Membre du jury du Prix Orange du Livre 2021, la romancière vous recommande 10 lectures essentielles
Automne 1977 : Harry, trente-quatre ans, meurt dans des circonstances tragiques, laissant derrière lui sa fille de quinze mois. Avril 2019 : celle-ci rencontre une femme qui a connu Harry enfant, pendant la guerre d'Algérie. Se déploie alors le roman de ce père amoureux des étoiles, issu d'une grande lignée de médecins. Exilés d'Algérie au moment de l'indépendance, ils rebâtissent un empire médical en France. Mais les prémices du désastre se nichent au coeur même de la gloire. Harry croise la route d'une femme à la beauté incendiaire. Leur passion fera voler en éclats les reliques d'un royaume où l'argent coule à flots. À l'autre bout de cette légende noire, la personne qui a écrit ce livre raconte avec férocité et drôlerie une enfance hantée par le deuil, et dévoile comment, à l'image de son père, elle faillit être engloutie à son tour.
Roman du crépuscule d'un monde, de l'épreuve de nos deuils et d'une maladie qui fut une damnation avant d'être une chance, Saturne est aussi une grande histoire d'amour : celle d'une enfant qui aurait dû mourir, mais qui est devenue écrivain parce que, une nuit, elle en avait fait la promesse au fantôme de son père.
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Tous les hebdos en parlent, mais quel est l'avis de nos Explorateurs sur le dernier roman de Sarah Chiche ?
Un récit d'une mélancolie envoutante, que l'autrice nous offre à travers des flash-back de son enfance.
Une enfance qui démarre avec le décès de son père alors qu'elle n'est qu'un bébé. C'est donc avec le fantôme de ce père que l'enfant va devoir se construire, dans une famille de grands médecin, partagée entre l'Algérie et la France.
Mais voila, contrairement au reste de sa famille, Harry, le père de Sarah, l'autrice, est un rêveur et a épousé une femme trop libre pour le milieu bourgeois dont est issu son mari.
Plus qu'une histoire familiale, c'est le sujet du deuil qui est ici exploré. Comment faire le deuil d'un père que l'on n'a pas connu et dont on n'a aucun souvenir ?
Un petit roman mais qui vaut le détour !
En avril 2019, sa rencontre avec une femme qui a connu Harry pendant la guerre d’Algérie va résonner pour la narratrice comme un nouveau départ dans sa vie. Bien sûr , elle connaît le prénom de son père, Harry, elle sait qu’il est mort a 34 ans, elle avait 15 mois. Elle sait également que les relations de sa mère avec sa belle-famille ont toujours été compliquées. Mais il lui manque tant de clés pour élucider les zones d’ombre qui lui permettraient de vivre plus sereinement avec les fantômes de son père qui a en outre enfreint le conformisme social d’une famille de médecins déracinée de l’Algérie, sa terre natale.
L’Histoire plante le décor de ce drame, brillamment mis en scène par Sarah Chiche, orchestré par l’amour et la haine, sur le ton d’une profonde mélancolie. Du plus profond du gouffre, comment renaître à « la beauté féroce de la vie »?
Un roman fort, émouvant, porté par une écriture lumineuse.
Sarah Chiche, rencontrée et appréciée aux Correspondances de Manosque 2020, m’avait bien intrigué avec la présentation de son dernier roman : Saturne.
Cette écrivaine est aussi psychologue clinicienne et psychanalyste. Cela se ressent tout au long de cette autofiction qui m’a parfois passionné mais aussi, par moments, lassé, pour finalement me laisser une impression générale très positive.
La narratrice dont l’identité n’est jamais révélée, débute par un prologue qui marque le lecteur : la mort de son père, à 34 ans, d’un cancer foudroyant alors que sa fille n’a que quinze mois. Ensuite, personne ne lui dit à cette fille que son père est mort et cette terrible absence mettra des années à être assumée, la plongeant au plus bas d’une détresse que tous les antidépresseurs, les neuroleptiques et autres thymorégulateurs ne parviennent pas à guérir.
