"On n'est pas dans le futurisme, mais dans un drame bourgeois ou un thriller atmosphérique"
Une enfant lit un roman dans lequel la mère de l'héroïne est malade, à la fin elle guérit, l'histoire se termine bien. Le lendemain, on annonce à l'enfant que sa propre mère est à l'hôpital, la petite vit enfin une aventure, elle est entrée dans le livre. Seulement la réalité trahit la fiction, sa mère meurt. Devenue romancière, Isabelle Desesquelles n'aura de cesse de franchir la frontière du vrai et du faux.
Avec ce livre, elle imagine une famille en Corse, deux soeurs et leurs parents un jour d'été. Au réveil ils sont quatre, le soir ils sont deux. Un secret venu du passé a bouleversé leur existence. Cette famille inventée entraîne l'auteure là où elle ne pensait pas aller : écrire les siens. Comment leur bulle a éclaté un autre jour d'été.
Là où je nous entraîne aimante et marque l'aboutissement d'une oeuvre romanesque remarquable.
Première sélection Prix du Roman Fnac 2022 « Là où je nous entraîne, roman de la sidération et d'une consolation impossible, est peut- être le plus beau livre de cette autrice. » Livres Hebdo « Au-delà de sa splendide virtuosité romanesque, Isabelle Desesquelles célèbre les noces noires du réel et de la fiction. » Sud Ouest « C'est ce silence qu'elle contre dans un livre qui coule avec la force d'un torrent, emporte tout, met à nu et à vif au tant qu'il régénère. » La Croix « Véritable aboutissement d'une oeuvre, ce roman jongle avec la lumière et les ombres d'une vie, d'une manière sensible et juste. » Psychologie
Alors qu'elle lit un roman où la mère de l'héroïne, malade finit par guérir, voilà que dans la réalité, la petite fille apprend l'hospitalisation de sa propre mère et la réalité fait irruption dans la fiction. Devenue adulte, l'enfant qui est en fait l'auteure elle-même, revient sur cette maladie, ce qu'on leur a caché à elle et à sa soeur, car cet épisode a marqué son existence et elle ne parvient pas à se pencher sur son histoire.
Il s'en suit un retour à la fiction, l'auteure nous proposant de découvrir l'histoire d'une famille : Louis, sa femme Zabé et ses deux filles Rachel et Pauline qui vont vivre eux-aussi un drame. C'est un couple assez original, Louis féru de chasse et de course à pied, Zabé plongée dans ses traductions des oeuvres d'auteurs russes, notamment Tolstoï qu'elle vénère, allant jusqu'à transformer son lit en bureau.
Un jour Louis découvre un secret de Zabé et rien ne va plus. Il crie tout le temps, insulte son épouse, devant les filles. Elle ne l'appelle désormais plus papa mais Luiii. Zabé disparaît un jour et cette absence va donner lieu à des cogitations chez les filles.
Isabelle Desesquelles choisit de nous présenter un double récit, l'histoire de cette famille, et en parallèle ses souvenirs d'enfance ou ce qu'il en reste, ce qui n'a pas été censuré, deux récits en miroir, qui finissent par s'entremêler très vite, pour ne faire plus qu'un. Une phrase dans le livre résume bien le désir de l'auteure :
Ce qui est arrivé, je veux l'écrire. Même mon roman me le réclame, je le savais avant de commencer. La fiction ne suffit plus.
Elle évoque, l'absence, la disparition, la mort, le suicide, et les répercussions sur la famille, la culpabilité de l'enfant, qui se demande ce qu'elle aurait pu faire pour éviter la mort de la mère. Elle aborde avec talent et sensibilité, les dégâts sur les enfants quand il manque un des parents et qui l'autre devient un autre qu'on croyait connaître mais qu'on ne connaît pas vraiment, la recherche de l'amour à tout prix, les troubles du comportement alimentaires, ou autres addictions pour combler ce vide de l'absence.
L'auteure joue sur ce double récit en proposant une présentation spéciale : double police d'écriture, petits caractères pour l'une gros caractères pour l'autre. Choix douloureux pour la lectrice que je suis, car mes problèmes visuels n'ont pas goûté l'aventure, en version électronique il m'a fallu sans arrêt faire des réglages ce qui a perturbé la lecture. C'est plus être plus facile en version papier.
