"On n'est pas dans le futurisme, mais dans un drame bourgeois ou un thriller atmosphérique"
Rorbuer est une bande dessinée a` I'intention du lecteur désireux de se plonger dans une expérience visuelle et mystique au coeur d'un village perdu du Grand Nord. L'histoire prend place au sein d'un village côtier nordique ou` les mythes et légendes gèrent le quotidien des habitants.
Des croyances ou` la mort physique des hommes en mer n'est pas le dernier stade de leur être, mais bien un passage, laissant l'âme perdue s'accrocher au banc de poissons... Le récit part de cette première croyance pour évoluer vers des rites, cérémonies de guérison et d'hommage, à la frontière où se touchent les froides immensités terrestre et maritime.
BD très singulière.
Réalisée au feutre, j’ai aimé me perdre dans les couleurs froides et chaudes mises en contraste en discernant l’histoire dans laquelle l’auteure embarque le lecteur.
Les cases sans gouttières finissent par offrir des fresques au graphisme hypnotique en planches sur une ou deux pages qui sous les doigts a une texture proche du papier à dessin ce qui m’a vraiment projetée dans une œuvre où l’image, la couleur, la composition proche de la peinture sont prédominants.
Dans un premier temps, j’ai compris une scène de pêche au chalut sur une mer peu accueillante. Un pêcheur tombe à l’eau et ses collègues ne peuvent pas le sauver. La panique et le désarroi sont fort bien rendus dans un univers maritime en mouvement.
Le corps du marin noyé sera récupéré dans la nasse avec le poisson. Le village côtier est typiquement celui qu’on trouve en Norvège.
S’ensuivent divers cérémonies dont le sacrifice d’un chat qui bizarrement m’a plus émue que la mort de l’homme.
BD muette, j’étais épatée par le talent d’Aurélie Wilmet qui sait faire ressortir les expressions, les sentiments, l’action et l’environnement pour raconter toute une histoire mais c’est seulement en lisant en fin de livre un glossaire que j’ai compris qu’elle s’inspirait de la mythologie nordique, et ses différents rites concernant la croyance du voyage de l’âme humaine dans l’au-delà.
J’ai donc repris la BD à son début et ai mieux compris où elle voulait en venir :
Par étape, on découvre les significations de Torrfisk (coutume de pêche), Misteltein (plante parasite qui permet la transmigration des âmes), les Lysstraler (oracles des montagnes), le rituel du Fiskekongen qui représente la traversée finale des âmes vers Takeland, la terre de brouillard.
J’avoue que sans ce petit lexique, je serais passée à côté de l’histoire.
J’ai été admirative du travail au feutre. J’ai beaucoup aimé les couleurs. J’ai été surprise par l’originalité. J’ai apprécié découvrir et apprendre concernant cette coutume nordique.
Pour moi, c’est une belle réussite où le rendez-vous est principalement donné au travail graphique.
Merci à Lecteurs.com pour cette jolie découverte reçue en cadeau de Noël qui a mis de la couleur en ce début d’année 2023 assez glauque dans l’ensemble mais qui ne m’empêche pas pour autant de vous souhaiter à toutes et tous, une bonne santé et de continuer à partager nos découvertes artistiques et littéraires.
Une plongée dans les rites marins norvégiens
*
Je crois que je n'ai jamais eu une experience de lecture aussi étrange que celle-ci. Vous savez que les pays nordiques me fascinent toujours autant. Et je peux dire que j'ai été servie en matière d'exotisme, de découverte ethnologique.
De prime abord, cet objet-livre au demeurant très soigné en terme de mise en page, qualité du papier appelle à la perplexité. Les couleurs flashy pour ne pas dire fluorescentes surprennent énormément. Et utiliser du feutre (vous savez, ceux qu'on a connu en maternelle et primaire :) me paraît très osé, enfantin. Et pourtant cela fonctionne pas mal ici. Je dirais même, l'originalité de cette approche lui permettra de se singulariser parmi tous les autres dessinateurs lamba.
