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«Pendant de longues années, autant que dura notre jeunesse, nous nous tînmes sur la plus grande réserve et ne fîmes jamais allusion au passé. L'autre jour, elle me demanda à brûle-pourpoint, et son visage encadré de cheveux gris se colorait d'une rougeur juvénile : - Pourquoi m'avez-vous quittée ? Je fus sincère car je n'eus pas le temps nécessaire pour fabriquer un mensonge : - Je ne sais plus... mais j'ignore aussi tant d'autres choses de ma propre vie. - Moi, je regrette, dit-elle. (Et déjà je m'inclinais à cette promesse de compliment.) Il me semble que vous devenez très drôle en vieillissant.» Un des chefs-d'oeuvre de la littérature du XX? siècle.
La conscience de Zeno est un classique de la littérature italienne publié en 1923. Il aura fallu trois ans à son auteur Italo Svevo pour l'écrire.
Ce roman est introduit par une note d'un certain Docteur S. expliquant qu'il publie les mémoires de son client pour se venger du fait qu'il ait abandonné sa cure psychanalytique.
Ce client, c'est Zeno Cosini, un riche triestin à qui le Docteur S. a demandé de consigner ses souvenirs de faits et moments importants de sa vie dans une biographie.
Divisés en six chapitres intitulés « La cigarette », « La mort de mon père », « L'histoire de mon mariage », « L'épouse et l'amante », « Histoire d'une association commerciale » et « Psychanalyse », ce récit à la première personne nous présente un personnage assez loufoque, addict à la cigarette et aux jeunes femmes, égoïste, hypocondriaque, menteur et manipulateur qui a néanmoins réussi à fonder une famille en épousant la seule des trois filles Malfenti qui ne le l'attirait pas, la quatrième étant bien trop jeune et l'ainée Ada dont il était amoureux lui préférant Guido.
« La vie n'est ni belle ni laide, elle est originale ! » nous déclare Zeno page 405. C'est exactement le terme que j'emploierai pour ce roman « original » car nous nous amusons beaucoup des situations absurdes dans lesquelles se met Zeno, de ses contradictions et de ses bonnes résolutions jamais tenues.
C'est malgré tout un roman dense, qui demande de l'attention d'abord parce que les événements ne sont pas racontés de manière chronologique et ensuite par l'ambivalence de ses comportements et de sa conscience.
Dans le dernier chapitre intitulé « psychanalyse » le protagoniste se déchaine sur cette pratique qui a tendance à tout ramener à l'Oedipe infantile, préférant son médecin généraliste le Dr Paoli et les « analyses véritables » pour expliquer ses maux, médecin à qui il n'a pas le courage d'avouer qu'il est en psychanalyse « Peut-être me couvrirais-je de ridicule en lui racontant qu'à mon âge je m'étais laissé embobiner par une charlatanerie de ce genre ».
Ce roman est souvent présenté comme une critique de la psychanalyse alors que d'autres théories évoquent la possibilité d'une double interprétation du dernier chapitre. Car en admettant lui-même que les souvenirs peuvent être inventés, nous pouvons parfois douter de la fiabilité de son récit.
Quoiqu'il en soit ce que j'ai aimé par-dessus tout est de plonger dans la vie triestine du début du XXe siècle vue par un antihéros riche et original, qui ne sait comment remplir ses journées, dans le quotidien d'une famille de notables oeuvrant dans le milieu du commerce et des spéculations boursières.
Magnifique
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