C'est un roman plein de sensibilité, pour évoquer des thèmes difficiles, avec des termes précis bien choisis, une belle écriture, que j'ai pris le temps de déguster car l'auteure déclenche une réflexion intense chez le lecteur. C'est le deuxième livre de l'auteure que je lis, après avoir découvert en 2019 « UnPur » qui m'avait fait déjà une grosse impression.
Un grand merci à NetGalley et aux éditions J.C.Lattés qui m'ont permis de découvrir ce roman et de retrouver le style si particulier de son auteure.
#Làoùjenousentraîne #NetGalleyFrance
Lien : HTTPS://LESLIVRESDEVE.WORDPR..
Là où je nous entraîne est le premier roman de Isabelle Desesquelles que je lis. Si j’ai bien compris, c’est toujours le même thème qu’elle reprend au fil de ses écrits. Il faut rappeler que la mère d’Isabelle Desesquelles s’est suicidée alors qu’elle n’avait que 8 ans et sa sœur 6 ans. Depuis elle s’applique à surmonter ce traumatisme en écrivant. Je n’ai pu qu’être émue par ce récit intimiste et touchant. Comment un enfant peut-il guérir d’une telle blessure ? Combien il lui est difficile de comprendre les raisons du suicide de sa mère ! Qu’a-t-il fait, ou pas fait, pour que son amour inconditionnel n’ait pas pu la retenir ? Les deux sœurs porteront le fardeau de ce drame toute leur vie et l’aînée essaie de s’en sortir avec ce livre thérapie.
Isabelle Desesquelles a pris le parti d’écrire sur deux registres et nous donne deux récits qui s’imbriquent fortement. Elle imagine le quotidien tragique de deux sœurs, en Corse, dont la famille ressemble beaucoup à la sienne. En parallèle, elle raconte ses souvenirs d’enfance et la véritable histoire de la tragédie qui l’a frappée. Le va-et-vient entre les deux familles m’a parfois un peu perdue, d’autant que c’est assez répétitif. Je ne savais plus si j’étais dans la fiction ou dans la réalité, heureusement les polices de caractères sont différentes.
Le "nous" de Là où je nous entraîne se rapporte à la sœur qui, elle, a tourné la page et ne voudrait plus ressasser cette histoire et sans doute aussi au père. Je me demande comment cet homme a pu ne pas être blessé par sa représentation dans la partie fictionnelle.
Je n’ai pas trop accroché à l’écriture, l’usage fréquent de phrases sans verbe ne me séduisant pas beaucoup. Chaque chapitre est introduit par une phrase de Tolstoï. La maman fictive était une traductrice du russe, grande admiratrice de Léon Tolstoï, mais je n’ai pas compris l’intérêt de ces citations. (Si ce n’est que ça m’a donné envie de me remettre à la lecture de Tolstoï !)
https://ffloladilettante.wordpress.com/2022/10/19/la-ou-je-nous-entraine-de-isabelle-desesquelles/
#Làoùjenousentraîne #NetGalleyFrance
Ce roman est un savant jeu d’écriture dans lequel se mêlent deux histoires racontées en parallèle. D’un côté, il y a la propre vie de l’autrice avec le suicide de sa mère lorsqu'elle et sa petite sœur n’avaient que 8 et 6 ans. De l’autre, il y a l’histoire romancée d'une famille corse qui se déroule plus de quarante après les évènements réels.
Dans la famille de l’autrice, le drame vécu par la fillette aura des conséquences sur sa vie d’adolescente puis d’adulte et sera à l’origine de son envie d’écrire.
Dans la famille corse, tout est excessif, l’admiration de la mère pour Tolstoï qu’elle traduit du russe, la passion pour la chasse et la course à pied qui rythme la vie du père maçon, le lien d’amour indicible que développent les deux filles face aux difficultés de leurs parents.
C'est très bien construit et les deux récits s'imbriquent savamment sans qu'on ne les confonde jamais.
Si la première moitié du roman m’a conquise, par cette maîtrise des deux histoires qu’Isabelle Desesquelles mène de main de maître, je me suis lassée de cette alternance sans évènements et, hormis les deux rebondissements marquants de la deuxième partie, j’ai eu le sentiment de tourner un peu en rond.
Heureusement, la fin saisissante relève un rythme qui s’était un peu assoupi pour laisser une impression assez positive.
Finalement, j’ai eu le sentiment que l’autrice s’était perdue dans un exercice de style qui a fini par noyer le roman lui-même.
