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« Pour Laure, la Kabylie est la chambre interdite » Jamais sa famille maternelle n’évoque cette Algérie qu’il a fallu quitter un jour de 1961 pour commencer une nouvelle vie en France. Mais la souffrance perdure en silence. Laure va partir à la recherche de ses racines, dans ce pays qu’elle ne connait pas et, comme ses ancêtres, elle aime les oliviers, ces arbres qu’ils cultivaient pour les olives dont ils faisaient de l’huile.
« Elle vit dans la nature, une nature encore sauvage, pas à la main de l’homme. Comme beaucoup qui observent les nuages, Laure y devine des formes et accorde au ciel de lui raconter des histoires, mais c’est à une écorce et aux rides du bois qu’elle prête des traits. L’écorce de ses oliviers. »
En parallèle de cette quête familiale contemporaine, le lecteur suit le destin de deux fillettes dans les années 50. Nour et Made vivent dans la ferme et l’oliveraie qu’exploitent les parents de Made. Chez eux, on parle français, on est catholique et on porte des noms de saints chrétiens. Made a trois grandes sœurs qu’elle nomme « les pénibles » et un petit frère. Leur mère, qui ne veut pas que ses filles connaissent son destin, veut qu’elles puissent aller à l’école, apprendre un métier afin de ne pas dépendre d’un homme. Car ici, dans ces montagnes de Kabylie ou les traditions perdurent, les mariages sont arrangés par les pères. C’est ce qui va arriver à Nour depuis que son sang a coulé et Made ne supporte pas l’idée d’être séparée de sa sœur de lait.
L’histoire est en marche, et de nombreux évènements, des drames familiaux, vont bousculer l’ordre établi.
Le récit se raconte du point de vue des femmes, alors que le pouvoir est du côté des hommes. Ce sont eux qui font vivre la famille, eux qui prennent les décisions mais, déjà, on sent chez Mad ce désir de s’émanciper de cette vie tracée et d’un ordre établi depuis des millénaires. Les femmes doivent obéir, se marier et mettre au monde des fils pour perpétuer le clan.
Les deux récits, que plusieurs décennies séparent, vont finir par se rejoindre lorsque Laure, parie en Kabylie, revient à la source de sa famille, questionne, fouille les archives, scrute les photos et finit par mettre des mots sur ce silence coupable qui l’a privée de ses racines.
Laure est française, mais elle ne renie pas l’autre culture, celle d’où elle vient et qu’on veut lui confisquer. Et cette histoire parle admirablement des origines, d’une autre culture et de l’exil forcé.
Avec acharnement, Laure va chercher la vérité, la faire éclater, tout en plantant des oliviers comme un lien avec ces ancêtres qui les cultivaient dans ce pays lointain, un arbre comme le prolongement d’une famille.
« On plante un arbre pour une naissance et on le regarde grandir, on veille sur lui. »
Les femmes de ces quatre générations sont captivantes, elles nous montrent qu’il y a d’autres chemins possibles que celui assigné par la société, la famille et la religion.
C’est aussi un roman historique car il raconte la colonisation et la place des kabyles, ni tout à fait assimilés aux colons français bien qu’étant chrétiens et parlant leur langue, ni tout à fait kabyles car ceux qui sont restés musulmans et fidèles à leurs traditions jugent leur comportement déloyal.
Une magistrale fresque familiale et historique pour une lecture plaisante malgré une écriture parfois complexe.
Ce roman nous emmène de la Kabylie entre 1954 et 1961 à la France, à partir de 1999. C'est l'histoire d'une famille déracinée qui a du quitter l'Algérie en 1961 en laissant tout derrière elle et qui a jeté la clef de la mémoire, la cadenassant, refusant d'en parler. Léa, la grand-mère refuse de répondre aux questions de Laure, sa petite-fille sur leur vie là-bas et surtout sur sa mère, Made, qui est morte alors qu'elle avait 8 ans. Laura décide de partir en Algérie en 2005, à la recherche de son histoire familiale qu'on lui refuse.
