Alors que les membres du jury s’attèlent à leurs dernières lectures et peaufinent leurs arguments pour le 5 mai prochain, où ils devront désigner cinq romans finalistes, revenons sur les 30 titres sélectionnés pour le Prix Orange du Livre 2015.
21 août 1933, une jeune fille de 17 ans empoisonne ses parents, son père en décède. Ce fait divers sordide suscite, dès l'arrestation de la meurtrière, un déchaînement de passions. Les Surréalistes font d'elle une héroïne littéraire à la « beauté convulsive », on célèbre la garçonne aux cheveux courts, ayant rompu les liens familiaux.
Plus tard, elle sera graciée puis réhabilitée. La légende « Violette Nozière » est née.
Quatre-vingts ans après, Raphaëlle Riol se ressaisit de la légende, dans un roman inventif et impertinent. Elle invite le personnage à sa table d'écrivain et, à partir de ce fait divers, trafique sur le territoire de la fiction, invente hypothèses et interrogations.
Elle redessine ainsi le portrait de cette jeune fille troublante et trouble, et dresse un tableau de cette avant-guerre complexe. Une nouvelle fois, Violette Nozière est réhabilitée comme personnage littéraire, dans son énigme et la fascination qu'elle a suscitée.
Alors que les membres du jury s’attèlent à leurs dernières lectures et peaufinent leurs arguments pour le 5 mai prochain, où ils devront désigner cinq romans finalistes, revenons sur les 30 titres sélectionnés pour le Prix Orange du Livre 2015.
Pas facile d'écrire un commentaire de lecture sur "ultra Violette" de Raphaëlle Riol !
Prenez une auteure - Raphaëlle Riol, par exemple. Prenez une jeune fille de 17 ans accusée de parricide en 1933, adulée par les Surréalistes, abhorrée par la vox populi, condamnée à mort, graciée, réhabilitée - Violette Nozière puisque c'est elle dont il s'agit. Imaginez que la première projette d'écrire sur la seconde. Ecrire un roman. Mais Violette Nozière n'était-elle pas d'emblée un personnage de roman ? Que le Diable me patafiole si cette vie-là ne fut pas romanesque !
Sauf que Violette Nozière n'est pas un personnage de fiction. A tel point qu'elle s'invite insolemment dans l'élaboration du roman, dans le studio, dans la vie de l'auteur jusqu'à devenir présence obsédante et donner son avis sur les pages qui la concernent, et même s'insinuer dans les pensées de celle qui revisite son histoire.
Vous voyez le dilemme ? Vous appréhendez l'ampleur du problème (et donc du roman) ? Voilà une auteure réelle devenue personnage de son propre roman et confrontée à son héroïne réelle de fiction !
De cet inextricable écheveau littéraire, Raphaëlle Riol tire des fils, malicieux, ironiques et subtils, qui détricotent un mythe pour laisser entrevoir l'histoire vraie juste avant de tisser une nouvelle fable qui, au centre d'un motif chatoyant, fait se percuter la figure de l'écrivain aux prises avec son travail d'invention et celle de son énigmatique personnage. Face A.
Face B : c'est le visage de Violette Nozière qui émerge comme en une anamorphose révélée par cette lumière ultra violette que projette Raphaëlle Riol sur l'histoire et sur les faits. Une lumière noire pour l'Ange noir.
Dire que la construction de ce roman est d'une intelligence et d'une finesse diaboliques n'est guère suffisant. Il faut aussi parler de l'écriture qui surfe sur différents registres, se nimbe de poésie, se roule dans le concret, éclate d'impertinence et de malice tout en charriant des questions passionnantes.
"ultra Violette" est ma première lecture de Raphaëlle Riol. Je vous l'affirme : ce n'est pas la dernière !
Ultra Violette est un roman particulier, son titre reprend le nom du personnage principal : Violette Nozière. Elle est célèbre pour avoir été défendue par les surréalistes après avoir assassiné son père en août 1933. Au début, j’ai eu peur que ça ne soit que la description d’un fait divers et finalement ça n’est pas le cas.