Il me restera de cette lecture un regard sur les psychoses ainsi que sur les mécanismes de construction du traumatisme, tout à fait passionnant. La réflexion sur la place que prend le réel dans l’imaginaire de la romancière, est également intéressante et nous éclaire sur la façon dont elle parvient à créer du faux à partir du vrai, à inventer une fiction à partir d’un récit autobiographique.
Un bilan mitigé pour ce roman à qui il manquait un peu de dynamisme pour me séduire.
Encore enfant, la narratrice perd sa mère. Elle sera élevée, avec sa sœur, par sa tante. De ce deuil impossible va naître un roman, mettant en scène une famille elle aussi confrontée à une perte irréparable. En écho à sa propre histoire et à cette blessure qui ne se referme pas, Isabelle Desesquelles fait naitre quatre personnages : Louis, Zabé, Rachel et Paulina qui vont lui permettre de dire sa propre douleur.
La lecture de ce roman a provoqué trois réactions très marquées au fil des pages. Tout d’abord, l’impression de se perdre entre le roman proprement dit et ce qui est de l’autobiographie de l’auteure. Cette navigation entre l’histoire personnelle et celle des quatre personnages inventés a nécessité un petit temps d’adaptation, heureusement assez court, et cela même si la maison d’édition a pris soin d’utiliser deux polices de caractères pour bien différencier les deux niveaux de récit.
Ensuite est venue la compréhension de l’intensité du texte et de l’émotion qu’il recèle. La gymnastique mentale entre les deux histoires est alors apparue dans toute son utilité et le jeu de miroir entre les personnages a pris toute son ampleur.
Enfin, une fois passé le moment de saisissement, un sentiment de répétition s'est installé et l’émotion s’est quelque peu dissipée.
Le roman oscille ainsi entre réalité et fiction, entraînant le lecteur dans un subtile jeu de miroir dans lequel, finalement, il n’est pas si important de ne pas confondre les récits. Il est même possible que l’auteure cherche habilement à nous perdre pour mieux appuyer son propos, estompant volontairement les frontières entre ses personnages et sa propre histoire. La tragédie d’une famille répond ainsi à celle de l’autre, l’une porte l’autre, elles s’interpénètrent et se mélangent dans un maelstrom de sentiments puissants partagés par tous les protagonistes.
Dans ce récit qui ouvre aussi des interrogations autour de la création littéraire, Isabelle Desesquelles évoque la folie de l’amour trahi, les liens indissolubles de l’enfance, l’impossibilité du deuil, le refus de la perte mais aussi un besoin viscéral de résilience pour pouvoir poursuivre sa propre histoire en se délestant des douleurs passées et en fuyant l’engrenage fatal de l’héritage.
Un livre à découvrir, pour la plume tout en élégance et gravité de l’auteure et cela même avec le petit bémol cité plus haut.
J’ai bien aimé :
- ces deux histoires (l’une correspondant à un roman, l’autre à la vie passée et actuelle de son auteure),
- la présentation de ce livre : les deux histoires sont intégrées dans un même chapitre, mais sous une forme et une police différentes.
L’écriture est fluide et engageante.
Toutefois, je me suis à un moment un peu mélangée dans les histoires, j’avoue.
COUP DE COEUR
https://leslivresdejoelle.blogspot.com/2022/08/la-ou-je-nous-entraine-disabelle.html
" Impérieuse et vaste notre mère ne me quitte pas. Elle a dynamité mes huit ans et ils sont là entiers quand j'écris, 8 c'est l'infini debout."
Un jour de l'été 1976, une enfant de huit ans lit un roman. La mère de son héroïne est malade mais à la fin elle guérit, l'histoire se termine bien. Le lendemain, on annonce à l'enfant que sa propre mère est à l'hôpital, elle est alors toute excitée de devenir l'héroïne d'une histoire qui hélas ne se termine pas de la même façon, sa mère meurt.
Ce drame a créé la romancière qu'est devenue Isabelle Desesquelles. Quarante six ans plus tard, elle imagine une famille corse, deux petites filles Rachel et Paulina et leurs parents Louis et Zabé qui, un jour d'été, voient leur existence bouleversée par un secret venu du passé. Cette famille inventée entraîne l'auteure là où elle ne pensait pas aller : écrire les siens, écrire comment leur bulle a éclaté un jour d'été. "En racontant la famille corse je touche à la nôtre". Dans ce nouveau roman, Isabelle Desesquelles entremêle donc une fiction et sa réalité exprimée à la première personne.
