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En décembre 1792, Francisco Jose de Goya y Lucientes, peintre du roi, se réveille aux Mallos, un village perdu dans l'Aragon. Il n'y a là-bas que la gardienne Rosario, sa chatte Loca et, la nuit, des morts. Des morts tyranniques, qui n'aspirent qu'à une chose : danser jusqu'au bout de la nuit, à en faire crever les vivants.
Qui est cette vieille sorcière et comment Goya s'est-il retrouvé dans cette étrange demeure ? Il se souvient s'être couché chez un ami, à Séville... ou était-ce sur un bateau, pris dans une terrible tempête ? Il n'a qu'une seule obsession : quitter ce village, reprendre ses pinceaux et peindre pour impressionner la cour. Mais les grotesques qui peuplent ses rêveries fantastiques en ont décidé autrement.
Le songe de la raison engendre des monstres... C'est ce que Goya comprend, cloué au lit, entre deux crises de fièvre et de délire causées par le saturnisme. De ce terrible songe dont il fut prisonnier naîtront ses célèbres Caprices, satires d'une société sur le déclin.
Aurore Guitry transforme le peintre en héros de roman, en le faisant voyager dans l'univers de ses tableaux. Et nous révèle un Goya romanesque et génial, drôle et désenchanté, mais surtout terriblement visionnaire.
La chambre, le lit tanguent, il est sur un bateau puis se retrouve dans un asile d’aliénés d’où il part et se retrouve dans une petite chambre, un lit crasseux, à Mallos, village quasi fantôme de l’Aragon. Comment est-il arrivé, il ne saurait le dire. Une femme s’occupe de lui. Son nom ? Rosario, la gardienne des Mallos, enfin c’est ainsi qu’elle se présente. Rosario soigne ses blessures, assez vilaines au demeurant, avec des onguents, une potion des plus amères, le lait de la main rouge, lui fait manger de la viande crue. Ses rêves, plutôt des cauchemars, sont peuplés de monstres et autres créatures qui dansent une sarabande effrénée, où réalité et hallucinations se mélangent au gré des visions.
Sortant de son coma, il se retrouve chez son ami, se sert de ses hallucinations pour peindre autre chose que les portraits de cour, quelque chose qui lui tient de plus en plus à cœur. Ainsi serait la genèse des Caprices. Des scènes que Aurore Guitry a parfaitement décrites.
La journée, il satisfait aux commandes de notables et la nuit, il retranscrit ses hallucinations, dénonçant la folie, le Mal, l’hypocrisie, la bassesse.
"Tous les grands veulent leur portrait. Le jour, il croque leur visage. La nuit, il dessine les Mallos : Rosario, les moines, la Bruja et son cortège de fous qui bourdonnent autour de lui.".
Je suis entrée facilement dans les délires de Goya. Son arrivée chez Rosario après son départ de l’asile d’aliénés est très réaliste. Après c’est un vrai mélange d’onirisme, de souvenirs mixés à l’aune du délire. Ce livre est d’une grande fluidité, facile à lire, prenant, court, très dense. Il me fait penser de loin, à la série « Contes et légendes » que je lisais adolescente.
Je n’avais de Goya que le souvenir des portraits sur commandes et j’ai découvert, par le biais de cette lecture, un nouveau côté du talent du peintre que j’apprécie beaucoup plus. Le gâcheur de Rosario exorcise ses démons avec les Caprices, satires des meurs espagnoles. La dualité existe ; au jour, les bourgeois et la cour, à la nuit ses rêveries fantastiques et grotesques.
Un livre court, dense. J’ai aimé entrer dans les fulgurances de Goya et découvrir un autre versant de l’art de l’artiste. Aurore Guitry, une auteure à lire.
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