"On n'est pas dans le futurisme, mais dans un drame bourgeois ou un thriller atmosphérique"
Quand Mikhaïl Boulgakov publie Coeur de chien en 1925, la Russie soviétique bénéficie d'une relative liberté créatrice avant la nuit noire du stalinisme qui s'annonce. En d'autres temps le sujet de son roman lui aurait valu quelques années de goulag. Que l'on en juge ! Un professeur greffe sur un chien ramassé dans les rues de Moscou l'hypophyse d'un individu qui vient de mourir. L'animal se métamorphose alors en un petit homme ivrogne, grossier et méchant : le donneur était un voyou alcoolique et sans scrupule. Et voilà le professeur harcelé et poursuivi par des comités étatiques et prolétariens en tout genre, guidés et fanatisés par le chien devenu homme. Et pire, homme de parti ! Comme toujours chez Boulgakov, l'irrationnel, la dérision et la folie rejoignent une réalité cauchemardesque. L'écrivain demeure le plus grand et le plus lucide des chroniqueurs satiriques de cette époque totalitaire et tragique.
Traduction nouvelle de Vladimir Volkoff.
Le professeur Transfigouratov n’est pas n’importe quel médecin. C’est une sommité, capable de conserver un appartement de sept pièces dans la Russie soviétique, ce qui relève de l’exploit.
Mais il faut dire qu’il s’est fait une spécialité dans le rajeunissement des gens. Et si les moyens employés sont peu orthodoxes, les résultats sont là, ce qui lui vaut un régime d’exception.
Un soir, il croise un chien des rues, Bouboul.
Il décide de l’adopter et de réaliser sur lui une expérience : lui greffer l’hypophyse d’un homme.
Voilà le postulat de cette histoire complètement loufoque.
Boulgakov signe ici un roman fantastique qui égratigne la réalité de son époque.
La science est utilisée pour satisfaire de bas intérêts. Les patients venus pour être rajeunis n’ayant souvent que des intérêts lubriques à satisfaire. Également, en donnant une voix au chien des rues, le roman montre le côté malsain de ces opérations réalisées sans souci des cobayes utilisés.
Boulgakov illustre aussi l’ironie de cette société de camarades où la corruption permet de ne pas s’astreindre aux contraintes du peuple.
Les hommes du Parti communiste étant, d’ailleurs, de viles personnages comme si le parti n’était qu’un repaire de gens obtus et stupides.
C’est un récit étrange qui m’a moins séduite que Le maître et Marguerite, mais que j’ai trouvé intéressant par l’ironie qui s’en dégage et les attaques menées contre le régime soviétique.
Un chien errant, S.D.F. ébouillanté par un cuistot de cantine pleure et se lamente, hésitant entre sa douleur et la faim qui le tenaille. En bon chien, il ne peut s’empêche de mater tous les humains qui passent et sa tendresse pour eux est proportionnelle à leur égoïsme. Arrive un homme, le Bienfaiteur qui l’emmène avec lui, lui donne à manger, l’autorise à coucher sur son tapis…. La Béatitude, le Bein-Être….. tout cela grâce à LUI, Philippe Philippovitch !!! un docteur, pardon, un Professeur es-rajeunissement en tout genre. En, quelques semaines, il prend 8 kilos, c’est dire si On s’occupe de lui.
Mais, l’Ennemi rôde en ces périodes révolutionnaires. Quoi, ce professeur habite un appartement de 7 pièces en ses périodes où l’on a droit à 1 pièce chacun !!!! Le Comité d’immeuble va changer tout ça !!!! Halte au Capitalisme !!!! Mais bon, notre Professeur a des amis hauts placés (ça sert à toute époque) et les membres du Comité s’en vont la queue basse, bien qu’ils ne soient pas des chiens, mais d’honnêtes prolétaires !
Revenons à Bouboul, puisque tel est le nom de l’ex SDF. Son 6ème sens se met en éveil lorsque Philippe Philippovitch Transfigouratov le conduit dans la salle de soins brillamment éclairée. Arrive le Docteur Ivan Arnoldovitch (alias le Mordu) qui lui pose un tampon d’éther sur le museau. Voici notre Bouboul au pays des rêves et des hallucinations.
Se déroule une opération incroyable, mais je ne vous en dirai pas plus. Au réveil, Bouboul se sent tout chose et, petit à petit, nous assistons à sa transformation en un humain des plus rustres, impolis, ivrogne et voleur…. S’en suit une cascade de quipropos ou des à propos de qui, qui m’ont bien fait rire.
Ce livre amène à plusieurs réflexions :
Qui est le plus humain, bouboul le chien ou bouboulov ? L’on trouve de l’humanité chez Bouboul alors que Bouboulov n’est qu’animalité.
Quant à la transformation du chien, Mikhaïl Boulgakov parle des expériences scientifiques dont le parti est si friand. Pourquoi personne ne semble abasourdi par cette mutation ? La scène des papiers d’identité de Bouboulov est un modèle d’absurdité.
Cette satire dépeint très bien les mœurs politiques des années 20 en URSS. Schwonder donnant un bouquin d’Engels à Bouboulov totalement inculte !!!! Les membres du comité d’immeuble, plein du discours bolchévique, sont bornés et absurdes. La bourgeoisie n’est pour autant pas épargnée. Un vrai festival ! Mais, tout est dit.
Est-ce le cauchemar d’un corniaud recueilli et en pleine digestion ou la réalité ? Mais, il y a ces cicatrices… Si vous voulez en savoir plus, suivez la queue du chien plutôt le cœur du chien. C’est un pur moment de lecture déjantée, mais pas que.
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