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De nos jours, les parnassiens ont fort souvent mauvaise presse. C'est à peine si leur volonté de mettre un frein aux excès bien connus du romantisme, a été jugée favorablement. Au premier rang d'entre eux, Leconte de Lisle n'excite guère l'enthousiasme. On lui reproche sa froideur (toute relative), son goût des formules pompeuses (il ne s'y est livré que partiellement), son culte du beau et de l'art pour l'art (celui-ci quelquefois lui a inspiré pourtant de beaux vers).
Ils sont à vrai dire légion, ceux qui depuis des décennies ne l'ont lu que du bout des yeux, avec parcimonie, mais sans se priver au demeurant de déverser sur lui leur bile nauséabonde. Il est de bon ton aujourd'hui de jeter aux orties l'ensemble de son œuvre poétique. Or j'ai constaté moi-même que nombre de ses contempteurs n'en connaissent même pas le dixième. Quelle fâcheuse posture ? Quelle singulière mauvaise foi ?
Imaginez une seule seconde que "Les Fleurs du Mal" se résument au mieux à une douzaine de poèmes. D'ailleurs fin critique, Baudelaire pour sa part avait su vite discerner le talent de son aîné, comme en témoigne éloquemment l'écrit suivant : "Je veux parler des poèmes, où, sans préoccupation de la religion et des formes successives de la pensée humaine, le poète a décrit la beauté, telle qu’elle posait pour son œil original et individuel : les forces imposantes, écrasantes de la nature ; la majesté de l’animal dans sa course ou dans son repos ; la grâce de la femme dans les climats favorisés du soleil, enfin la divine sérénité du désert ou la redoutable magnificence de l’Océan. Là, Leconte de Lisle est un maître et un grand maître. Là, la poésie triomphante n’a plus d’autre but qu’elle-même. Les vrais amateurs savent que je veux parler de pièces telles que les Hurleurs, les Éléphants, le Sommeil du condor, etc., telles surtout que le Manchy, qui est un chef-d’œuvre hors ligne, une véritable évocation, où brillent, avec toutes leurs grâces mystérieuses, la beauté et la magie tropicales, dont aucune beauté méridionale, grecque, italienne ou espagnole, ne peut donner l’analogue".
Même si je ne partage pas entièrement les éloges baudelairiens - à l'exception du "Manchy" dont le charme a toujours agi sur moi - même si le mouvement parnassien dans ses grandes lignes ne m'a jamais vraiment convaincu - la profondeur et l'émotion n'ont-elles pas trop de fois déserté les vers de ses promoteurs ? - il me semble important en tout cas de rendre à Leconte de Lisle la place qui est la sienne : c'est-à-dire celle d'un vrai poète, doublé d'un versificateur habile, dans le style marmoréen duquel ont de temps à autre surgi des images fortes, séduisantes, voire inoubliables.
Il n'est pas impossible du reste que l'auteur des "Poèmes antiques", des "Poèmes barbares" et des "Poèmes tragiques" retrouve un jour son lustre.
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