"On n'est pas dans le futurisme, mais dans un drame bourgeois ou un thriller atmosphérique"
Après Mon rôle dans la chute d'Adolf Hitler, voici enfin le tome 2 inédit des "Mémoires de guerre" de Spike Milligan, une épopée narrée comme un monologue tragicomique, truffé d'anecdotes aussi embarrassantes qu'édifiantes pour mieux comprendre la guerre vue d'en bas.
Ce récit, sur une période allant de janvier à mai 1943, couvre l'Opération T orch et la campagne de Tunisie qui mèneront à la victoire des troupes alliées en Afrique du Nord.
Simple artilleur, Spike décrit les événements à l'échelle d'un individu moyen (voire audessous de la moyenne), d'un post-adolescent obsédé par les filles et le jazz. Ici, peu d'idéologie, et encore moins de culte de l'héroïsme, mais une franche camaraderie de garnements en culottes courtes. Un témoignage vécu aussi divertissant qu'instructif.
Artilleur Milligan, au rapport ! Et quel rapport !!
Ils sont en Algérie puis en Tunisie, dans les sables, les cailloux, la chaleur, le soleil et… Les tirs allemands.
Milligan nous raconte sa guerre presque au jour le jour, les manœuvres, les veilles sous le feu de l’ennemi, bref une guerre « normale ». Sauf que, sous la plume de Spike Milligan, cela prend une toute autre tournure.
J’aurais pu noter une citation par page tant l’écriture est brillante, incongrue, des salves hilarantes, un humour « so british » pour expliquer, raconter la guerre vue d’en bas, du côté des troufions, de ceux qui vont au casse-pipe. Les discussions de chambrée, plus souvent sous une toile de tente ou dans une maison bombardée tournent, bien sûr, autour du sexe. Il faut bien une soupape et les cuites sont les bienvenues, tout comme la sacro tasse de thé, arrosée ou pas.
Les bidasses se font des farces entre eux, souvent niveau CE1, mais il faut bien se défouler, rigoler pour évacuer la peur.
A travers ces galéjades et autres bons mots, j’ai senti le désespoir du soldat Milligan et de ses copains, senti l’odeur de la trouille, des bombes, écouté leurs peurs de mourir, ressenti leurs joies également.
Un livre, loin des pleurs et des jérémiades qui en dit long sur la vie du simple troufion en opérations de guerre qui est là parce que on lui a dit faut y aller, sans grande envie de tuer son prochain, mais peut-être celui d’après, surtout si il parle allemand.
Peut-être que si les officiers avait écouté son conseil, la guerre aurait duré moins longtemps. « Il suffirait de lâcher cinquante femmes de ménage anglaises sur le bunker du Führer. En une semaine, le Hun serait brisé.
- Ça va comme ça maintenant ! P¨lus question que ces types piétinent mon plancher ciré avec leurs bottes de cavalerie : Arrêtez votre char avec votre Stalingrad de malheur et assez-vous donc ! Je vous apporte une bonne tasse de thé et un petit pain au fromage pour M. Goering. »
Tout est à l’avenant, je me répète, hilarant, désopilant mais pas la grosse Bertha, non, de l’humour anglais siouplait et, comme dirait l’autre, ça sent le vécu.
Artilleur de l’absurde, Soldat Spike Milligan, je vous fais chevalier de l’ordre de la rigolade… Mais pas que. Derrière votre humour il y a le désespoir, la peur, la mort, le sang et les autres.
Le livre est agrémenté de photos détournées, de dessins de l’auteur commentés. Un livre à recommander par la médecine
La traduction de Thierry Beauchamps garde le sel des réparties « troufionnes ».
Bien envie de lire « Mon rôle dans la chute d’Hitler » premier tome de son journal de guerre
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