L’auteur nous raconte aussi sa fascination pour le personnage, elle va jusqu’à lui créer une page facebook, l’impression qu’elle la hante, qu’elle domine sa vie. Violette est un personnage complexe, jeune fille obsédée par la vie, l’envie d’un ailleurs, d’aller voir la mer. Une vie plus facile loin du minable appartement de ses parents, ouvriers au cœur étriqué au 9 rue de Madagascar. Elle est une enfant gâtée qui ne se refuse rien et quand elle ne peut pas l’obtenir elle joue de ses charmes pour avoir l’argent nécessaire à ses folies. Son père personnage trouble, conducteur de train, un peu trop proche de sa fille, sa mère une femme au cœur étriquée.
On suit les folies de Violette, ses rencontres, ses mensonges au départ anodins pour sécher le lycée puis ses rêves de grandeur qui la plonge dans la prostitution. La face A du livre reconstitue sa vie, son arrestation. L’auteur aussi est présente qui nous parle de ses angoisses de la page blanche, de sa difficulté d’écrire, du fait qu’elle se laisse envahir par son histoire et l’impact sur sa vie. Le métier d’écrivain est décrit de manière originale et fait de Violette, un spectre, une muse capricieuse, un peu comme l’inspiration. Les descriptions sont précises, le rythme est rapide. J’ai apprécié de découvrir ce rapport auteur-personnage c’est ce qui a retenu le plus mon attention. Par contre, par moment la description des aventures de Violette m’a lassé.
La deuxième partie du livre face B raconte la vie en prison de Violette, et l’après qui vient la chercher le jour de la sortie. Elle énumère différents personnes qui ont gravité autour de Violette et cherche le responsable comme dans une enquête ce qui est original. J’ai aimé cette alternance de fiction, d’autofiction dans le récit. L’auteur utilise les connaissances sur la vie de Violette, les hypothèses en les présentant de manière originale. On est parfois agacé par cette petite fille qui cherche à devenir grande. L’auteur n’essaye pas d’en faire une héroïne, elle montre bien sa face sombre, l’absence apparent de mobile, son égoïsme mais aussi sa fragilité, l’ambigüité de son père. Elle s’amuse avec sa création, créature, fantôme. Le personnage de fiction prend peu à peu son autonomie jusqu’à rédiger elle même son histoire. Ce côté fou de l’écriture et de sa création, c’est ce que j’ai apprécié dans l’ouvrage. De même que le fait, qu’elle ne juge pas son personnage et se moque de sa réception.
Donc si vous voulez découvrir comment un personnage peut obséder un écrivain et la manière dont Raphaëlle Riol rend hommage à son personnage, ouvrez ce livre.
Violette Nozière, ivre de liberté, assassina son père en 1933. L'auteur convoque le fantôme de la jeune femme et reprend le fil d'un parcours étonnant, dans les années 30 à Saint-Germain-des Prés. Violette raconte son histoire et tente d'expliquer son geste, entre fascination morbide et désir de s'évader. Le roman balance entre rêve et réalité, un peu comme Violette le fit naguère dans l'appartement familial trop étroit, cadenassée par des parents trop conventionnels et à la recherche d'un paradis artificiel. Le texte est bien construit et l'initiative est finalement audacieuse.
Quel étrange livre qui tient à la fois du roman, de la biographie et du récit, dans lequel tout s’emmêle, le vrai et le faux, la vie et le rêve. Raphaëlle Riol a une façon bien particulière de nous raconter l’histoire connue de tous, mais finalement si peu dans ses détails, de Violette Nozière, parricide de 17 ans condamnée à mort en 1933.
