"On n'est pas dans le futurisme, mais dans un drame bourgeois ou un thriller atmosphérique"
Jusqu'où peut-on aller pour se forger un alibi ? A la fois roman noir captivant et histoire d'amour tragique, Alibi explore les ambiguïtés de l'après-guerre et dresse le fascinant portrait d'une Venise ténébreuse et secrète.
1946. Tout juste démobilisés, Adam Miller, jeune officier américain, rejoint sa mère, Grace, une riche veuve installée dans un superbe palazzo sur le Grand Canal. Lors d'une réception, il éprouve un coup de foudre pour Claudia ? juive italienne rescapée des camps. Très passionnée, la jeune femme diffère singulièrement des amis frivoles et désabusés que fréquente Grace, notamment le Dr Gianni Maglione, son nouveau prétendant.
Adam est persuadé que Gianni n'est qu'un coureur de dot. Mais quand Claudia accuse publiquement ce dernier d'avoir dénoncé son père aux nazis, les soupçons d'Adam prennent une tout autre tournure. Il se lance dans une vertigineuse enquête sur le passé du médecin. Et tandis que remontent à la surface les secrets les plus inavouables de la Sérénissime , Adam va devoir affronter le pire des choix...
Comment vous convaincre que Joseph Kanon est un bon écrivain méritant d’être lu ? J’ai dévoré, toujours avec le même plaisir, six de ses romans. J’ai posté sur trois d’entre eux, toujours de façon positive. L’Ami Allemand a été porté au cinéma avec George Clooney dans le rôle principal. What else ? En vain, seuls trois ou quatre originaux, dont je fais partie, lisent sa prose. Partant du principe qu’ « il n’est pas besoin d’espérer pour entreprendre ni de réussir pour persévérer »*, voici une nouvelle tentative.
Une histoire d’amour à Venise ? Déjà vu, déjà lu, vous avez raison.
1946, un jeune américain tout juste démobilisé après avoir passé les derniers mois de la guerre à enquêter sur les crimes nazis rejoint sa mère, riche veuve désoeuvrée à Venise. Il tombe amoureux d’une jeune juive dont le père aurait été dénoncé aux SS par…l’amant et futur mari de sa mère ! Théâtralement scabreux et glauque, vous avez raison.
Il reprend du service auprès de ses collègues encore actifs pour en avoir le cœur net. Sa mère ne veut rien entendre, on se dit qu’il va finir par trouver la preuve qui fera tomber le séduisant coureur de dot et qu’il pourra rentrer aux USA avec sa mère et sa fiancée pour jouir d’une paix bien méritée. Barbara Cartland se frotte déjà les mains, même moi, fidèle entre les fidèles, je me dis que je perds mon temps.
Et puis, sans crier gare, au tiers du roman, Joseph Kanon décide de noyer Barbara. Le sympathique chasseur de nazis se retrouve avec un crime sur la conscience et un alibi à se forger. Et dix pages plus tard, vous débarquez chez Colombo. Oui, Colombo, le gars à l’imper, à l’épouse qu’on ne voit jamais, et aux questions horripilantes qu’il pose toujours sur le pas de la porte après avoir laissé entendre au suspect qu’il allait enfin lui « foutre la paix. »
Quand je dis Colombo, je fais référence à ces enquêtes où le coupable mène l’enquête de concert avec l’inspecteur. Ici, c’est pareil, le coupable qui n’est qu’un témoin devient un auxiliaire du policier. Il se dit, ils se le disent tous dans la série télévisée, que c’est une aubaine pour surveiller et, si possible, orienter l’enquête dans une autre direction . c’est une bonne idée, sauf que lorsque la police arrête le coupable qui, si vous m’avez bien suivi, est innocent, c’est le drâme. L’intérêt de notre histoire réside dans le fait que le coupable est un « gentil » qui ne supporte pas qu’un innocent paye à sa place. Bien sûr, tout va terriblement se compliquer, plus personne ne sait vraiment qui a collaboré avec les nazis et qui est un courageux résistant. Les bons sentiments du départ et la belle histoire d’amour subissent les assauts de la culpabilité, du remord et de l’angoisse. La seconde partie du roman est absolument formidable avec une montée de l’adrénaline car, vous l’avez sans doute compris, le lecteur n’a absolument pas envie que le gentil héros soit démasqué par le flic collant qui ne se nomme pas Colombo mais Cavallini. L’épilogue, pour finir de brouiller les pistes ne sera tout à fait classiquement « colombesque » et vous interpellera sur les notions de culpabilité, d’honnêteté, de justice sélective ou de prescription, ce qui me semble largement dépasser les standards du roman noir. Si vous êtes suffisamment aventurier(e) pour mettre le nez dans ce roman, sachez que vous n’en décollerez pas avant la fin et que vous auriez intérêt, avant de débuter votre lecture, à avoir, à portée de main, un plan du centre ville de Venise. Cela vous sera autant utile qu’agréable. Dernier conseil, quand vous aurez fini « Alibi », précipitez-vous sur « Los Alamos ».
Bon, voilà, cher Joseph, j’ai fait de mon mieux, avec mes tout petits moyens, pour relancer votre lectorat français. Si vous pouviez m’adresser votre dernier roman « Defectors », dès qu’il sera traduit en français, je vous en serais très reconnaissant.
*Guillaume d'Orange dit le Taciturne (1533 - 1584), chef de la révolte des Pays-Bas espagnols contre le roi d'Espagne Philippe II.
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