage qu'avec angoisse cette nouvelle interaction avec ce qui l’entoure. A vrai dire, le rapport au monde qu’entretient la jeune malentendante est déjà très particulier. Sa mauvaise audition favorise distorsions et malentendus, et, au fur et à mesure que son imagination comble les trous de sa compréhension, se développent en elle d’étranges images, qui confèrent au récit poésie, onirisme et fantaisie. Cette singularité se fait souvent touchante, comme lorsque Louise s’évertue à la construction d’un herbier sonore, dans l’espoir d’emmener une trace des sons dans son futur monde du silence.
En même temps qu’un émouvant témoignage sur la surdité, empli d’un questionnement plein d’humour sur notre rapport au monde et à la normalité, ce premier roman est une bien jolie création littéraire, toute en originalité et poésie, qui mérite qu’on s’y attarde.
http://leslivresdejoelle.blogspot.com/2022/04/les-meduses-nont-pas-doreilles-dadele.html
La narratrice, Louise, est complètement sourde de l'oreille gauche, malentendante et appareillée de l'oreille droite depuis l'âge de cinq ans. Devenue adulte, elle qui s'est construite tant bien que mal entre ses deux parties, la sourde et l'entendante, voit son audition baisser drastiquement lors de son dernier examen chez l'ORL. La seule issue est l'implant cochléaire, une intervention irréversible qui transformerait le peu d'audition naturelle qui lui reste en audition synthétique.
Jusqu'à présent elle lisait sur les lèvres pour "compléter une langue à trous", les lèvres et la lumière lui étaient indispensables pour reconstituer les conversations. Depuis son enfance, elle a passé des heures chez l'orthophoniste à apprendre à lire sur les lèvres et à reconnaître les sons à l'oreille, des heures à "polir sa voix pour paraître normale" dans un déni de son handicap, refusant d'être enfermée dans une catégorie, le monde des sourds.
Maintenant qu'elle sombre dans la surdité profonde, elle consigne les derniers sons qu'elle entend dans un herbier sonore pour en garder une trace et développe un monde imaginaire peuplé de fabuleux personnages, un soldat de la première guerre mondiale, un chien, une botaniste... qui l'accompagnent pendant ses longs mois de doute.
Alors qu'elle éprouve les émois du début d'une relation amoureuse, déchiffrant péniblement les mots d'amour sur les lèvres d'un garçon, Louise se retrouve face à une décision qui va changer le cours de son existence : accepter l'implant ou rester dans son îlot de silence. Elle est face à la peur de devenir quelqu'un d'autre.
Ce texte est inspiré de l'histoire personnelle de l'auteure sans que ce soit explicitement dit. Les ressentis, les sensations d'une malentendante sont tellement bien restitués que nous sommes plongés de façon saisissante dans le monde des sourds et des malentendants. Les passages où l'auteure décrit l'univers de songes et de fantaisie qu'elle développe ne sont pas ceux qui m'ont le plus intéressée même si j'ai compris qu'elle voulait ainsi nous montrer qu'exercer son imagination était vital pour elle "Le silence libérait des mots et des images que le langage rendait prisonniers"
La capacité de l'auteure à décrire son, silence, sentiment d'entre deux mondes... est tout simplement exceptionnelle. Un texte doux, sensible et non dénué d'humour sur un handicap invisible. Un roman qui reste léger malgré le sujet et qui souligne que les différences peuvent se révéler précieuses.
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