L’auteure, ou la narratrice évoque le quotidien de Violette au 9 rue de Madagascar. C’est une fille unique choyée, mais si mal, par des parents un peu trop ordinaires pour cette adolescente qui rêve d’autre chose. Un père cheminot, une mère au foyer, une vie dans un appartement trop petit, elle souffre de cette promiscuité malsaine, surtout le soir quand elle doit s’endormir dans la pièce principale, après le dîner et l’invariable partie de belote, quand les parents s’aiment bruyamment dans leur lit, dans cette chambre contiguë à la porte jamais close.
Fuguant et fuyant le lycée et ses élèves un peu trop dociles, Violette rêve de bijoux, de fourrures, de belles toilettes. Elle fume, traine dans les bars, puis dans la chambre 7 du petit hôtel de la rue Victor cousin, dans cette chambre où enfin elle trouve le calme et la solitude, quand les amants de passage sont repartis, après avoir payé un bien léger écot. Difficile de vivre ainsi, il faut partir en douce le soir, tricher dans la journée, voler les billets de banque cachés un peu partout dans l’appartement pour se payer cette légèreté, cette part de rêve auquel elle aspire tant. Plus le temps passe, plus Violette étouffe dans cet appartement du 9 rue de Madagascar. L’issue fatale pour les parents devient une évidence. La voilà parricide, accusée, condamnée, puis muse improbable des surréalistes, prisonnière modèle, puis vient la libération et la vie autrement.
Raphaëlle Riol invite Violette dans son récit, la narratrice vit avec elle, s’entretient avec elle, pense pour elle. Viennent s’ajouter quelques scènes supposées vécues au moment de la sortie de prison de Violette, toutes en suppositions aussi hasardeuses les unes que les autres. Etrange roman où le réel et l’imaginaire interférent pour un dialogue entre l’auteure et son personnage, pour une relation étrange dans laquelle se perdra la narratrice. J’ai particulièrement aimé ce décalage de l’écriture, ce tutoiement de la narratrice envers Violette, qui est là, présente puis absente, jusqu’à la rédemption ou la perte. Une écriture très agréable, ciselée, réaliste et effrontée pour un livre bien singulier.
"Ultra Violette" est une biographie librement romancée, au projet original : partir à la recherche de Violette Nozière, jeune parricide de 17 ans dans les années 1933-1934, pour mieux saisir les diverses facettes du personnage qui a tant marqué l'imaginaire social, jusqu'à devenir une légende dans les années qui ont suivi.
Bovary du XXème siècle, Violette s'ennuie et étouffe dans une existence étriquée. Elle aspire à une vie vibrante et passionnée. Enfermée dans le petit univers de ses parents, trop mêlée à eux dans l'espace réduit qu'ils partagent, Violette veut du rêve et s'échappe la nuit à leur insu dans sa quête de frissons : belles toilettes, luxe, liaisons... Mais elle ne parvient pas jusqu'aux sphères tant espérées, une réalité lourde la ramène sans cesse au niveau du sol dur et froid. Elle croit le couple de ses parents cause de son enfermement, elle le ressent comme l'obstacle majeur... Et si sa rage meurtrière s'adressait au fond à la dure réalité jamais à la hauteur des rêves et des attentes ?
C'est un roman bien construit, en deux parties. Face A : ce qu'on connaît de Violette Nozière, en partant sur ses traces dans les lieux qu'elle a traversé. Face B : les hypothèses sur ce que fut sa vie, tombée dans l'anonymat, après sa sortie de prison.
Ce livre est un cheminement, qui a pour but de s'approcher au plus près de Violette Nozière, sans chercher à délivrer ni explication ni thèse définitive. L'auteur ressuscite le personnage, qui s'insinue dans sa vie, habite son esprit, dialogue avec son fantôme qui la hante et infléchit sa recherche, jusqu'à en être finalement dépossédée.
Il y a un ton très personnel. On accède aisément à la voie dans laquelle l'auteur nous emmène. L'écriture est libre, créative, avec un rythme, un souffle. Un portrait brossé par petites touches vivantes, un regard moderne, une fantaisie piquante.
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