"On n'est pas dans le futurisme, mais dans un drame bourgeois ou un thriller atmosphérique"
Roland Mornet nous livre dans cet ouvrage un des visages de la Première Guerre mondiale en l'abordant non pas de la terre, mais de la mer. Tout n'avait pas été dit et écrit sur la guerre en mer et en particulier aux abords de nos côtes. Roland Mornet, enrichi de ses multiples recherches archivistiques (faites au Service historique de la marine ainsi qu'au Service historique de la défense à Rochefort), s'emploie à réparer cette erreur en proposant un récit chronologique des faits allant du secteur de la Loire à la frontière espagnole. Il publie son livre en 2017, seulement un siècle après l'année 1917, qui fut la plus meurtrière de la période 14-18.
Marin et passionné d’Histoire, Roland Mornet s’est attaché à une période trop négligée de la Première guerre mondiale : la guerre en mer. Natif des Sables-d’Olonne, il a circonscrit ses recherches à la côte qu’il connaît le mieux : de l’estuaire de la Loire au Pays basque.
C’est un manque à combler et 1914 – 1918, La Guerre en mer le fait bien, de manière très exhaustive, avec quantité de détails techniques, des témoignages, des extraits de rapports officiels. L’auteur a effectué un travail considérable, poussé ses recherches, du Service de la Marine à Vincennes et au Service Historique de la Défense, à Rochefort. Il fait ainsi revivre ces années sombres, terribles, quand les hommes tombaient par milliers dans les tranchées et durant lesquelles tout un pays a souffert, privé de l’essentiel : la paix.
Roland Mornet rappelle que l’attentat de Sarajevo n’était qu’un prétexte au déclenchement des hostilités car notre voisin se préparait, sa flotte marchande allemande avait progressé de 82 %, totalisant le double du tonnage français.
Pendant que l’Allemagne compte 52 paquebots et 21 sous-marins, en France, c’est l’éternelle querelle entre anciens et modernes avec « des navires bâtards, inaptes à tout. » Lorsque la guerre est déclarée, l’auteur insiste sur les couacs de la mobilisation, certains pêcheurs n’étant pas sous les drapeaux pour pouvoir nourrir la population.
Les attaques des sous-marins se succèdent tout au long de ces quatre années. On aperçoit un périscope à l’ouest de Douvres, le 28 septembre 1914 et les premiers navires anglais sont coulés. Le charbon anglais étant indispensable, leur traversée ne se fait pas sans risques car les rôdeurs sont à l’affût.
Accostage, pillage du bateau arraisonné, coulé ensuite, l’ennemi laisse la plupart du temps les marins sur des chaloupes, les fameuses baleinières… Traitresses et sans pitié, les mines font beaucoup de dégâts. Ainsi, le Möwe a déposé 250 mines d’un coup entre La Rochelle et Bordeaux, en 1916.
Très justement, l’auteur fait prendre conscience que La Voie Sacrée ne partait pas de Bar-le-Duc pour ravitailler Verdun mais qu’elle venait de beaucoup plus loin, sur mer : « En temps de guerre, ce chemin de mer était devenu un chemin de mort… »
En 1917, année terrible, le Kaiser a décidé la guerre sous-marine totale, son pays comptant jusqu’à 130 sous-marins opérationnels ! Des flottilles entières sont coulées, des vapeurs aussi pendant qu’au Ministère de la Marine, on ne saisit pas totalement la gravité de la situation.
Roland Mornet n’oublie pas de rappeler le drame du paquebot Sequana, parti de Dakar pour Bordeaux le 28 mai 1917 avec, à bord, 400 tirailleurs africains dont la moitié périt alors que les baleinières auraient pu emporter129 personnes de plus…
Torpillages, espionnage, écoute sous-marine mais aussi indiscipline des pêcheurs, erreurs de navigation, incompétence, alcool, la guerre en mer a été une réalité pour notre pays qui a dû, ensuite, faire face à la pénurie de charbon, de moyens de transport, déminer, s’occuper des épaves…
Ce livre séduira, passionnera les amateurs de navigation alors que le terrien que je suis ne peut que rendre hommage au travail de son auteur et remercier Masse Critique de Babelio et les éditions La Geste pour cette découverte.
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