"On n'est pas dans le futurisme, mais dans un drame bourgeois ou un thriller atmosphérique"
Avec mon ami le guide de haute montagne Daniel du Lac, je suis parti de Menton au bord de la Méditerranée pour traverser les Alpes à ski, jusqu'à Trieste, en passant par l'Italie, la Suisse, l'Autriche et la Slovénie. De 2018 à 2021, à la fin de l'hiver, nous nous élevions dans la neige. Le ciel était vierge, le monde sans contours, seul l'effort décomptait les jours. Je croyais m'aventurer dans la beauté, je me diluais dans une substance. Dans le Blanc tout s'annule - espoirs et regrets. Pourquoi ai-je tant aimé errer dans la pureté ?S.T.
Pour moi qui suis amateur de ski de randonnée et de raids à skis ce bouquin nous plonge bien dans le microclimat du voyage, dans l'intemporalité de la montagne hivernale: un pas après l'autre, une empreinte laissée dans la neige... J'ai bien aimé
Alors que sort au cinéma Les chemins noirs, film adapté du livre éponyme de Sylvain Tesson, j’ai eu envie de me pencher sur un autre de ses livres: Blanc.
Sylvain Tesson est un explorateur écrivain, un poète aventurier, un philosophe voyageur. En 2018, il décide de traverser les Alpes en ski, en partant de la mer Méditerranée pour rejoindre la mer Adriatique. Une véritable expédition qu’il mène avec deux amis: Daniel Du lac, puis Philippe Rémoville rencontré sur le chemin. Ce raid sera mené durant quatre hivers, par périodes de quelques semaines.
Chacune des quatre-vingt-cinq journées nous est contée par Sylvain Tesson, avec son parcours et ses difficultés techniques. Partir avant le lever du Soleil pour arriver au refuge le soir, épuisé mais heureux. Se satisfaire de l’essentiel et trouver son plus grand bonheur dans une tasse de thé bien chaud.
On s’en doute, les Alpes ne se laissent pas apprivoiser si facilement. Il faut grimper et descendre les sommets: montées épiques au piolet et descentes risquées en ski dans un paysage fragile. La montagne recèle de dangers et d’émerveillements. Là où le ciel et la terre se rejoignent, elle fascine par son univers féérique et nous remet humblement à notre juste place. Le blanc de la neige symbolise ici la pureté, l’éphémère, le mystère, la liberté…
« La neige dicte la pensée du ciel à la Terre »
Ce qui fait toute la beauté de ce livre, ce sont surtout les pensées intimes et les réflexions philosophiques de Sylvain Tesson, inspirées par le blanc de la neige, qui nous fait voir le monde autrement. Sa plume poétique nous amène à méditer.
Blanc. Sylvain Tesson nous emmène non pas sur les chemins blancs mais sur la matière poudreuse, collante ou même compacte: La traversée des Alpes dans la neige ! rien que ça !
Il y glisse avec son ami Dulac, guide de haute montagne, s'y ajoute un autre fondu de montagne, Rémoville, ingénieur. Véritable admiration pour l'exploit de ces messieurs.
Sylvain Tesson tient un journal de bord précis et en nous expliquant les difficultés, les risques encourus et nous promène chaque jour de cols en pics, de vallées en monts, de files en aiguilles. Mais aussi de citations d'auteurs en citations de l'auteur, de profondes pensées en légères réflexions et ça ça me plait.
A l'opposé des efforts colossaux pour aller d'un refuge à l'autre, nous, calés au chaud dans un fauteuil, avalons les chapitres allègrement. Mais lorsque pointe l'arrivée, l'Adriatique à l'horizon, les étapes se ressemblent trop, et à cause de cette répétition, Dulac veut mettre les bouchées doubles, Tesson raccourci les chapitres, et nous, nous passons certains paragraphes : on s'ennuie, on veut tous aller au bout plus vite.
Pour le lecteur, l'échelle DAF pointe à 000, alors n'hésitez pas !
Découverte de sa littérature, de ses mots et rythme. Il a une émotion simple de l'environnement, ce qui nous entoure sur lequel nous avons aucune maitrise. Ce monde pour lequel prendre le temps de l’observer, de l'affronter et de l’apprécier est secondaire dans une société tournée vers le consumérisme et soi-même, son rappel est spectaculaire et bénéfique. Une prise de recul du temps, des bénéfices de prises de risques et la confiance choisie car partagée y sont exprimés avec justesse.
