L'établissement spécialisé, inséré, enclavé dans la vie urbaine ou excentré en campagne, est à la fois un lieu spécifique, à part, dont on ne pousse pas la porte spontanément, et une anthologie vivante de personnes dont l'existence renvoie à l'histoire « parallèle » de notre propre société, en dépit d'une demande de visibilité. Désormais, la plupart de ces établissements sont désignés par des acronymes et leurs bénéficiaires se voient nommées par des périphrases où chaque terme se doit de décrire au plus près les caractéristiques des personnes en évitant la péjoration. ITEP, IEM, IME, MECS, CHRS, RPA, EPHAD, MAS, ESAT, à titre d'exemple, recevant des « usagers » à qui ces institutions proposent un certain nombre d'accompagnements. L'intérêt porté à la question de l'habiter en établissement spécialisé concerne le mode d'appropriation laissé au bénéficiaire, l'usage intime et singulier de son lieu d'hébergement, et le rappel qu'en deçà des discours rationnels et historicisants sur le processus institutionnel, il est toujours question de ce que la vie sociale autorise, au jour le jour, en matière d'épanouissement personnel, à ceux qui, par nécessité, se trouvent dépendants de ses services. Au final, nous avons souhaité proposer un certain nombre de notions, réparties de façon distinctes dans les différents chapitres, comme autant d'outils d'interprétation pouvant servir à ceux qui travaillent dans ces établissements, qui y vivent ou qui s'y intéressent. En poussant la reconnaissance des dimensions constitutives de ces institutions, comme dans le cas du collectif, du commun et du communautaire, nous avons aussi voulu montrer que ces entités collectives sont mues et traversées, travaillées par des tendances paradoxales, contradictoires parfois et qu'elles peuvent constituer un élément de comparaison avec d'autres formes de socialité.
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