Toute la première partie de ce roman permet de faire connaissance avec la famille d’Harry, le père de la narratrice, qui a eu une enfance heureuse, en Algérie. L’autrice en profite pour recadrer l’historique de la colonisation et le rôle essentiel joué par les médecins, à la fin du XIXe siècle pour éradiquer les épidémies, comme le paludisme qui décimait la population.
Joseph, son grand-père, a épousé Louise, femme très riche. Médecin, il achète une clinique à Alger et bâtit sa fortune là-bas. Lorsque la violence s’abat sur les Européens désirant rester, la famille quitte l’Algérie et Joseph, aidé par des banquiers, recommence, crée une clinique qui devient prospère en cinq ans, le gouvernement favorisant le privé au détriment de l’hôpital public.
Entre temps, Armand et Harry, les enfants de Joseph et Louise, ont été envoyés en pension à Verneuil-sur-Avre. Leurs parents rêvent d’en faire des médecins pour consolider et poursuivre l’empire paternel. Si Armand réussit, Harry stagne, vit la nuit, joue au casino et rencontre cette femme aussi merveilleuse qu’intrigante : Ève, qui donnera le jour à la narratrice.
La rencontre entre Harry et Ève est un véritable coup de foudre mais rien n’est simple dans cette famille qui vit maintenant dans un château entre Louviers et Évreux. Les crises sont fréquentes, allant jusqu’à l’exclusion de Ève. À partir de là, Harry est au plus mal mais cela ne l’empêche pas d’épouser cette femme, enceinte, en décembre 1975. Harry est donc mort quelques mois après. Trois ans passent et son père décède de chagrin ; nous voilà donc, vingt-cinq ans plus tard dans une chambre d’hôtel…
Débute alors la seconde partie, en mai 2002, quand l’oncle Armand apprend à sa nièce la mort de Louise, la grand-mère, dont l’héritage est à partager. C’est le moment d’une grande introspection, de délires psychologiques subis par cette jeune femme après tant de non-dits, de coups bas familiaux, de silences. Louise, cette grand-mère qu’elle n’a plus revu depuis longtemps, elle ne lui a pas dit adieu et ce n’est qu’un des nombreux traumatismes qu’elle doit évacuer. Louise a été tuée deux fois, comme lui dit froidement son oncle : « C’est ta mère et toi qui l’avez tuée. Ta mère par haine, et toi par désespoir. »
Alors, la petite-fille sombre, honteuse, seule, et livre des pages que j’ai trouvées difficiles, pénibles mais finalement très réalistes, justifiant ce titre : Saturne.
Plutôt que le Saturne de la mythologie qui dévorait ses fils, de peur qu’ils prennent sa place, Saturne est, pour Sarah Chiche, « l’autre nom du lieu de l’écriture – le seul lieu où je puisse habiter. »
Cette planète froide, assimilée à l’automne et à la mélancolie, a bien failli engloutir cette fille privée si tôt de son père et traumatisée par les problèmes familiaux. Par la magie d’images de films super 8, elle a pu sortir de ce néant où elle était engloutie et réaliser son rêve : écrire.
Ce roman en est la preuve la plus tangible.
Chronique illustrée à retrouver sur : https://notre-jardin-des-livres.over-blog.com/
Ce que j’ai trouvé saisissant dans ce roman, c’est cette approche d’un père que la narratrice n’a pas connu car il est mort d’une leucémie alors qu’elle n’était encore qu’un bébé. Sarah Chiche a su tisser une histoire très intime en puisant dans son vécu et dans les souvenirs.
La première partie est consacrée au père disparu qu’elle fait revivre sous sa plume en rassemblant les fragments épars. Elle remonte à la famille bourgeoise et aisée de ses grands-parents qui a dû quitter l’Algérie en laissant ses biens et tout recommencer en métropole. Cette saga familiale serait de peu d’intérêt s’il n’y avait la rivalité entre les deux frères : il y a Armand l’aîné, garçon brillant destiné à être médecin comme le père et à lui succéder à la tête de la clinique médicale. Il y a aussi Harry, l’incompris, le rebelle qui ne veut pas de cette vie de médecin qu’on envisage pour lui. Il tombe amoureux fou d’Eve, si belle et à la fois mystérieuse et sulfureuse. L’autrice naitra de cette passion folle. Élevée par cette mère fantasque et distante au passé trouble, elle sera écartelée entre Eve et la famille de ce père trop tôt disparu.
