"On n'est pas dans le futurisme, mais dans un drame bourgeois ou un thriller atmosphérique"
Ramón Pérez de Ayala (1881-1963) esprit, sceptique et corrosif, nous donne ici, avec La Chute de la maison Limón (1916), en raccourci, un véritable inventaire de ce qu'on a appelé " l¹Espagne noire " : caciquisme archaïque, clientélisme politique, grandes femmes bréhaignes en habit noir, frère incestueux en esprit mais, en acte, sadique assassin, violence et passion se disputant le territoire étriqué d'une province espagnole où agonise la bannière qu'un Hemingway qualifia de " sang, pus et permanganate ", avec, en apothéose, l'ultime séquence du garrot et des hyènes hurlantes qui annonce, déjà, le tomber de rideau camusien de L'Étranger. Baignant dans l'irréalité et une société fossile, ce court récit nous en apprend bien plus, dans sa concision et l'efficacité de sa charge, qu'une vaste histoire de cette Espagne, promise, vingt ans après, à de sanglants affrontements. Grand défenseur de la démocratie, il applaudira à l'avènement de la République, en 1931, dont il sera l'ambassadeur à Londres, avant de choisir l'exil et le silence ; il ne reviendra en Espagne qu¹en 1954, quelques années avant sa mort.
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