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C'est l'histoire d'un petit garçon de onze ans qui a atteint un âge que son père n'a jamais eu. Trente huit années se sont écoulées, mais le souvenir est là, perpétuel, comme le nom de son père gravé dans le marbre. Ça se passe en Bretagne. Il y a la mer, les parties de pêche, et les sorties à la plage. Il y a tous ces souvenirs embarqués dans la Simca Aronde.
Le récit renferme la rugosité de la région, mais aussi ses miracles, quand le soleil vient à pointer au-delà de la grisaille qui s'élance sans cesse à l'assaut de ses côtes.
C'est l'histoire d'un enfant accroché à ses bribes de souvenirs, dont le père est parti trop tôt. Un enfant dans le corps d'un homme devenu à son tour papa.
Un premier roman simple, brut et tendre. Poignant.
Un lien très fort unit Michel et son père. Des gestes tendres, des baisers, des moments partagés, complices. Ces souvenirs sont ceux d'un homme d'une quarantaine d'années bien entamée lorsqu'il les évoque. C'est sa jeunesse dans les années 60 ou 70, la Simca Aronde familiale est là en repère. On mesure alors que la relation entre le père et le fils était très forte, parce qu'à l'époque, les papas étaient peu présents, pour beaucoup travaillant à l'extérieur et laissant la gestion de la maisonnée à la maman, s'extériorisaient peu et laissaient peu de place aux effusions et embrassades.
Pour beaucoup de lecteurs de ma génération -voire celle d'avant- ces souvenirs en appelleront de plus personnels quoique finalement très partagés, comme celui-ci : "Mon père aimait fumer. Sur le trajet, invariablement, il allumait une Gauloise à l'aide de cette chose ronde dissimulée sous le tableau de bord et sur laquelle il fallait appuyer. La fumée qui emplissait le petit espace me rendait très vite malade, entraînant chez moi de sévères nausées." (p.29). Les variantes pour moi, ce sont les marques : la voiture était une citroën -avec les suspensions qui faisaient déjà mal au cœur même sans cigarette- et les cigarettes de mon père étaient des JOB -putain, ça grattait, rien qu'à l'odeur...
D'autres images en commun, comme la dernière du père -heureusement pour moi beaucoup plus tard dans ma vie, à 27 ans- : "Je ne verrai pas mon père sur son lit mortuaire, j'ai tant de belles images de lui en tête. Je ne veux pas de celle-là." (p.99)
Très jolie chronique de Philippe Vourch. Tendre, sensible. Une écriture simple qui colle à la vie de Michel et de sa famille. L'exercice de parler du père absent peut être casse-gueule, on peut tomber très vite dans du larmoyant, écueil qu'évite Philippe Vourch. Il y a bien sûr des regrets comme celui de n'avoir pas pu accompagner le mourant plus longtemps : "Mon père est parti seul, dans une chambre d'hôpital aseptisée, au son d'un bip de machine." (p.101), mais l'ensemble est beau, poétique parfois. Court roman qui va à l'essentiel par des images fortes, qui évite le superflu et tant mieux. Pourquoi se cogner un gros bouquin de souvenirs qui se répètent alors que quelques scènes fortes bien racontées marquent plus ? Un peu comme quand on regarde une vidéo longue et qu'on s'ennuie au bout d'une heure -voire avant- alors qu'un résumé de quelques minutes avec les grands moments aurait marqué plus.
L'éditeur Christophe Lucquin fait souvent dans le décalé, le déjanté, il sait aussi repérer des textes délicats, fins, ancrés dans la réalité. Et toujours ces belles mise en page et présentation.
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