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Vous pensez terres du grand Nord, espaces sauvages, arctiques, froidures, contrées enneigées? Les couleurs bleue, grise, blanche vous viennent immédiatement à l'esprit, n'est-ce pas? Ici, pas du tout. C'est l'orange, le vert, le rose qui dominent. Encore une dissonance. Bien maligne.
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Une bande dessinée muette, qui se dispense de dialogues, de paroles et cris. Point besoin. La puissance d'évocation est bien présente.
Un temps d'adaptation est nécessaire pour plonger dans l'ambiance sourde et solennelle de ce peuple marin. Mais alors, quel délice ensuite de vivre avec ces marins torturés, sauvages et primitifs. J'avoue que j'ai relu deux fois cette histoire. Je n'ai pas tout compris dans la narration : il y a quelques subtilités propres à l'auteure. J'ai privilégié mon plaisir de lecture avec le graphisme quasi hypnotique. Cette beauté dans chaque trait, chaque esquisse, chaque case.
Je pense que tout le monde ne seras pas réceptif à cette mise en page. J'y ai adhéré complètement.
Brut, sauvage, glauque aussi (avec cette pendaison de chats qui m'a hérissé le poil :), cet album ethnologique est un bijou méconnu. Je souhaiterais vous le faire découvrir.
Un « rorbu » est un terme norvégien désignant une cabane de pêche sur pilotis à usage saisonnier. Au pluriel, on parle de « rorbuer ».
D’emblée, le cadre est posé grâce à ce titre, qui nous invite au sein d’un petit village nordique où la vie est régie par certains mythes et légendes nordiques. Seuls cinq grands titres qui servent de grandes parties viennent structurer ce récit en apparence décousu.
1.Tørrfisk.
(Poisson séché).
Le récit commence par une noyade : un pêcheur tombe à l’eau et son âme se rattache à un poisson. S’ensuit alors une succession d’événements qui font montre du voyage effectué par l’âme de ce pêcheur, qui attend à son tour la pêche annuelle qui surviendra au printemps prochain.
2. Misteltein.
(Gui).
Le gui est utilisé comme artefact magique pour permettre l’extraction de l’âme du dernier corps matériel. Avant que le poisson soit découpé puis séché, l’âme se détache à son tour du poisson afin d’entamer son voyage vers les montagnes sacrées.
3. Lysstråler.
(Rayons de lumière).
Un homme, seul, assiste à la mise en pratique de rites mystiques. Un feu est allumé, des animaux apparaissent ou sont instrumentalisés comme des actants majeurs du rituel qui se profile. L’oracle des montagnes prend vie durant cette cérémonie.
4. Fiskekongen.
(Rituel du Roi Pêcheur).
Un feu est allumé à une barque emplie d’algues, sur laquelle un homme coiffé d’une couronne est allongé. Il est l’incarnation du « Roi Pêcheur ». Cette cérémonie est ainsi représentative d’un passage d’un monde à un autre, et de l’entrée au sein de la Tåkeland, ou « Terre du Brouillard ».
5. Tåkeland.
(Terre de Brouillard).
Le titre de cette partie orne, symboliquement, la dernière page de cette étrange œuvre d’art, annonçant ainsi la fin de cette expédition mystique en évoquant le mystère d’une Terre à laquelle nous ne pouvons pas encore totalement accéder…
En définitive, "Rorbuer" apparaît donc comme un entre deux : entre jour et nuit, entre vie et mort, entre monde réel et au-delà.
L’absence de textes ou de dialogues laisse la part belle à l’imagination du lecteur, qui doit convoquer sa propre imagination afin de donner un sens aux événements qui lui sont présentés.
