Le choeur des jeunes filles thraces :
Ne pleure pas, petit poète. Ne pleure pas. Continue de chanter. Si les temps ne reviennent pas, ce n'est pas grave. Ça voudra seulement dire que tu es mort et nous aussi. Rien de bien difficile.
Attrape le vierge, peut-être le vivace et surtout le bel aujourd'hui. Celui-là avance vite. Avant que nous n'ayons fini de parler, il sera déjà au-dessus des eaux. Lui, ne va jamais s'arrêter. Arrête-le. Garde-le. Emprisonne-le. Il est difficile à rattraper. Tu as une âme aussi, allons. Alors, même s'il glisse comme un serpent, tu pourras le garder au moins quelques instants.
Mais il y en a d'autres, des ombres anciennes. Regarde-nous. Toutes, nous sommes elle seule et nous dansons. Nous bondissons et nous rions. Comme elle.
Il y a le vent, le feu, l'eau, le feu et la terre. Et le premier matin des univers à ne pas oublier. Regarde les maisons et leurs toits rouges de tuiles, les enfants qui courent et qui crient après les chats. Il y a un homme qui peint ses volets en bleu, une femme aux cheveux blonds qui sourit, c'est elle, il y a aussi un chien allongé dans l'ombre tiède du clocher. Regarde le soleil qui brise nos gestes et qui éteint un peu ta voix.
Que fais-tu, petit Orphée? Tu chantes mais tu n'es qu'un enfant.
Parle-lui, ô Maître. Il pourrait ne jamais rien comprendre. Il faut que, malgré la chaleur humiliante, il continue de chanter.
La coryphée, seule, se tait encore un peu. Les jeunes filles fredonnent.
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