"On n'est pas dans le futurisme, mais dans un drame bourgeois ou un thriller atmosphérique"
Une déambulation fluviale intrinsèque, olympienne. Bien au-delà, une partition cruciale pour un voyage au bord de la Loire armoricaine.
Gwenaëlle Abolivier après « Tu m’avais dit Ouessant » (Prix Marine Bravo Zulu 2020),et « Marche en plein ciel », « La forme du fleuve » est un livre qui échappe à tous les genres. Tant il est personnel, intime et dans un même tempo, son ouverture est spéculative. Il offre le voyage, l’esprit et le plein. C’est une transmutation empreinte de littérature, de senteurs et de regards.
En résidence d’écriture dans la maison de Julien Gracq « alias Louis Poirier », l’écriture devient complice, l’union et l’ultime. L’invitation au bovarysme mais en fusion avec le décorum, sans amertume ni rêverie. Ici, c’est la plénitude d’un lieu de vie qui octroie le passage de l’écluse. Les pages inestimables, d’eau et de mouvement. « La forme du fleuve », une force qui propulse, tel le levier.
« C’est de la puissance de l’eau et du vent que naissent les îles de la Loire. Habitées ou esseulées, elles sculptent la forme du fleuve autant qu’il les façonne ... Comme Joseph Conrad, je suis plus alliée par la géographie et les mappemondes que par la géométrie et les calculs trigonométriques ».
1006 kilomètres fusionnels, paysages mémoriels. Méandres, soupirs et chuchotements, bruissements et envols d’oiseaux migrateurs. L’autrice n’est plus. Elle est l’invitée qui écrit son périple rémanence. Essentiel et lumineux, le ciel comme une écharpe autour de son cou. D’Angers à Nantes, les rencontres comme des péniches où l’on dort tout en sachant que tout bouge mais que tout sera sceau et souvenirs. Comme un bel escompte hyperbolique du futur. Des poèmes semés au gré des pages et des signes du temps, comme l’empreinte qui persiste et assigne les crues, les surprises, ce que le fleuve exprime comme vitalité et puissance« Quel est cet enfant sans âge ? Sur cet îlot délaissé et sauvage / Entre laisses de vie et friches de sable / Passent les heures et défilent les jours d’orpaillage ».
« J’aimerai tout savoir de la petite truite qui circule en toi . Je m’endors ».
Gwenaëlle Abolivier est en quête. Elle cueille l’essentiel même des philosophies, des histoires des hommes et des femmes qui vivent en ce lieu de béatitude, de poésie, d’endurance et de constance. Dans cette fidélité à une terre parfois sauvage et risquée.
Rencontrer Claude M. Un inspecteur devenu ami de Julien Gracq. Féru de littérature et connaissant du bout des doigts toute l’œuvre de Julien Gracq jusqu’au plus petit secret. Dont l’amitié fut un socle, un rite. Durant de longues années et jusqu’à la mort de l’écrivain de renom. Entre ces deux hommes, un lien immuable, celui de l’intégrité et de la puissance de la littérature. La connivence et la complicité, Saint-Florent-le-Vieil, un antre où la parole était un fluide magnétique. Les rencontres comme des étoiles dans les yeux.
Le récit est un fleuve fabuleux. La nature en diapason. La litanie de l’eau qui n’a jamais dit son dernier mot. « Les îliens sont une connaissance intime de la Loire / Ici, pas de façade / Ce sont eux qui vivent avec elle / Dans un même bonheur à la fois enchâssé sur lui-même et ouvert aux autres ».
Loger dans la chambre que Julien Gracq occupait enfant change la donne. S’élève ce qui dépasse tout entendement. Le récit est un lever de voile sur les habitus, l’idiosyncrasie. Ce monde fluvial qui est à l’instar de notre part de lumière. Une navigation dont on sort plus grand, plus attentif à l’humain et au monde. Le fleuve comme une échappée dans nos intimités. Comprendre l’attachement inépuisable des îliens pour la Loire. Fascinante, rebelle, mystique et touchante.
Cet écrin est une promenade riche de symboles sur la Loire. Gwenaëlle Abolivier rassemble l’épars et les rais de lumière qui s’échappent de sa résidence d’écriture pour nous les offrir en partage.
C’est superbe, vivifiant, parfois mélancolique et romantique. Comme dans la vraie vie, puisque c’est de cela qu’il s’agit. Transcrire le tracé de la Loire et ne rien laisser dans le hasard des rencontres, pas même une ombre ou le chant secret de la Loire. Ce livre est un guide de voyage précieux, un hymne poétique et une marche au bord de la Loire souveraine. Publié par les majeures Éditions Le Mot et le reste.
À la recherche de Julien Gracq
Après avoir cheminé dans les Cévennes sur les pas de Robert-Louis Stevenson, Gwenaëlle Abolivier récidive en suivant les boucles de la Loire sur les pas de Julien Gracq. Un récit de voyage littéraire, poétique et géographique.
Gwenaëlle Abolivier a choisi de rechausser ses chaussures de marche. Délaissant les Cévennes et les chemins pris dans les pas de Robert-Louis Stevenson qui nous avait donné le beau Marche en plein ciel, la nouvelle directrice artistique et littéraire de la Maison Julien Gracq a choisi cette fois d’explorer les paysages chers à l’auteur du Rivage des Syrtes. Le long de cette partie de Loire que l’on appelle armoricaine, d’Angers à Nantes, elle va nous proposer de découvrir avec elle des paysages sans cesse changeants, en constante mutation. Une nature que l’homme aura tenté en vain de domestiquer, mais les caprices du fleuve auront eu raison de cette volonté qui se révélera utopique face aux crues, aux bancs de sable et aujourd’hui à la sécheresse.