Ce roman est avant tout une histoire de femmes, celle d'une lignée de femmes, dans un pays qui les considérait comme des marchandises que l'on pouvait troquer contre des biens, comme des esclaves se tuant à la tâche et comme des ventres qui étaient rejetés, méprisés s'ils ne donnaient pas un fils. Une fille ne pouvait pas faire d'études, était souvent mariée de force très jeune. C'est l'histoire de femmes qui n'acceptent pas leur destin tout tracé, qui font tout leur possible, y compris renier leurs origines, pour offrir un avenir à leurs enfants et en particulier à leurs filles.
C'est aussi l'histoire d'une amitié adolescente très forte entre la fille du propriétaire, Made; et celle d'un ouvrier travaillant pour son père. Made rejette les règles sociales tacites qui veulent que les deux mondes ne se mélangent pas et que chacun reste à la place qui lui est assignée par sa naissance.
C'est encore l'histoire d'une quête : celle de la mère trop tôt disparue qu'il est impossible d'évoquer, celle de l'histoire familiale et celle de ses origines, de son identité sans laquelle, on traverse la vie en boitant.
L'auteure nous offre, en arrière-plan, un pan de l'histoire de la colonisation mais centré sur le peuple kabyle. J'ai ainsi découvert que certains enfants ont été christianisés, ont reçu des prénoms français, ont suivi une scolarité française, ont été enseignants, ont été propriétaires terriens avec d'autres kabyles musulmans sous leurs ordres. Ils étaient rejetés, à la fois, par les Français qui les considéraient comme des arabes et par les Kabyles qui les voyaient comme des traitres. Elle nous décrit aussi l'exil, l'arrachement à une terre aimée, la cicatrice qui ne s'est jamais refermée et qui se transmet aux générations suivantes.
Ce roman m'a attirée par le regard magnétique, intense de la femme en couverture et par son titre intrigant qui vient, comme l'explique l'auteure, dans son roman, d'un tableau de Renoir "Paysage algérien, le ravin de la femme sauvage" que j'ai découvert à cette occasion. C'est un roman magnifique par les personnages de femmes et par les odeurs, les couleurs, la nature; la symbolique de l'olivier, fil conducteur de la vie de Laure, est très forte : l'enracinement dans sa terre le rend plus fort, lui permet de renaître après que tout a été pratiquement détruit.
Malgré une belle écriture imagée, j'ai eu du mal à me laisser entraîner, à m'immerger car j'ai trouvé, par moments, l'écriture trop elliptique; je suis, parfois, restée en alerte pour vraiment saisir le sens, relisant certaines phrases et ainsi perdant la musique, l'émotion.
#Histoiredelafemmesauvage #NetGalleyFrance
Alors qu'elle lit un roman où la mère de l'héroïne, malade finit par guérir, voilà que dans la réalité, la petite fille apprend l'hospitalisation de sa propre mère et la réalité fait irruption dans la fiction. Devenue adulte, l'enfant qui est en fait l'auteure elle-même, revient sur cette maladie, ce qu'on leur a caché à elle et à sa soeur, car cet épisode a marqué son existence et elle ne parvient pas à se pencher sur son histoire.
Il s'en suit un retour à la fiction, l'auteure nous proposant de découvrir l'histoire d'une famille : Louis, sa femme Zabé et ses deux filles Rachel et Pauline qui vont vivre eux-aussi un drame. C'est un couple assez original, Louis féru de chasse et de course à pied, Zabé plongée dans ses traductions des oeuvres d'auteurs russes, notamment Tolstoï qu'elle vénère, allant jusqu'à transformer son lit en bureau.
Un jour Louis découvre un secret de Zabé et rien ne va plus. Il crie tout le temps, insulte son épouse, devant les filles. Elle ne l'appelle désormais plus papa mais Luiii. Zabé disparaît un jour et cette absence va donner lieu à des cogitations chez les filles.
Isabelle Desesquelles choisit de nous présenter un double récit, l'histoire de cette famille, et en parallèle ses souvenirs d'enfance ou ce qu'il en reste, ce qui n'a pas été censuré, deux récits en miroir, qui finissent par s'entremêler très vite, pour ne faire plus qu'un. Une phrase dans le livre résume bien le désir de l'auteure :
Ce qui est arrivé, je veux l'écrire. Même mon roman me le réclame, je le savais avant de commencer. La fiction ne suffit plus.
