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Un mode d'existence, de Mark Kharitonov, est le journal de bord d'un esthète moscovite à travers les années d'isolement du brejnévisme, ce sont un peu les " chutes " de ses manuscrits majeurs, pensées en vrac qui s'assemblent mystérieusement comme celles du héros d'Une philosophie provinciale, échos des conversations, des lectures, des méditations d'un homme de culture enfermé dans le sous-sol de l'intelligentsia, rebelle à tout enrégimentement et qui se nourrit secrètement de l'hétérogénéité des langues, des êtres, des métaphores propres à chaque style, chaque climat, chaque époque, chaque vie d'homme.Pourquoi l'homme a-t-il un tel désir de se raconter en dépit des cloisons? Thème majeur du livre, le bonheur que donne l'art: ces atomes de félicité que procurent un paysage gris de ville, un matin enfumé, un fragment mutilé de vie trouvé à la décharge, le bonheur d'une communication chez un Musil, chez un Pasternak, poète omniprésent dans le brouhaha lyrique de cette réflexion libre. Tous ces thèmes se retrouvent dans le superbe " tombeau " littéraire que Kharitonov érige à la mémoire de son ami Sidour, poète, sculpteur, peintre, manufacturier d'art à partir des déchets de la vie.Né le 31 août 1937, Mark Kharitonov a glané où en étaient ce jour-là, cette année-là, les terribles purges, à quoi pouvait ressembler le foyer ouvrier où vivait sa mère à Moscou, ce que pensait le poète Kharms. Terrains vagues de Moscou, cheminées noires, talus de chemin de fer composent une aquarelle précieuse, à la Music: car le paysage est en nous, et surtout dans ce gamin maigre, boule à zéro, le petit Mark, qui grandit en pays stalinien. Il lit son siècle à l'aide de Mandelstam le poète, de Thomas Mann le magicien, qu'il a traduit en russe pendant toute la période où lui-même n'était pas publié, de Pasternak " l'homme heureux ", un de ses modèles. Son " mode d'existence ", c'est évidemment l'art, la transfusion de bonheur à quoi procède tout art, même l'art le plus tragique. L'art, concentré de vie, est une matière mystérieuse et première de la vie.
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