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Après la lecture du premier roman de Jean D’Albis, "Les quatre saisons du Fleuve amour", je m’étonnais de ne pas le voir davantage sur les tables des librairies. Ce petit roman par le nombre de pages, mais grand par sa qualité m’avait émerveillée. L’auteur récidive et d’aussi belle manière avec "La passe de Darial". Un régal de littérature.
S’il m’était demandé un seul mot pour qualifier cet ouvrage, je choisirais : élégance. Tout, dans ces cent vingt pages l’est. L’écriture est d’une grande délicatesse, faite de mots bien choisis, de phrases parfaitement agencées, de rythme lent et régulier. Tout est élégance dans la contemplation du monde qui entoure les personnages. Les paysages qu’ils découvrent sont dits avec simplicité, diversité, beauté : "Nous partons de nuit. Le ciel étoilé parsème au-dessus de nos têtes ses poussières d’éternité." Les lieux familiers qu’ils ont habités sont décrits avec nostalgie, précision, amour : "Dans la cuisine, une table de ferme, au bois meurtri par les tranchants du couteau et les bords des casseroles fumantes, mille fois lavé à l’eau savonneuse."
Mais au-delà ce cette grâce, le récit recèle des trésors d’érudition. C’est, sous le couvert d’une magnifique histoire d’amour entre le héros et la jeune Elka, fille d’un chef de guerre rebelle, l’histoire de la Russie qui revient dans les propos de l’auteur. Cette fois, il nous fait découvrir les Tcherkesses – ou Circassiens –un peuple du nord-ouest du Caucase. C’est par amour mais aussi horrifié par l’attitude des Russes à leur égard que le jeune officier prendra fait et cause pour ce peuple. Les faits se déroulent en 1864 et je me rends compte qu’aujourd’hui rien n’a changé.
J’ai beaucoup aimé le mélange entre amour et Histoire, et les différents sentiments qui tout au long du récit sont restitués avec justesse. J’ai ressenti comme miennes la joie parfois, mais plus souvent la lassitude, la vénération, la solitude aussi. Et j’ai suivi avec angoisse les multiples péripéties d’Alexis jusque dans la passe de Darial et son retour vers un triste destin. Heureusement la fin arrive, une fin lumineuse et digne d’un conte. Car si Jean d’Albis est à mes yeux un historien grand connaisseur et, j’ose le dire, amoureux de la Russie et de son peuple pour en parler ainsi, il est aussi un formidable conteur.
Un roman dont les faits se déroulent en 1864 mais la transposition en 2022 est tentante.
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