"On n'est pas dans le futurisme, mais dans un drame bourgeois ou un thriller atmosphérique"
Fuyuko a une trentaine d'années, elle est correctrice free-lance pour le département littéraire d'une maison d'édition. Elle vit seule, n'a pratiquement aucune expérience amoureuse. Elle est timide, maladivement introvertie, et ne s'imagine engagée dans aucune relation affective. Fuyuko ne lit pas, dans la vie pas plus que dans son travail d'ailleurs, puisqu'elle ne "lit" pas lorsqu'elle corrige : elle décortique les mots, cherche la faute cachée, l'erreur embusquée. Elle n'écrit pas, ne sait pas ce qu'elle aime écouter. Elle ne s'habille que pour se vêtir.
Mais Fuyuko aime la lumière. Elle ne sort qu'au soir de ses anniversaires, en hiver, seule à la mi-nuit pour voir et pour compter les lumières dans ce froid qu'on peut presque entendre si l'on tend l'oreille, dans cet air sec et aride mais quelque part fertile.
Hermétique à tous plans de carrière - ce qui est au Japon propice à l'exclusion -, Fuyuko touche néanmoins Hijiri, une femme brillante, responsable de production, et unique interlocutrice professionnelle de la correctrice solitaire. Diamétralement opposées, comme l'ombre et la lumière, comme le noir et le blanc, ces deux-là se complètent probablement et traversent la vie en partageant de temps en temps quelques instants de convivialité. Impressionnée par l'aisance et la volubilité d'Hijiri, Fuyuko tente alors de trouver dans l'alcool, cet anti-venin, la force et le courage de rompre son accoutumance au retrait. Ainsi, dans un état second, va-t-elle faire la connaissance de Monsieur Mitsutsuka. Comme elle, cet homme aime la lumière mais il est professeur de physique et son savoir offre peu à peu à Fuyuko les clefs du monde sensible : Le bleu a une longueur d'onde très courte, elle se diffuse facilement, c'est pourquoi le ciel apparaît si vaste.
Trentenaire mal dans sa peau, solitaire et introvertie, Fuyuko est correctrice dans une petite maison d’édition. Quand elle décide de travailler en free-lance, elle s’isole encore plus de ses contemporains, mais en même temps, elle se rapproche d’Hijiri, son interlocutrice privilégiée. Au contact de cette fille de son âge, extravertie et délurée, Fuyuko sort un peu de sa coquille et décide même de se rendre dans un centre culturel qui propose des cours divers et variés. Mais les choses ne se passent pas comme prévu. Pourtant ce n’est pas un complet désastre puisqu’elle y fait la connaissance de Monsieur Mitsutsuka. Un lien s’établit entre le mystérieux professeur de physique et la timide correctrice. Fuyuko qui s’était jusqu’ici interdit d’aimer s’éveille au sentiment amoureux…
Triste et beau roman où l’on croise Fuyuko qui a subi un traumatisme à l’adolescence. Depuis, elle vit sans faire de bruit, sans oser se rapprocher de ses semblables. Le travail pour s’occuper, l’alcool pour s’évader. Et, une sortie nocturne, en décembre, le jour de son anniversaire, pour s’éblouir des lumières de la ville.
Cette moderne solitude, très bien décrite par Mieko Kawakami, interroge sur la place de la femme au Japon, dans son travail, dans son couple, dans ses relations aux autres, dans ses blessures les plus intimes. Sa Fuyuko, émouvante et fragile, qui tait ses maux, panse ses plaies tant bien que mal, est une héroïne dont on se souvient longtemps. De celles qui laissent des traces parce qu’on connait leur combat quotidien pour vivre, leur peur de se laisser aller aux sentiments, la timidité qui les encombre.
Un roman délicat et touchant, plein de lenteur et de poésie.
De nos jours au Japon, à Tokyo, Fuyuko est une jeune trentenaire qui travaille en tant que correctrice free-lance pour une maison d'édition. Elle vit seule et son travail à domicile aidant, elle s'enferme peu à peu dans la solitude. Pas de cette solitude qui lorsqu'elle est voulue peut être salutaire et permettre de se reconnecter avec soi-même mais de cette solitude qui vous isole, vous enferme et vous empêche d'aller à l'encontre du monde. Introvertie, mal dans sa peau, elle se refuse le droit d'aimer et d'être aimée pour des raisons que nous découvrirons au fil de ce roman.
Fuyuko, pauvre petit oiseau de nuit qui ne daigne quitter son nid qu'au crépuscule quand vient la saison de l'hiver, les soirs de son anniversaire. Il y a tant de mots couchés sur le papier des épreuves qu'elle corrige inlassablement chaque jour qui passe et pourtant tous ces mots restent coincés à l'intérieur de son coeur sans pouvoir sortir, jamais.
Comme elle est jolie Fuyuko, mais elle ne le voit pas, elle n'en est pas capable car elle s'efface, tout doucement, lentement, sans que personne n'y prête attention, silhouette floue et évanescente dans les lumières de la nuit, dans les vapeurs de l'alcool de riz, divin élixir, dont elle s'abreuve quotidiennement
pour se donner le courage d'affronter les regards que le monde porte sur elle.
Elle cherche les lumières de la nuit, faisceaux lumineux, contrastes colorés, enveloppants et rassurants qui lui font apparaître la vie plus merveilleuse et la libèrent de ses états d'âme, l'espace d'un moment seulement...
Mais certaines rencontres (comme je le dis toujours) ne sont pas le fruit du hasard. En croisant la route de l'énigmatique monsieur Mitsutsuka et en acceptant l'amitié de la délurée Hijiri, la chrysalide va peu à peu se muer en un joli papillon et découvrir le désir, celui qui vous met dans un état d'embrasement au moindre frôlement, au moindre regard, celui qui met tous vos sens en éveil et vous oblige à vous projeter hors de vous-même.
Rarement un personnage de roman ne m'a autant touchée. Fuyuko c'est toutes les femmes, c'est un peu vous qui me lisez, c'est un peu moi. C'est le regard des autres qui parfois peut être si cruel quand on est différent et que l'on ne rentre pas dans la norme.
Au travers de thèmes évoqués ici avec discrétion tels que : l'émancipation de la femme au Japon, l'exclusion dans le milieu professionnel, l'extrême solitude, l'estime de soi après avoir subi un traumatisme, Mieko Kawakami nous offre un roman d'une grande densité émotionnelle, à la dimension poétique et musicale très présente. Un roman métaphorique, au tempo lent dont j'ai perçu chacune des voix des personnages principaux comme des murmures et dans lequel la lumière fait le lien entre les différentes émotions ressenties par la narratrice. Moments de grâce, fragiles, suspendus avant qu'ils ne disparaissent, nous sont magnifiquement restitués tout au long de ce récit.
Le roman retrace le parcours de Fukuyo, figure étrange, solitaire et d'apparence froide, qui ne conçoit ni passion ni sentiment violent, mais est en revanche fascinée par la lumière. Elle fait la rencontre de deux personnages, qui, chacun à sa manière, va s'immiscer dans sa vie.
J'ai aimé que le roman se penche sur une protagoniste singulière, qui ne rappelle pas les personnalités enjouées et légères de femmes comme on en trouve somme toute beaucoup dans la littérature contemporaine. Le récit prend au contraire le parti de nous parler d'une femme atypique, à laquelle il n'est pas forcément aisé de s'identifier, le genre de femme qui n'est habituellement pas visible, et c'est là justement tout son intérêt.
Ma chronique complète est ici: http://viederomanthe.blogspot.fr/2016/03/de-toutes-les-nuits-les-amants-mieko.html
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