Si une partie du livre est consacrée à la géographie, la romancière choisit, à la manière des Choses vues de Victor Hugo de nous sonder l’histoire et de rencontrer les acteurs qui font vivre jour après jour le grand fleuve, du scientifique au jardinier, du pêcheur à l’artisan. On comprend alors ce qui fait la richesse, le génie du lieu. On se rend aussi compte de la fragilité d’un écosystème et on saisit la dimension poétique de ces pérégrinations. Au détour d’une phrase, du vol d’un oiseau, d’un clocher qui domine les eaux calmes et pourtant sournoises, d’une lumière plus intense, on se rapproche de la littérature et de la figure tutélaire de Louis Poirier, plus connu sous son nom d’écrivain: Julien Gracq.
Le natif de Saint-Florent-le-Vieil n’est jamais très loin dans cette exploration intime des paysages qui l’ont marqué, façonné, inspiré. Un peu comme dans une enquête de police, Gwenaëlle Abolivier déroule le fil à partir de premiers indices, retrouve un ami intime qui va lui faire cadeau du nom d’une autre personne qui l’a bien connu. Et de fil en aiguille, on voit se dessiner le portrait tout en nuances d’un homme attachant et fidèle à sa Loire, y compris durant ses années parisiennes. On le suit dans ses années de formation à Nantes jusqu’à sa mort à Angers, sans oublier cette maison devenu e résidence d’écriture. Ce faisant, le récit de voyage devient aussi une façon d’explorer une œuvre et de nous donner envie d’y retourner depuis Les Eaux étroites et les souvenirs d’enfance jusqu’à La Presqu’île du côté de Guérande qui va marier le ciel, le fleuve et la mer, au bout d’un voyage qui creuse l’espace et fait à chaque pas s’unir les paysages et l’aventure intérieure.
https://urlz.fr/mHTy
Un roman graphique sur la mort tragique de Guy Môquet, fusillé pendant la Seconde Guerre Mondiale à 17 ans. Je lis beaucoup de livres sur ce thème mais je n'avais jamais rien lu sur Guy Môquet, pour moi ça a été une belle découverte. Les dessins sont simples, de couleur sépia. Ce livre peut être lu par des adolescents ou des adultes sans difficulté.
Sur les pas de Stevenson dans les Cévennes
Gwenaëlle Abolivier a choisi le voyage à pied, de Clermont en Provence, pour se ressourcer et (re)découvrir l'œuvre de Stevenson qui l'a précédé sur ces chemins. Un cheminement érudit et revigorant!
Qui n'a pas ressenti ce besoin, après le confinement, de prendre l'air, de sortir de son quotidien, de s'ouvrir au monde. La narratrice de ce court mais savoureux roman ne tergiverse pas. Nourrie des écrits de bon nombre de glorieux prédécesseurs, de Stevenson à Bouvier, elle prend le train pour Clermont-Ferrand. Depuis le cœur de l'Auvergne, elle entend marcher jusqu'en Provence en essayant d'éviter les routes asphaltées et les grands centres urbains.
À peine les premiers kilomètres parcourus, elle trouve la confirmation de son intuition: «La marche nous augmente intérieurement d’un espace qui fait que nous devenons plus grands que nous-mêmes. Quelque chose en nous s’ouvre et s’étire, en même temps que notre conscience se déploie. On s’enrichit d’une présence au monde, d’un regard plus large et plus précis, d’une empathie envers les autres. Tout autour de nous se met à exister.»
Au détour du chemin, elle va faire la connaissance d'un voyageur qui partage son état d'esprit. Marvejols a choisi de faire la route avec Luce, une ânesse. Comme le faisait Robert Louis Stevenson. L'occasion de lui raconter les circonstances qui ont mené le futur auteur de L'Étrange Cas du docteur Jekyll et de M. Hyde et de L'île au trésor à parcourir les Cévennes. Ce qui va s'avérer un voyage initiatique a commencé par un besoin de fuir le carcan familial et de tenter d'oublier un chagrin d'amour. Avec son âne, qu'il maltraite tout au long de la route, il va cheminer dans une contrée inconnue pour lui et apprendre à observer et à noter, qualités qui lui seront très utiles quand il explorera la Californie et parcourra les mers du sud. Et si les voyageurs d'aujourd'hui se rendent très vite compte que la route prise par l'auteur écossais n'existe plus ou très partiellement et que RLS est d'abord un outil de marketing, ils ne peuvent s'empêcher de faire le parallèle avec leur voyage. À chaque fois qu'ils se retrouvent au détour du chemin Marvejols en redemande, avide de connaître toute l'histoire. Alors l'érudition de notre narratrice fait merveille, ajoutant bientôt un autre voyageur à son récit, John Muir. Car «tous deux furent contemporains et originaires de la côte est de l’Écosse. Ils ont reçu la même éducation presbytérienne: rigide, brutale, où l’instruction et la religion étaient centrales. (...) Ils auront, tous deux, la chance de découvrir des forêts et des grands espaces naturels non encore défoliés.»
Tout à la fois ode au voyage à pied et bréviaire de la lenteur, ce roman est aussi un guide pour observer la nature et la respecter. Au-delà de la performance, ces pas sur les chemins d'une autre France sont aussi un appel à s'émerveiller, à échanger Un rendez-vous avec le meilleur de ce sentiment à redécouvrir sans cesse, l'humanité.
https://urlz.fr/jFL0
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