C’est à la mort de sa grand-mère qu’elle ne voyait plus que Sarah Chiche va tomber dans une dépression profonde. Et c’est la seconde partie du roman, à la fois introspection et creusement psychanalytique.
Jamais pathétique ou ennuyeuse, l’autrice se confie avec lucidité et simplicité, le tout dans une langue élégante et hardie aux accents poétiques. Elle veut juste faire le chemin à l’envers et essayer de comprendre ce qui l’a menée là, dans cette mélancolie profonde, jusqu’à frôler la mort. Le lecteur entre dans la confidence avec empathie car la douleur est murmurée.
Après un retour dans le passé et le drame ordinaire d’une famille éclatée, le roman va crescendo jusqu’au visionnage de vieux films de famille où, enfin, Sarah peut voir à quel point son père l’aimait.
C’est un roman émouvant porté par une écriture superbe.
Un roman autobiographique.
L'histoire d'une grande famille de médecins et de leurs "squelettes " cachés dans le placard.
La petite fille de la famille, issue du couple maudit par la famille à cause de la mère, Eve,et sa descente aux enfers avant de "ressusciter" et de devenir qui elle est vraiment: Sarah Chiche.
Un livre plein d'enseignement et plein d'espoir.
Issu d’une riche famille de médecins exilée en France après l’indépendance de l’Algérie, Harry meurt d’une leucémie à trente-quatre ans, laissant une petite fille de quinze mois et une épouse dont il était amoureux fou, mais que tout le clan familial déteste. Quelque trente ans plus tard, après une dépression extrême qui a failli lui coûter la vie, l’enfant devenue adulte entreprend l’écriture de ce roman, évoquant sa vie hantée par la perte et le deuil, mais aussi par l’ombre d’une passion qui a définitivement fait voler sa famille en éclats.
La traversée de ce roman largement autobiographique prend longtemps l’allure d’une plongée dans le puits sans fond de la dépression et de fa folie, alors que, pour la narratrice, seuls les mots haineux et la rancoeur des autres membres de la famille viennent rompre le silence et le non-dit qui enveloppent l’absence d’un père devenu tabou et légende noire. Comment se construire et vivre sur le gouffre d’une disparition qui a à jamais scellé amour et haine dans un écheveau aussi inextricable qu’inexplicable pour une enfant déchirée par les conflits entre les siens ?
Il lui faudra pour cela réussir à trouver sa place auprès de ce père mystérieux et objet de tous les antagonismes familiaux, par le biais de quelques images filmées au temps de ses tout premiers jours. Avant cela, au travers de minces mais puissantes évocations surgies du passé, entre les blancs et les ellipses, il nous faudra aussi comprendre l’histoire de cet homme, son amour pour son aîné et la haine renvoyée par ce dernier, leur rivalité autour d’une passion folle et transgressive pour une femme jugée infréquentable par les leurs, les déchirures cachées derrière l’aisance bourgeoise d’une famille faussement reconstruite sur l’inguérissable fêlure de l’exil et l’exécration rencontrée sur le sol de la métropole.
En reconstruisant l’histoire de ce père qu’elle n’a jamais connu, Sarah Chiche crée sa propre fiction en réponse à toutes celles forgées par sa famille autour du disparu : seul moyen pour elle, le temps de l’écriture, de remplir une béance intérieure que la vie réelle ne comblera jamais. Un texte fort, sidérant et terrible, autour d’un deuil impossible, à l’origine d’un véritable collapsus psychologique. Coup de coeur.
Une incroyable lettre d'amour d'une petite fille à son père, mort sans qu'elle le connaisse, et à toute sa famille sur 3 générations.