Elle évoque, l'absence, la disparition, la mort, le suicide, et les répercussions sur la famille, la culpabilité de l'enfant, qui se demande ce qu'elle aurait pu faire pour éviter la mort de la mère. Elle aborde avec talent et sensibilité, les dégâts sur les enfants quand il manque un des parents et qui l'autre devient un autre qu'on croyait connaître mais qu'on ne connaît pas vraiment, la recherche de l'amour à tout prix, les troubles du comportement alimentaires, ou autres addictions pour combler ce vide de l'absence.
L'auteure joue sur ce double récit en proposant une présentation spéciale : double police d'écriture, petits caractères pour l'une gros caractères pour l'autre. Choix douloureux pour la lectrice que je suis, car mes problèmes visuels n'ont pas goûté l'aventure, en version électronique il m'a fallu sans arrêt faire des réglages ce qui a perturbé la lecture. C'est plus être plus facile en version papier.
C'est un roman plein de sensibilité, pour évoquer des thèmes difficiles, avec des termes précis bien choisis, une belle écriture, que j'ai pris le temps de déguster car l'auteure déclenche une réflexion intense chez le lecteur. C'est le deuxième livre de l'auteure que je lis, après avoir découvert en 2019 « UnPur » qui m'avait fait déjà une grosse impression.
Un grand merci à NetGalley et aux éditions J.C.Lattés qui m'ont permis de découvrir ce roman et de retrouver le style si particulier de son auteure.
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Là où je nous entraîne est le premier roman de Isabelle Desesquelles que je lis. Si j’ai bien compris, c’est toujours le même thème qu’elle reprend au fil de ses écrits. Il faut rappeler que la mère d’Isabelle Desesquelles s’est suicidée alors qu’elle n’avait que 8 ans et sa sœur 6 ans. Depuis elle s’applique à surmonter ce traumatisme en écrivant. Je n’ai pu qu’être émue par ce récit intimiste et touchant. Comment un enfant peut-il guérir d’une telle blessure ? Combien il lui est difficile de comprendre les raisons du suicide de sa mère ! Qu’a-t-il fait, ou pas fait, pour que son amour inconditionnel n’ait pas pu la retenir ? Les deux sœurs porteront le fardeau de ce drame toute leur vie et l’aînée essaie de s’en sortir avec ce livre thérapie.
Isabelle Desesquelles a pris le parti d’écrire sur deux registres et nous donne deux récits qui s’imbriquent fortement. Elle imagine le quotidien tragique de deux sœurs, en Corse, dont la famille ressemble beaucoup à la sienne. En parallèle, elle raconte ses souvenirs d’enfance et la véritable histoire de la tragédie qui l’a frappée. Le va-et-vient entre les deux familles m’a parfois un peu perdue, d’autant que c’est assez répétitif. Je ne savais plus si j’étais dans la fiction ou dans la réalité, heureusement les polices de caractères sont différentes.
Le "nous" de Là où je nous entraîne se rapporte à la sœur qui, elle, a tourné la page et ne voudrait plus ressasser cette histoire et sans doute aussi au père. Je me demande comment cet homme a pu ne pas être blessé par sa représentation dans la partie fictionnelle.
Je n’ai pas trop accroché à l’écriture, l’usage fréquent de phrases sans verbe ne me séduisant pas beaucoup. Chaque chapitre est introduit par une phrase de Tolstoï. La maman fictive était une traductrice du russe, grande admiratrice de Léon Tolstoï, mais je n’ai pas compris l’intérêt de ces citations. (Si ce n’est que ça m’a donné envie de me remettre à la lecture de Tolstoï !)
https://ffloladilettante.wordpress.com/2022/10/19/la-ou-je-nous-entraine-de-isabelle-desesquelles/
#Làoùjenousentraîne #NetGalleyFrance
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A gagner : la BD jeunesse adaptée du classique de Mary Shelley !
Caraïbes, 1492. "Ce sont ceux qui ont posé le pied sur ces terres qui ont amené la barbarie, la torture, la cruauté, la destruction des lieux, la mort..."
Chacune des deux demeures dont il sera question est représentée dans le sablier et le lecteur sait d'entrée de jeu qu'il faudra retourner le livre pour découvrir la vérité. Pour comprendre l'enquête menée en 1939, on a besoin de se référer aux indices présents dans la première histoire... un véritable puzzle, d'un incroyable tour de force
Sanche, chanteur du groupe Planète Bolingo, a pris la plume pour raconter son expérience en tant qu’humanitaire...