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Le goût comme objet philosophique ? Que l'Occident se soit refusé jusqu'à présent à accorder à ce sens réputé « primitif » un statut majeur semble être sans importance. Toutefois, il y a des raisons de penser que la nutrition est l'angle mort d'une culture rationaliste qui a manqué d'en apprécier à sa juste valeur la portée véritable. Contester aux saveurs de concourir à l'édification de la science, à la vérité ou l'art, n'est-ce pas s'interdire de concevoir d'autres manières de sentir, de saisir le réel et d'être au monde ? Traditionnellement, l'organe du goût répond à la nécessité de vivre, pure fonction biologique qui laisse entendre qu'une existence proprement humaine, louable et supérieure, morale et politique, doit se dresser contre ce corps vivant, avide et affamé, en repoussant la démesure gourmande et une consommation destructrice. Face à des normes et des concepts réfractaires à toute jouissance alimentaire, la philosophie du goût élabore un modèle singulier de sensibilité gustative qui ébranle autant les fondations de la métaphysique que les fondations des cultures occidentales.
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