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LE LIVRE Dans la bonne ville de Santa Clara, celle qui produit le meilleur rhum du pays, personne n'est au courant de la Révolution que le dictateur Alvaro Benitez a menée il y a une vingtaine d'années. Les habitants vivent et cultivent comme autrefois, au gré des sérénades d'Ibrahim Santos, musicien météorologue. Alors forcément, l'intrusion des troupes armées révolutionnaires, et plus encore l'arrivée d'un jeune ingénieur agronome brillantissime, vont bousculer un peu les habitudes... Sur le mode du conte, avec une pincée de réalisme magique latino-américain, un roman drôle et satirique sur nos avancées techniques, et une parodie des dictatures.
Quelque part en Amérique du Sud, les habitants d’un petit village vivent au rythme de la récolte de cannes à sucre et des sérénades météorologiques que leur chante Ibrahim Santos. Leur pays a connu un coup d’état maquillé en révolution quelques années plus tôt. Occupés à être heureux, ils n’en ont pas eu l’écho. Le général au pouvoir vient à goûter le délicieux rhum que les villageois confectionnent depuis des générations et il décide d’en augmenter la production. C’est à l’ingénieur Joaquin qu’il incombe d’apporter le progrès au village de Santa Clara. Mais les habitants résistent et l’envoûtante gitane, Lia Carmen, a d’autres projets pour ce beau jeune homme qui vient de la ville.
Yamen Manai oppose les traditions qui permettent de vivre, chichement certes, mais heureux au progrès et à la course au profit. C'est sans doute banal comme opposition, caricatural sûrement, et un peu facile sans aucun doute, mais il le fait dans une écriture, souvent drôle avec de jolies trouvailles, je l'ai déjà dit, parfois plus noire et toujours très poétique et très liée aux contes. Les personnages ne sont pas en reste : Lia Carmen la belle liseuse d'avenir dans le marc de café, le vieux Ruiz, une sorte d'Agecanonix américain du sud plutôt que breton, Alfonso Bolivar le barbier qui se mèle de tout, Joaquin le jeune ingénieur par qui le malheur arrive est plus complexe que le simple "méchant" de service et Ibrahim Santos, le joueur de viole, qui à la fin de ses sérénades donne la météo à venir –sans jamais aucune erreur- et donc permet aux agriculteurs de s'adapter aux conditions, cette ville totalement coupée du monde réel qui vit sans contrainte : une sorte d’Eldorado pour les conditions de vie.
Vers la fin, entre deux chapitres apparaissent des apartés : une phrase empruntée à Nietzsche, un passage du Coran ou encore, une nouvelle de 4 pages, un cauchemar de l’écrivain, a priori sans rapport avec le livre puisque très actuel dans l’écriture, mais qui n’est finalement que l’aboutissement de son raisonnement et ce qui risque bien de nous arriver si ce n’est pas déjà le cas.
Si vous ne connaissez pas encore les éditions Elyzad, c'est le moment de vous y mettre et ensuite -ou avant ou pendant, je ne voudrais forcer personne- d'aller voir leur très beau et très bon catalogue ; si vous les connaissez, vous savez que vous pouvez y aller sans risque.
Yamen Manai écrit là son deuxième roman, pas toujours l'exercice le plus facile, mais il passe brillamment le test.
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