Belle découverte
Sylvain Tesson va de Menton à Trieste en passant pat les sommets alpins.
Pendant trois hivers, de 2018 à 2021, ils progresseront vaille que vaille.
Un journal de bord nous donne les itinéraires, les km parcourus, les lieux rejoints.
Descentes, remontées, dans des conditions parfois extrêmes, souvent dangereuses.
Le jour sur des skis, le soir dans des refuges, les jours se ressemblent et sont différents à la fois.
Mais ils sont toujours émerveillés.
Il faut reconnaître à Sylvain Tesson l'endurance, le goût des défis, le courage.
Accordons lui aussi l'art de maîtriser la plume.
Et pourtant, je n'arrive pas à m'attacher au personnage, à le trouver sympathique.
Je le trouve mégalo, pompeux dans ses références littéraires, imbu de sa personne.
Et je m'ennuie en lisant ses textes.
Bon, allez, on rassemble piolets, cordes, crampons, peaux de phoque, couteaux à glace, boussole, cartes et l’on s’enfonce dans la matière, la substance, le blanc, l’effacement, la virginité, en un mot, la beauté . Le rêve ? Pas vraiment : il fait un froid horrible, on ne voit rien, on risque à tout moment de se retrouver coincé sous une avalanche et le soir, la température du gîte oscille entre 1° et 5° (et l’on est très content quand on a 5°…) Franchement, c’est un bonheur de lire les crapahutages du gars Tesson surtout quand on est bien au chaud sous sa couette. Il est incroyable ce type : il faut imaginer un Pascal en vadrouille, un La Rochefoucauld alpiniste. Il parle comme un philosophe ou un moraliste du 17e. Il est le « mariage … entre le muscle et l’âme, la vie sauvage et les raffinements de l’esprit.» Il nous invite aux « noces de la plume et du piolet.» C’est délicieux, on se régale. On n’avait pas forcément imaginé qu’il existât des intellectuels sportifs, des athlètes poètes. Avec Tesson, on est servi. D’ailleurs, dans le fond, le blanc sert à ça : penser, méditer, refaire le monde. On peut aussi réciter des poèmes, chanter, penser à des visages, ou selon l’altitude, revoir son Histoire de France : à 1100 mètres, on côtoie les chevaliers de la Table Ronde, à 1700 mètres, on révise son Louis XV. Et puis, « la moindre course dans la montagne dissout le temps, dilate l’espace, refoule l’esprit au fond de soi. » C’est moins cher qu’une thérapie. Plus risqué aussi. Quoique… Et puis, savoir où aller, ça occupe. Le mouvement, toujours le mouvement… Avancer, avancer. Savoir par où passer. Impossible de se poser. Si on ne bouge pas, on y reste. La vie est en jeu. Évidemment, il faut des heures pour faire quelques mètres. Dans un sens, c’est mieux pour méditer, plonger en soi... Et puis le soir, on est content de trouver un feu de cheminée, un coin où dormir et une assiette de soupe. C’est le paradis. « Mais l’homme est ainsi fait que pour apprécier l’amitié d’un poêle à bois, il lui faut d’abord skier entre les avalanches.» Que c’est agréable de n’avoir rien et de n’être rien. L’homme moderne en est réduit à cela. Le temps de la vacance. Faire l’expérience du rien. Quitte à en mourir. C’est en frôlant la mort que l’on se sent vivant…
Un bon bouquin... On n’est jamais déçu avec Tesson. Il est intelligent, lettré. De bonne compagnie. Il a un sacré besoin de s’agiter. Ah le fameux divertissement… Chacun le trouve où il peut. Moi, je crois que tout ce blanc me donnerait un sacré cafard… Pas vous ?
LIRE AU LIT http://lireaulit.blogspot.fr/
Après Les chemins noirs, Blanc :
" Cette fois, je partais dans le Blanc. Et je comptais sur la couleur substantifique pour me pourvoir la joie. Le séjour dans les paysages de neige est une saignée de l'âme. On respire le Blanc, on trace dans la lumière. Le monde éclate. On se gorge d'espace. Alors, s'opère l'éclaircie de l'être par le lavement du regard."
Un grand moment de lecture avec Sylvain Tesson, des mots inspirant le voyage, de l'humour ,des références culturelles. "Blanc" ,je l'ai lu tout en le retenant tellement ce temps était un délice.
Laissez-vous emporter .... merci Sylvain Tesson
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Merci pour ton retour Marlène. J'attends d'aller à Brive pour l'acheter...