"On n'est pas dans le futurisme, mais dans un drame bourgeois ou un thriller atmosphérique"
Pour Marisa et Paul Dumézil, le passé est irrémédiable, le présent difficile, quant au futur... Il se présente à eux le jour où l'homme qui avait été condamné pour le meurtre de leur mère Éva sort de prison.
Tandis que l'ancienne tragédie remonte à la surface, les enfants d'Éva se demandent ce qu'ils sont devenus. Et que vont-ils devenir à présent que l'assassin de leur mère a recouvré la liberté ? Paul semble prêt à passer à l'acte. Marisa préfère basculer dans une douce folie.
Dans cette histoire, il y a un frère et une soeur, de l'amour, des fantômes, un détective privé, la France, l'Indochine, l'Éthiopie, la chaleur et la pluie, le Nil, Djibouti, l'aventure. Et dans cette aventure, où le crime et la vengeance forment un couple éternel, il y a les enfants d'Éva et nous tous, qui voulons mener notre vie, malgré le « système » et ses défaillances.
Lien : http://www.livresselitteraire.com/2017/09/systeme-de-agnes-michaux.html
Découverte il y a un an avec son roman Journée exceptionnelle du déclin de Samuel Cramer, Agnès Michaux m’avait littéralement envoutée avec son univers, avec ces mots à fleur de cœur, cette mélancolie Baudelairienne qui s’insinue dans vos veines. D’un roman elle avait réussi à créer cette sensation que l’on a en lisant un poème. Un poème de 196 pages.
Ce roman m’avait fait un tel effet, qu’il était évident que je ne pouvais passer à côté de son nouveau titre Système. Système un seul mot, aux mille significations. Cette fois, l’histoire est totalement différente, mais le fond reste celui de l’amour, viscéral. Maternel. Filial.
Le roman s’ouvre sur une scène choc, empruntée à Camus. Une mère de famille, dans sa maison de vacances. Eva est seule. Eva est nue, au bord du bassin. Profitant du calme et de la sérénité. Une ombre s’approche d’elle, elle connaît cette silhouette. « Ah, c’est toi ! ». Silence. Action. Le coup de bêche lui est fatal.
Marisa et Paul sont orphelins de mère. Leur père quant à lui, on comprend qu’il ne s’est jamais remis de la mort de sa femme. Ils ont grandi, sans le pilier. Paul, lui n’a plus aucun souvenir de l’époque où Eva était encore vivante. Sa mort a effacé son enfance et son bonheur. Trente ans plus tard, l’assassin sort de prison, il a purgé sa peine. Comment vivre alors que le meurtrier est libre ? Entre vengeance et culpabilité, Marisa et Paul vont avoir à faire un choix. Si Paul semble prêt à passer à l’action, Marisa, elle, semble sombrer doucement dans la folie.
C’est alors qu’ils s’envolent vers l’Afrique, l’Ethiopie, le Djibouti, le Nil, profiter de la douceur des grands hôtels. Oublier le passé. Tenter de réapprendre à vivre avec leurs démons, leurs fantômes. C’est le voyage de la découverte, de la rencontre avec Rimbaud mais aussi avec le passé colonial de la France et la guerre civile qui fait rage. C’est une fresque du monde où le passé ressurgit, hante. Où tout ce que l’on pensait aboli reprend vie.
Il est toujours difficile de résumer l’univers d’Agnès Michaux, parce qu’il est un enchevêtrement d’actions, de temps, de sentiments si complexes que l’on ne sait jamais où se trouve le commencement et où se situe la fin.
Ce roman est la mise en exergue de ce système centrale qu’est celui de la vie mais qui tel un tentacule se multiplie en d’autres systèmes. Celui de la société, de la justice. Celui du système nerveux. Celui du corps, des liens ambigus, fusionnels qui peuvent parfois mettre mal à l’aise. Celui de l’Homme, du primitif et de l’Histoire. Le grand système de notre monde créé par l’Homme en somme. Mais c’est aussi celui de l’écrivain, de ce système mis en mots et qui se joue de nous, petit lecteur, jusqu’à la dernière page réelle du roman. Avec beauté et volupté.
Quant à la forme, l’auteure parsème son récit de quelques vers, quelques lettres qui renforcent ainsi le déroulé des pensées obscures ou lumineuses de ces deux personnages. On y retrouve Rimbaud et Alfred de Vigny pour le grand plaisir de nos âmes nostalgiques. Et lorsque l’on pense clôturer ce roman, il n’en est rien. Elle nous fait le plaisir de prolonger un peu le voyage, en y recensant poèmes, lettres intimes et faits historiques distillés de ça, de là. Pour délicatement sortir de ce roman éprouvant et magnétique.
C’est tout cela que j’aime dans l’écriture d’Agnès Michaux, il n’est pas uniquement question de fiction mais de profondeur, de mélancolie et d’universel. Il faut appréhender son univers car forcément avec elle, nous sortons de notre confort. Elle nous surprend, nous transporte, nous entraîne aux confins de nous-même, de la nature humaine, du bien du mal s’ils existent. Elle est surprenante, poétique, énigmatique, ambivalente et c’est tout simplement un régal.
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