Ce roman est la clé et l'aboutissement de l'œuvre d'Isabelle Desesquelles. Livre après livre elle a raconté l'enfance foudroyée, l'explosion d'une bulle familiale un jour d'été. De livre en livre, elle a exploré la question de l'absence, du deuil impossible, de la place que prennent les morts, de la perte de l'enfance et de l'innocence avec des personnages principaux dont la vie basculait un jour de l'été de leurs huit ans " Il n'y a pas de personnages, il y a des êtres nourris au lait du souvenir ... Ce jour est devenu obsédant, matière romanesque."
Ici elle lève le voile sur sa propre histoire qui a nourri ses différentes fictions, le drame qui a foudroyé un 25 août 1976 la petite fille de huit ans qu'elle était : la mort de sa mère. Ce jour-là elle a créé un monde sur lequel règne l'enfantôme, son double, son prolongement "une petite fille a commencé d'écrire dans sa tête où l'on est deux, l'enfantôme et moi." Elle explore ses sentiments, le manque, la culpabilité de ne pas avoir su retenir sa mère et se livre à une véritable enquête littéraire en se plongeant dans ses souvenirs, dans les lettres et photos de sa mère et en s'efforçant de vaincre les silences de son père. Elle a prévenu son père et sa sœur qu'elle allait écrire et publier leur histoire car pour elle, "le temps est venu... la fiction ne suffit plus", les cacher, elle et sa sœur, derrière des personnages de fiction ne lui suffit plus, elle ne peut plus avancer masquée.
Il est question de la place que prennent les morts " Il faut faire attention avec nos morts, parfois ils prennent tellement de place, on en oublie les vivants.", phrase qui fait écho à celle de "Je voudrais que la nuit me prenne" "Si on les laisse faire les absents ont raison de nous et ils nous possèdent.". Ne pas les laisser prendre trop de place mais ne pas les oublier "Contourner une absence ne suffit pas à l'éviter. Il faut parler des morts, c'est assez de les mettre dans une boîte ou de les éparpiller. Nous sommes les restes de nos morts."
Au fil de deux histoires qui se nourrissent et s'éclairent mutuellement, celle de la famille corse et la sienne, Isabelle Desesquelles nous livre des réflexions très riches sur la littérature, sur l'effet de l'écriture sur la famille "l'écrivain est cette mèche allumée sur un baril de poudre, la famille", sur le métier de traductrice à travers l'histoire de Zabé obsédée par Tolstoï, sur le métier de libraire, sur la frontière entre réalité et fiction qu'elle a explorée dans ses romans. Elle se considère comme un pont suspendu entre réalité et fiction qui sont pour elle des partenaires et non des adversaires. "Fictionner le réel. Le roman, traduction romanesque d'un drame vécu, avec un prolongement : ce qui aurait pu arriver. Tout ce que l'on se raconte."
" Echeveau détricoté, une maille à l'envers, une maille à l'endroit, une de réel, une de fiction, et je suis la seule à connaître la vérité, m'en sens protégée."
La fiction autour de la famille corse Zabé, traversée par la Natacha de Tolstoi, est centrée sur une histoire de jalousie après la découverte d'un souvenir caché. Ici ce n'est pas une mère qui est en danger mais c'est un père que la jalousie transforme en danger pour sa famille. La plongée de Louis dans la folie sous l'emprise de la jalousie, la "voix mauvaise" qui s'empare de lui et le transforme en un Luiiii injurieux, est saisissante et le dénouement magistral. Une fiction forte et violente alors que l'histoire réelle est apaisée.
Comme toujours avec Isabelle Desesquelles, l'émotion parfois l'uppercut est au rendez-vous au détour de chaque page. L'écriture est ciselée et sensorielle. Les pages sur sa mère, " Ce que je retiens d'elle... Ce que je tiens d'elle" sont d'une absolue splendeur. Ce roman est un régal comme d'habitude. Une construction au cordeau où fiction et réalité se mêlent sans jamais nous perdre. Un roman qui plaira même si on ne connaît pas l'œuvre d'Isabelle Desesquelles.
Il n'y a pas encore de discussion sur ce livre
Soyez le premier à en lancer une !
"On n'est pas dans le futurisme, mais dans un drame bourgeois ou un thriller atmosphérique"
L'auteur se glisse en reporter discret au sein de sa propre famille pour en dresser un portrait d'une humanité forte et fragile
Au Rwanda, l'itinéraire d'une femme entre rêve d'idéal et souvenirs destructeurs
Participez et tentez votre chance pour gagner des livres !
Il m'attend mais je reculé ...
devant l'intensité supposée