"On n'est pas dans le futurisme, mais dans un drame bourgeois ou un thriller atmosphérique"
Walter, viré de chez lui par sa femme, va habiter à la Butte aux Cailles chez un de ses vieux potes. César vit d'expédients, arnaque l'Assurance Maladie, les allocations chômage, est rémunéré par les uns et les autres pour des combines à la petite semaine. Walter, qui a été mis à la retraite d'office de son poste de prof parce qu'il picolait, déambule dans le XIIIe arrondissement, mal dans sa peau, d'autant plus qu'il s'aperçoit que ses amis tombent comme des mouches. Un jour, il y a un massacre dans un salon de massage du quartier tenu par des Chinois où, bizarrement, César a ses entrées. Qu'est-ce que trafique ce mec ?
Les éditions de la Différence ont lancé récemment une collection noire, qui débute avec ce roman et Les roses noires de la Seine-et-Marne. Entrée en matière réussie et originale, car ces deux romans ne sont pas des polars avec enquête, flic, enquêteur, mais plutôt des romans noirs, des romans d'ambiance. Pour Coup de chaud à la Butte-aux-Cailles, Yves Tenret place son roman dans un quartier de Paris, en pleine canicule. La Butte-aux-Cailles, Paris 13ème. Je ne suis pas Parisien -ça me va bien, ça me va bien-, je ne sais pas si l'auteur décrit ce quartier tel qu'il est réellement, un endroit où pas mal de zonards traînent, des alcoolos, des petits arnaqueurs, ... des gens qui n'emmerdent pas les touristes -bon il n'y en a pas beaucoup, ce n'est pas un quartier avec des sites référencés. En plein cœur du Chinatown parisien avec ses restaurants, ses salons de massage, un endroit que Walter ne connaît pas bien ou plutôt qu'il connaît mais qu'il n'a pas vu évoluer. Le roman est centré sur Walter, sur ses déambulations dans les rues et les bars proches de son squat. Sur ses questionnements quant à sa chute vertigineuse jusque sur le trottoir, lui l'ancien prof qui vient de passer la soixantaine, sur son alcoolisme. Sur ses copains plus jeunes que lui morts rapidement. Sur le quartier qui change à vue d'œil. Yves Tenret en décrit les endroits typiques, la petite Russie par exemple, la vie dans Chinatown, la manière dont les affaires s'y règlent, les rivalités entre Chinois et Libanais. Il crée une belle galerie de personnages, Walter en tête, mais aussi César ou Daniel le cafetier, Park Yun la Coréenne qui ne supporte pas les autres Asiatiques...
Tout concourt à ce que le lecteur passe un bon moment et ait même envie de se promener dans les rues de la Butte-aux-Cailles. Yves Tenret enjolive son histoire avec une jolie plume dialoguée assez vivement, et dans des descriptions réjouissantes qui n'en finissent pas et qu'on aimerait prolonger, sortes d'inventaires, dont celle-ci que je ne peux pas vous citer entière, elle fait une page : "Dans la courette, au ciment badigeonné chaîné de brique rouge succédaient de savants appareillages avortés, ayant l'ambition d'accorder aux nuances dorées de la brique de Vaugirard, la douceur saumonée de celle de Dizy, des moellons hirsutes de pierres de taille, puis du béton peint, de la brique nue, (...) un petit palmier, des rhododendrons, des hortensias, du laurier, des œillets d'Inde, des géraniums rose magenta, (...) des cyclamens, une niche dans un mur -le tout à moitié fait, jamais fini, un vrai Frida Kahlo de climat tempéré, une promesse de bonheur, promesse usée par tous les bouts mais toujours débordante de sa prolifération organique d'origine... Résilience !" (p.27/28)
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