"On n'est pas dans le futurisme, mais dans un drame bourgeois ou un thriller atmosphérique"
Enfant silencieux et fugueur, Yûji a toujours considéré son frère comme un étranger, blessant cruellement cet enfant de 9 ans son cadet qui l'observait de loin, plein d'admiration. Et dès qu'il a été en âge de quitter la maison, Yûji est parti pour Tokyo, ne revenant que de loin en loin, surtout pour réclamer de l'argent à sa mère. Mais aujourd'hui, ses parents sont morts et son frère se lance à sa recherche. Après 10 ans sans avoir vu son aîné, le cadet arrive à Tokyo sur les traces d'un frère qui a quitté la place depuis des mois. Installé dans son appartement, rencontrant ses amis et ses petites amies, il apprend à connaître cet inconnu, à la fois aimé et craint, et peut-être à se connaître lui-même.
Yûji, absent, fantasmé, dont l'ombre continue d'étouffer son jeune frère qui n'a pas pu se construire, blessé depuis sa toute petite enfance par l'indifférence, le mépris et la cruauté de son aîné. D'où sa quête éperdue dans les rues de la tentaculaire Tokyo, à la recherche de son insaisissable frère. En côtoyant ses amis, il découvre un être fuyant, borderline, qui cherche lui aussi quelque chose, son moi profond, la preuve de son existence, son âme. Car au fil des ses souvenirs, se dessine le portrait d'un homme de l'ombre qui ne sait que laisser le vide derrière lui. En se glissant dans ses pas, en séduisant même une de ses petites amies, le cadet ''tue'' l'aîné comme on tue le père. Vivement conscient de la personnalité toxique de Yûki, son frère pourra-t-il cicatriser ses blessures et aller de l'avant ?
Un roman énigmatique, addictif, où Hitonari Tsuji décrit des êtres torturés, solitaires, sur le fil du rasoir, à la recherche d'une voie à suivre dans un monde sans repères. Beau et désespéré.
Yuji Takaku n'aime pas l'école et il lui arrive de quitter le foyer familial une journée ou deux mais à l'âge adulte, il finit par disparaître pour de bon sans laisser de traces ni de nouvelles. Très affecté par la mort de ses parents, son frère cadet, 19 ans, ("J'ai neuf ans de moins que [Yujî] mais je suis son frère légitime") décide dix ans plus tard de partir à sa recherche.
Il tente alors de percer l'étrange personnalité de Yujî, qui s'intéressait de près à la métempsychose : "Même si nous sommes frères du point de vue de la génétique, pour ce qui est de l'âme, nous sommes des étrangers […] Le corps physique, ce n'est qu'une demeure d'emprunt".
On suit avec plaisir la quête initiatique du jeune Takaku à travers un Tokyo ultra-branché, lui qui n'a pas l'habitude des grandes mégalopoles et ses dangers : "Moi qui arrivais de Kofû, j'étais un simple provincial […] Dans cette ville, chacun vivait dans son propre monde, comme dans une bulle."
Au fil de ses rencontre avec ses anciennes petites amies (Atsuko et Hisami) et Yasuda, son collègue de travail, Takaku parvient malgré tout à récolter des indices et à comprendre petit à petit Yujî.
Pour ce qui est du titre, l'arbre du voyageur (ou "bananier éventail) est originaire de Madagascar. La spécificité de cette plante est qu'elle emmagasine de l'eau dans ses tiges. Comme l'explique Yasuda à Takaku, "les voyageurs coupent la tige […] et se désaltèrent avec l'eau qu'elle contient, c'est pour cela qu'on l'appelle arbre du voyageur. C'est une plante chameau." L'arbre du voyageur ne serait-il pas Yujî ?
Si vous souhaitez en savoir plus sur cette plante (taille, photos...), je vous renvoie à l'article de Wikipédia : http://fr.wikipedia.org/wiki/Arbre_du_voyageur.
Un bon roman qui tient le lecteur en haleine jusqu'à la dernière page car il est bien difficile de savoir comment il se termine.
Lisez aussi ma chronique sur "la lumière du détroit" (Folio) du même auteur sur lecteurs.com.
Hitonari Tsuji est né à Tokyo en 1959. Très connu au Japon comme romancier, poète et réalisateur, il est aussi chanteur de rock. Auteur de plusieurs romans qui ont remporté un immense succès, il est considéré comme un des chefs de file d'une nouvelle génération d'écrivains japonais. Son premier roman, "Le Bouddha blanc", inspiré de l'histoire de son grand-père, a reçu le Prix Fémina étranger en 1999.
Résumé : Saitô, le narrateur, un des gardiens de la prison d'Hakodate (unique établissement pénitentiaire du Japon proposant des cours d'entraînement naval), apprend que le nouveau prisonnier agressé et grièvement blessé au couteau un passant dans la rue, sans aucune raison. Il se souvient alors du petit garçon qui le terrorisait autrefois et avait fait de lui son souffre-douleur. 18 ans se sont écoulés et Saitô, fasciné, va voir Hanai, pervers, manipulateur, imposer comme autrefois sa loi tout son entourage. Mais Hanai l'a t-il reconnu ou non ?
J'avais beaucoup aimé "L'arbre du voyageur" (lire ma critique sur lecteurs.com) de Hitonari Tsuji (il était présent au Salon du Livre de Paris 2012) et c'est d'ailleurs ce qui m'a poussé à lire "La lumière du détroit".
Eh bien je n'ai pas été déçu, loin de là ! Ce court roman de 180 pages est tout aussi passionnant que "L'Arbre du voyageur". Le face-à-face entre Hanai et Saitô est captivant. L'auteur, grâce à un réel suspense, parvient à tenir le lecteur en haleine jusqu'à' à la dernière page. Quant au sens du titre, une partie de la réponse se trouve dans le roman.
Je vous le conseille donc vivement, chers internautes de Orange/Lecteurs.com
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