Les premières pages sont chargées de cette poésie douloureuse qui prend aux tripes.
Dans une chambre d'hôpital un homme qui semblait avoir tout pour lui se meurt d'une maladie incurable.
Il y a encore quelques mois il était le plus heureux des hommes : une jeune et belle épouse, un beau bébé.
Cet homme c'est le père de la narratrice qui à l'époque n'avait que quelques mois.
Tout ce qu'elle sait de cet homme, de sa mère avant le drame, de ses grands-parents, de son oncle, elle le tien de sa grand-mère.
C'est une histoire très égocentré, parfois un peu lourde, sur les pérégrinations d'une famille qui avait tout en Algérie et qui malgré l'exil reconstruit un empire connu et envié de tous.
Paradoxalement, la narration de cette histoire de famille m'a semblé empreinté.
Je n'y ai pas trouvé la chaleur que j'espérais.
Cette lecture m'a laissé une sensation étrange de contrefait.
J'étais assez enthousiaste au début mais le rythme n'y était pas.
Les mots n'y étaient pas.
Du coup, je n'y étais plus non plus…
"Saturne" n’est pas le premier roman de Sarah Chiche, loin s’en faut. Il est même le dernier… pour l’instant. C’est pourtant – honte à moi – le premier que je lis de cette auteure. Je connaissais les titres précédents, mais reportais toujours ma découverte au lendemain. Merci à Lecteurs.com pour cette rencontre avec une écriture flamboyante.
C’est, en effet, dans le cadre des Explorateurs de la rentrée littéraire 2020 et sa suite, "les livres voyageurs", que j’ai pu lire cet ouvrage prêté par un ami lecteur. Certes l’histoire m’a touchée : l’histoire d’un deuil enfantin. Une petite fille de quinze mois perd son père encore jeune… elle ne s’en remettra pas ou plutôt, il lui faudra des années… Adulte, elle raconte – c’est la narratrice – l’histoire de sa famille paternelle, l’Algérie, la fortune perdue, reconstruite en France, son père, qui ne suit pas le chemin pourtant tracé, sa rencontre avec sa mère, beauté incendiaire mais totalement différente… La construction est intéressante qui use de retours en arrière fréquents, passe des uns aux autres sans chronologie particulière, donne des détails sur la vie, les us et coutumes. Elle narre avec précision les séquelles sur l’existence de chacun des histoires de famille, des non-dits, des rivalités.
Mais, si, comme je l’ai dit plus haut, ce récit m’a touchée, je l’ai été plus encore par l’écriture. Elle est flamboyante, lumineuse, profonde, d’une grande maîtrise et m’a complètement envahie. Sarah Chiche a ce talent – sans doute aussi de par ses compétences de psychologue clinicienne – de nous parler de la pathologie mentale, de la décrire dans ses moindres détails, avec tant d’émotion. Je ne lisais pas, je ressentais au fond de moi la détresse de cette jeune femme, malade de ne pas savoir qu’elle avait aimé son père, qu’elle en avait été aimée. Car en plus de tout le reste, ce livre est un cri d’amour d’une petite fille à ce père qu’elle n’a pas connu et qu’elle rencontrera à travers des petits films super huit, une re-naissance en somme.
Tomber amoureuse d’une écriture, ce n’est sans doute pas banal. Quand l’auteure parle de deuil, ça l’est sans doute encore moins et pourtant…"Un deuil reste un deuil. Un cadavre, un cadavre, une tombe, une tombe. Mais si certaines personnes apprennent à vivre douloureusement avec la perte, d’autres se laissent mourir avec leurs morts.", c’est bien pour de telles phrases que je l’ai tant aimé… et pour le reste aussi "J’entre dans l’automne de Saturne. Et sur la route où je pars seule, mais avec mon père…tout est perdu, tout va survivre, tout est perdu, tout est sauvé. Tout est perdu, tout est splendide."
"Saturne", un roman que je garderai longtemps au plus profond. Beaucoup plus qu’un simple coup de foudre.
https://memo-emoi.fr
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