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Emma a un drôle de grand-père. Une longue barbe toujours taillée de travers et des yeux un peu fous. Enfin ça, elle le sait grâce à la terrifiante statue à son effigie qui trône en haut des escaliers de la maison familiale de Fontenay-aux-Roses. Andreï Siniavski, écrivain soviétique et survivant du goulag, est décédé quelques mois avant la naissance de sa petite fille. En fouillant dans cette caverne d'Ali Baba des Hauts-de-Seine où ses grands-parents s'étaient exilés en 1973 pour fuir leur URSS natale, Emma a retracé une vie de littérature, de répression, de résistance et d'amour. Elle l'a pu aussi et surtout en écoutant Maria, sa grand-mère, raconter cette épopée héroïque qu'elle a partagée avec Andreï. Et il n'y a pas plus extraordinaire histoire que celle des époux Siniavski, deux grands esprits, épris l'un de l'autre, de liberté et de belles lettres, qui ne se sont jamais laissé dompter... mais toujours avec poésie.
Le 8 septembre 1965, Andreï Siniavski, professeur, écrivain, critique littéraire, est arrêté à Moscou. Au quartier général du KGB, on lui reproche d’avoir contourné la censure de son pays en publiant ses écrits en France sous un pseudonyme. Marié, père d’un petit garçon de 9 mois, il est condamné à 7 ans de « camp à régime sévère ».
Sa petite-fille, Emma, raconte l’histoire de son grand-père dans ce qui est son premier album de bande dessinée. Puisant dans les souvenirs de Maria, sa grand-mère, ainsi que dans ceux de la maison de Fontenay aux Roses où Maria et Andrei Siniavski se sont installés en 1973 après avoir fui l’URSS, Emma raconte leur rencontre et leur amour, la vie au goulag, la peur du régime autoritaire mais aussi la volonté de s’exprimer, quoi qu’il en coûte.
S’inspirant des lettres que Andreï envoyait à sa femme depuis le goulag, elle opte pour un trait minimaliste et une typo fine (pas toujours facile à lire !). S’affranchissant des contraintes de la bande dessinée, elle propose un recueil vivant où les caricatures enjouées apportent légèreté et humour au récit.
La vie de ce couple méritait d’être racontée. La liberté par l’art, par l’écriture, la force de vouloir contourner la peur et la censure, Emma Siniavski rend un hommage bien mérité à ses grands-parents.
Babouchka et Dedouchka, Survivre au pays des Soviets
C’est en bande dessinée qu’Emma Siniavski a décidé de rendre hommage à son grand-père paternel à travers cet album Babouchka et Dedouchka, publié chez Sarbacane. Celui qui s’appelait Andreï Siniavski a disparu quelques mois avant sa naissance. Et c’est en déambulant dans la maison où il résidait avec Maria, sa grand-mère, qu’elle découvre qui était vraiment son dedouchka (grand-père).
Son père ne lui avait pas caché le passé de cet écrivain connu, mais la documentariste a voulu mettre en lumière cet incroyable destin qui mena ce grand-père à un exil en France. Avec le témoignage de sa grand-mère et des incursions dans le bureau qu’il occupait dans leur maison de Fontenay-aux-Roses, Emma Siniavski nous raconte le parcours de cet homme qui, comme de nombreux auteurs et intellectuels soviétiques, connut la répression et le goulag pour avoir osé raconter le véritable visage du régime politique qui opprimait son pays.
C’est donc en noir et blanc, avec un trait extrêmement fin et simple, parsemé de quelques touches de couleurs que l’autrice revient sur la vie de son grand-père qui pourtant au début était tout acquis à la cause communiste. Mais la répression, alors qu’elle n’avait pas lieu d’être, va le mener à se servir de sa plume pour faire connaître à l’étranger les revers du régime soviétique.
Sous le pseudonyme d’Abram Tertz, Andréï Siniavski va ainsi en 1956 faire publier ses écrits en France. Arrêté, puis jugé en 1966, l’écrivain est condamné à sept ans de camp, peine qu’il effectuera à Doubrovlag en Mordavie.
Grâce au soutien et à la détermination de sa femme, dont il ne pourra recevoir la visite que deux fois par an, Siniavski obtiendra finalement sa libération anticipée en juin 1971. Les époux Siniavski s'installeront en France deux ans plus tard.
C’est avec beaucoup de réalisme et d'affection qu'Emma Siniavski réussit, avec ce premier album, à mettre en lumière ce couple étonnant, qui affronta avec courage le régime soviétique tout simplement pour obtenir la liberté de lire et d’écrire.
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