"On n'est pas dans le futurisme, mais dans un drame bourgeois ou un thriller atmosphérique"
Polar d'anticipation, écologiste et engagé, il se projette sur les pandémies et les ravages du dérèglement climatique en 2050. En février 2021, «Barré» sortira en format poche chez J'ai Lu conjointement à ce grand format.
Printemps 2050. Nathan Cardinal est un médecin expérimenté, à la pointe des techniques de soins en urgence. Sa mèche d'éternel adolescent cache un front balafré. Son entourage ne connaît pas vraiment l'origine de cette blessure, mais chacun a ses propres cicatrices : avant de retrouver le progrès dans une nouvelle harmonie avec la nature, la société a été bouleversée par une crise énergétique mondiale.
Personne n'en est sorti indemne.
Un meurtre au coeur de l'hôpital va pousser une jeune policière et un pilier de la Brigade d'enquêtes antérieures à fouiller le passé du médecin ; ils vont devoir percer son secret, tout en affrontant leurs propres démons. Dans cette affaire sensible et pleine de rebondissements, tous veulent répondre à la même question : peut-on soigner le passé pour guérir l'avenir ?
Ce polar vaut moins pour son suspense, encore que la fin soit très réussie et inattendue, que pour le monde qu'il décrit. D'ABORD NE PAS NUIRE de François Clapeau, est un roman non pas de science-fiction mais d'anticipation. Anticipation du monde d'après le "blast" comme le nomme l'auteur, blast qui a lieu en 2030. L'action se déroule essentiellement vingt ans après.
La qualité d’écriture est impeccable, ce qui ajoute à la qualité du récit. Seul petit bémol, Clapeau force peut-être un peu le déroulé lorsque qu'un père explique à son fils le monde d'avant. Le dialogue entre eux n'est pas très convainquant ni réaliste. On sent que l'auteur cherche d'abord à y faire passer son message d'où un manque de fluidité.
Superbe réussite malgré tout.
Limoges, an 2050, une infirmière est assassinée à l’hôpital, pendant un de ses gardes. Deux policiers enquêtent et leur attention est vite attirée par Nathan Cardinal, un urgentiste charismatique aux méthodes peu conventionnelles, mais dont la personnalité fuyante leur paraît étrange. En 2050, à Limoges comme dans le reste du monde, la vie quotidienne a bien changé. En 2030 tout s’est effondré avec le « blast », un cataclysme écologique. Depuis, la population mondiale vit en pleine décroissance : les ressources techniques sont rationnées, l’électricité est précieuse, les voyages longs et coûteux, l’autosuffisance a remplacé le commerce mondial, le métissage s’est imposé par la force des choses (les vagues migratoires n’ont pu être endiguées), la fécondité à grandement reculé, rien n’est plus pareil, rien n’est plus comme avant. Qui a tué cette infirmière sans histoire, et pourquoi ? Et si ce crime-là avait aussi un rapport avec le « blast » ?
Dans « D’abord, ne pas nuire » (citation tirée du serment d’Hippocrate), il y a deux éléments qui s’imbriquent : l’intrigue et le contexte. L’intrigue est certainement l’élément le plus faible des deux. Pendant un bon moment, pour tout dire, on se désintéresse plus ou moins du meurtre de cette infirmière. On se doute très vite de l’identité du coupable, son mobile nous échappe totalement, mais au fond, tout cela ne nous interpelle pas vraiment. Le dénouement, on le sent venir à quelques chapitres de la fin, et même avant si on est un peu malin et habitué aux romans noirs. Ce dénouement, d’une banalité totale et fort peu original, vient conclure un roman qui nous aura intéressés pour autre chose, vous l’avez compris. Cet autre chose, c’est la toile de fond. La France de 2050 ne ressemble pas du tout à celle de 2021. C’est un monde en pleine décroissance forcée dans lequel tous ces gens vivent : ressources limitées, reconversion forcée dans l’agriculture, accès limité à la médecine, voyages en train longs, coûteux et donc rares (l’avion on n’en parle même plus), fin du tourisme, des loisirs, de la culture et du sport de masse. Les bébés se font rares, les migrants sont partout puisque la vie au Sud est devenue impossible. Mais ils sont parfaitement intégrés et acceptés. L’alimentation, l’éducation, tout est devenu terriblement frugal. Et apparemment, en 20 ans, tout le monde s’est parfaitement habitué à ce mode de vie au point de ne plus vouloir revenir en arrière ! Alors, je veux bien que l’être humain s’adapte à tout, surtout quand il a le dos au mur mais quand même ! Quand on voit la difficulté aujourd’hui à faire passer dans l’opinion un minuscule changement de vie (mettre un masque, rouler moins vite…), on se dit que l’auteur est bien gentil mais bon… le pompon étant bien sur l’arrivée de migrants par centaines de milliers, et qui en 2050 semblent parfaitement acceptés et intégrés, en 20 ans seulement, sérieux ??? François Clapeau nous berce un peu d’illusions sur certains aspects, quand même… Sur l’acceptabilité du changement, j’ai des gros doutes. Sur la réalité du changement, en revanche, je ne sais pas si ce qu’il raconte est crédible. Mais ce que je sais, c’est qu’à part quelques écolos radicaux, quelques végans purs et durs et quelques collapsologues, ça m’étonnerait que cette vie quotidienne sobre, austère pour en pas dire quasi monacale emballe le lecteur lambda. En tous cas, moi elle m’angoisse et ne me fait pas du tout, mais alors pas du tout rêver ! Si découvrir, au fil des pages, une vie quotidienne de 2050 si étroite peut être une lecture intéressante (au même titre qu’un bon roman de science-fiction) voire même assez fascinante par moment, elle laisse un sentiment d’angoisse peu agréable au final. Si c’est le but recherché par François Clapeau, alors c’est réussi ! Le roman est très récent puisqu’il est question du confinement de 2020 et du COVID-19 (pourtant jamais nommé, comme s’il y en avait eu plusieurs après!), et je vous le dis tout de suite : en 2050, le masque est toujours obligatoire lors des (rares) rassemblements ! Quand je vous disais que c’est un futur déprimant, vous pouvez le croire !
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