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Au lendemain de la seconde guerre mondiale, l'Union soviétique et les États-Unis mènent une guerre d'influence qui mobilise de nombreux intellectuels.
En Union soviétique, les artistes sont enrôlés de force et défendent le « réalisme socialiste » dont le principe consiste à mettre l'art au service de la révolution.
L'Union soviétique martèle également un discours de paix tandis que les Américains sont pointés du doigt pour avoir usé de la bombe atomique à Hiroshima et Nagasaki.
Du côté des États-Unis, le danger d'une telle propagande est vite perçu. La CIA mesure l'urgence d'un plan d'action afin de démontrer l'originalité et la vitalité de la création américaine.
Au centre de ce dispositif, la peinture doit marquer un renouveau esthétique à même d'être comparé aux grands courants européens que sont le surréalisme et le cubisme.
La CIA décide alors d'investir massivement sur de jeunes peintres et plus particulièrement sur Jackson Pollock.
Tandis que le plan Marshall déverse ses milliards de dollars et que le blocus de Berlin se met en place, la CIA, sur fond de rivalité avec le FBI, s'organise pour gagner la « bataille des esprits ».
C'est cette histoire que raconte L'Opération Jackson Pollock.
Un moment méconnu de l'histoire de l'art moderne qui se lit comme un véritable roman d'espionnage.
Jackson Pollock, artiste maudit et adulé
Une page d'histoire de l'art qui se lit comme un thriller: Christian Carisey raconte comment Jackson Pollock s'est retrouvé, sans le savoir, au cœur d'une bataille entre CIA et FBI, entre chasse aux sorcières et soutien masqué. Étonnant et passionnant.
Dans les États-Unis de l'immédiate après-guerre, les autorités sont obnubilées par la présence de communistes et d'ennemis de l'État sur leur sol. Aussi J. Edgar Hoover, directeur du FBI, décide faire une traque sans relâche à tous ces ennemis, fussent-ils imaginaires. Il fiche plus d'un demi-million de personnes et fait rédiger quelque 60000 biographies, notamment de représentants du monde de la culture. Quand s'ouvre le roman, il est déstabilisé par la création de la CIA et la scission des activités de renseignement à l'intérieur et à l'extérieur du pays. Il décide alors faire feu de tout bois et veut mettre hors d'état de nuire tous ceux qui affichent des sympathies communistes. Dans une note rédigée à l'intention du Président Truman, il explique que « Même les Américains de naissance — je pense notamment à un dénommé Jackson Pollock — n'hésitent pas à défendre des idées communistes. Jackson Pollock a largement profité du système d'aide aux artistes mis en place durant la crise économique par le président Roosevelt, D'après nos renseignements, il a bénéficié d'une pension jusqu'en 1942 ce qui ne l'a pas empêché de tout faire pour être réformé quand le pays est entré en guerre. Cette attitude illustre bien l'état d'esprit de ces « artistes » (je mets volontairement des guillemets à ce mot quand je vois les tableaux qu'ils peignent) dont le sens civique est inexistant. Ils sont un terreau particulièrement favorable pour la propagation d'idées anti-américaines. Je vous ferai parvenir sur Jackson Pollock et ses amis les dossiers en cours de constitution. »
Ce qu'il ignore alors, c'est que du côté CIA, on réfléchit à une opération d’infiltration des médias pour convaincre les opinions publiques européennes de leur politique en assurant la promotion des créations américaines « afin de montrer la vitalité de nos artistes ». Franck Dune est chargé de faire « des propositions concernant des peintres contemporains ». Très vite, il va se tourner vers l’expressionnisme abstrait, un mouvement au sein duquel il décèle « de fortes personnalités dont les œuvres témoignent d’une grande capacité créatrice. » Sa première liste rassemble Willem de Kooning, Arshile Gorky, Jackson Pollock, Mark Rothko, Robert Motherwell et William Baziotes.
Bien loin de cette effervescence, Jackson Pollock essaie de survivre. Sa peinture a du mal à convaincre et l'alcool poursuit ses ravages. Lee Krasner, son épouse, va tenter d'obtenir l'aide de Peggy Guggenheim. La riche newyorkaise, qui a déjà apporté son soutien à l'artiste, va bien tenter d'assurer sa promotion, mais l'artiste irascible va ruiner sa tentative en provoquant un scandale.
Il se réfugie à Springs où Franck Dune va s'approcher de lui et réussir à se lier d'amitié avec le couple et ne pas ménager ses efforts pour le peintre dont il admire le travail.
En explorant cette page méconnue de la Guerre froide où la rivalité interne se mêle aux nids d'espions de Berlin, où la vitalité d'un courant artistique est l'enjeu d'un combat entre l'est et l'ouest, Christian Carisey a réussi un roman qui se lit comme un thriller.
Avec, au cœur de cette bataille, un artiste qui est totalement ignorant de ce qui se trame dans son dos, luttant plutôt contre ses propres démons, contre son addiction maladive à l'alcool qui finira par l'emporter, après sa séparation et la dépression qu'il ne parviendra jamais à vraiment surmonter.
Si l'auteur prend bien soin de ne jamais lier le travail de l'artiste et celui des services de renseignements, on ne peut s'empêcher de penser que la notoriété de Jackson Pollock doit, au moins en partie, à la Guerre froide. Si on dresse, à raison, le tableau noir du Maccarthysme, on n'oubliera pas non plus les programmes destinés à mettre en avant le talent des acteurs culturels. Il arrive que des fonds secrets servent à autre chose que des actions d'espionnage, d'exfiltration ou d'élimination.
Le prolifique Christian Carisey - après Pleine mer en 2023 et La folie Fischer en 2024 - poursuit ici son exploration d'une période aussi trouble que riche en événements propres à attirer les romanciers, cette guerre froide où le jeu d'échecs ou encore les beaux-arts deviennent instruments d'une féroce lutte de pouvoir.
NB. Tout d'abord, un grand merci pour m'avoir lu jusqu’ici ! Sur mon blog vous pourrez, outre cette chronique, découvrir les premières pages du livre et en vous y abonnant, vous serez informé de la parution de toutes mes chroniques.
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