Pour palier le silence du récit, Aurélie Wilmet met à profit des techniques d’illustrations foisonnantes, notamment en se servant d’un feutre, ce qui donne lieu à des résultats piquants. Les couleurs presque fluorescentes entraînent le lecteur dans une atmosphère mystique, et renforcent le côté angoissant, voire violent de certains rites, face auxquels nous restons souvent perplexes.
Les dessins sont très resserrés, dénués d’espace, ce qui peut encore compliquer notre compréhension de l’œuvre, mais qui a le mérite d’illustrer symboliquement l’intrication entre toutes les formes de vies qui sont exposées dans cet ouvrage. Les rapports entre l’homme, les animaux et la nature se mêlent jusqu’à former un cycle où tout est indissociable.
À titre personnel, je n'ai pas accroché au graphisme, que j'ai trouvé trop agressif, et j'ai également eu beaucoup de mal à entrer dans l'histoire - si tant est qu'il y en ait réellement une - du fait du manque de repères narratifs et de l'absence totale d'émotions qui s'en dégage.
Peut-être convient-il de s'intéresser au propos avant de se plonger dans la lecture, car, même en appréhendant cette œuvre non pas comme une fiction mais comme un essai mystique, le manque d'informations est tel que l'on peine à réellement comprendre les tenants et les aboutissants des pratiques rituelles exposées.
"Rorbuer" est une œuvre hybride, qui propose à la fois une expérience visuelle intense et une plongée déroutante au cœur de la mystique nordique.
Savez-vous ce qu‘est un OLNI ? et bien c’est un objet littéraire non identifié et il me semble que « Rorbuer » en est un. Il prend place aux larges des côtes norvégiennes. Un pêcheur, victime de la houle, tombe à l’eau et disparaît. L’équipage de son navire, de retour à terre, doit annoncer la mauvaise nouvelle et s’occuper du produit de leur pêche…
L’album se développe en 4 grandes étapes et autant de chapitres. Ceux-ci sont différenciés par des titre en norvégien « Torrfisk », « Misteltein », « Lysstraler » et « Fiskekongen » qui ne sont explicités qu’à la fin de l’album, dans un petit glossaire qu’on trouve sur le rabat de couverture. L’autrice ne nous donne pas d’explications dans sa bd muette. Elle nous plonge dans ‘l’inconnu et dans l’entre-deux.
En effet l’on pourrait qualifier « Rorbuer d’album de « l’entre-deux » : comme sa couverture qui nous présente une aurore boréale, point de collusion entre la nuit et le jour, ou encore comme le titre qui désigne les habitations sur pilotis, abris de pêcheurs à la croisée des mondes terrien et aquatique. L’histoire flirte également sans arrêt avec la rencontre de deux mondes : le premier chapitre et son titre renvoient ainsi au séchage du poisson à l’air libre mais aussi à la cérémonie de libération des âmes. Entre deux également pour l’ouvrage qui se situe entre le documentaire et les folktales. Entre deux enfin des techniques : Aurélie Wilmet manie feutres et crayons de couleurs, procède par aplats et garde les traits visibles, presque bruts ; elle n’utilise aucune gouttière entre ses cases « fondant » ainsi le gaufrier et transformant sa planche en toile abstraite.
Mais à force de jouer avec cet entre-deux, ne prend-elle pas le risque de l’entre-soi ? Cet album a quelque chose, certes, mais reste pour moi hermétique. Dommage …
J'ai trouvé ce livre graphiquement très beau. C'est un concentré d'illustrations au feutre et au crayon absolument magnifiques aux couleurs très bien choisies. Cependant, pour ce qui est de l'histoire, je n'ai tout simplement pas compris. Même en ayant lu le livre deux fois, je n'ai toujours pas vraiment saisi ce qu'il s'y passe. Le dessin se perd dans une sorte de performance graphique où l'esthétique écrase la fonction narrative de l'image. Peut-être suis-je tout simplement passée à coté du propos mais je n'ai malheureusement pas pu apprécier pleinement cette lecture à cause de cette incompréhension.
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