"On n'est pas dans le futurisme, mais dans un drame bourgeois ou un thriller atmosphérique"
Nathan Glass a soixante ans. Une longue carrière dans une compagnie d'assurances à Manhattan, un divorce, un cancer en rémission et une certaine solitude qui ne l'empêche pas d'aborder le dernier versant de son existence avec sérénité. Sous le charme de Brooklyn et de ses habitants, il entreprend d'écrire un livre dans lequel seraient consignés ses souvenirs, ses lapsus, ses grandes et petites histoires mais aussi celles des gens qu'il a croisés, rencontrés ou aimés. Un matin de printemps de l'an 2000, dans une librairie, Nathan Glass retrouve son neveu Tom Wood, perdu de vue depuis longtemps. C'est ensemble qu'ils vont poursuivre leur chemin, partager leurs émotions, leurs faiblesses, leurs utopies mais aussi et surtout le rêve d'une vie meilleure à l'hôtel Existence...
Un livre sur le désir d'aimer. Un roman chaleureux, où les personnages prennent leur vie en main, choisissent leur destin, vivent le meilleur des choses - mais pour combien de temps, encore, en Amérique oe...
Je rencontre à nouveau Paul Auster après un Moon palace lu avec grand plaisir. Ici mon enthousiasme grimpe à des sommets. Blooklyn follies est une lecture addictive comme je les aime, ancrée au cœur du quartier de Brooklyn, véritable personnage à part entière de l’œuvre de Paul Auster. Dans Moon palace, c’était le quartier du musée où Fogg devait se rendre sur ordre de Thomas Effing, là où avait été enterré son ami Pavel Shum après que ce dernier se soit fait renverser par une voiture sur Broadway.
Les Brooklyn follies se déroulent essentiellement au New jersey et à Brooklyn où habite Rachel (le fille de Nathan) et où a vécu Nathan … et Paul Auster lui-même (il y est décédé le 30 avril 2024). L’auteur évoque ainsi l’origine de sa famille avec des grands-parents issus de l’Europe centrale et de l’est. Ces quartiers, occupés jusqu'aux années 70 par des immigrants sans le sou, ont bien changé sous le poids énorme de « machines et d’argent ».
Les premières pages doivent être lues avec attention afin de bien enregistrer les protagonistes, ensuite les péripéties s'enchaînent. Paul Auster a la capacité de régaler le lecteur, les mots coulent dans un flot régulier, alternant les températures et les émotions. Les digressions participent à la recherche de vérité, celle du romancier liant les phrases entre elles, reprenant ou contredisant la phrase précédente pour donner du rythme. L'œuvre est parfaitement maîtrisée sur le fond et sur la forme, signe d’un grand écrivain.
Nathan est un héros fatigué, occupé à enquêter sur notre bien le plus précieux : la vie, la condition humaine. J'ai pensé à ces inspecteurs plus ou moins dépressifs de nombreux romans policiers. Il a la soixantaine fatiguée après une carrière à Manhattan dans une compagnie d'assurance. Un divorce et un cancer en rémission ont chargé la barque. Fâché pour des broutilles avec sa fille Rachel, il se résout à lui envoyer un cadeau et une lettre pour tenter de renouer le contact. C'est un homme bienveillant, soucieux de l'autre, essayant en permanence de recoudre ce que le temps, les aléas peuvent déchirer. Son neveu Tom, retrouvé dans une librairie, n'est pas au mieux… Nathan l'apprécie beaucoup et l'aide à prendre un nouveau départ, il est aussi une source d'inspiration pour le livre qu'il écrit. Tom est amoureux, sans oser l'approcher, de celle qu’il a baptisé la JMS, Jeune Mère Sublime. Ce sont des pages magnifiques peignant la maternité, la féminité et le renouveau par l’enfance heureuse.
Dans cette famille éclatée, il y a aussi la sœur de Tom, Aurore dite Rory, mariée avec un fanatique religieux… Rory a une fille, Lucie, qu'elle envoie avec quelques dollars en poche rejoindre son frère Tom. Lucie débarque dans leur vie comme un vent de fraîcheur et de folie créatrice.
Le hasard est souvent mis en avant chez Paul Auster... Je trouve qu’il est avant tout un écrivain de la lucidité, de l'intervention, à rebours d'un cynisme de façade. J'ai adoré la relation qu'il entretient avec sa fille Rachel. Quand celle-ci se pose mille questions concernant la fidélité de Terence, il use de tous les arguments pour donner un espoir au couple en plein doute. J'ai apprécié son regard chargé d’humanité sur Lucie.
L'œuvre va bien au-delà des sentiments familiaux, l’auteur s'exprimant sur l'écriture et sur l’Amérique avec le désastre des élections de l'année 2000, rappelant que déjà à cette époque les Républicains avaient contesté les résultats du scrutin en Floride et manipulé la Cour suprême. L'échange avec le mari de Rory, le fanatique religieux, est digne des meilleures sorties de Woody Allen. Il appartient à la minuscule Église du Verbe sacré, nom bien choisi.
Ce Nathan semble bien être un double de l'auteur, à moins que ce ne soit aussi Tom (ou encore la JMS...). L'un et l'autre écrivent, Tom est un écrivain ayant abandonné l’écriture, Nathan s’accroche à écrire Le livre de la folie humaine. Nathan, soit Paul Auster…, a le pouvoir de créer, entrant dans les détails pour la véracité de l'histoire alors que Harry, patron de la librairie, est attiré par le jeu et l'escroquerie, pour l’aventure et l'argent. J'ai aimé les conseils, non dénués d'humour, donnés par Nathan à Joyce, la mère de la JMS avec qui il a entamé une liaison :
Un récit si bien mené qu'il conserve toute son actualité. A lire sans faute si ce n'est pas déjà fait. J’ai tout à fait envie de me procurer 4321, son plus long roman écrit à 70 ans. Plus de mille pages, 5 ans d’écriture, 4 récits, 4 destins possibles, un livre sur l’Amérique de 1947 à 1970. Inspiré par Montaigne, paraît-il… ce qui me pousse à entreprendre la lecture de ce pavé. L’avez-vous lu ?
Quels romans de Paul Auster avez-vous aimés ?
Sorti en France en 2005, "Brooklyn follies" est un roman à part dans la bibliographie de Paul Auster. À peine un an après "La nuit de l'oracle", l'Américain prend ici le lecteur à contre-pied en livrant ce qui est probablement son œuvre la plus accessible. Alors que son prédécesseur, tout comme ses successeurs ("Dans le scriptorium", "Seul dans le noir"), distillent une histoire complexe au rythme pénible, sur "Brooklyn follies" souffle un vent de liberté assez inhabituelle dans l'œuvre de l'auteur. On retrouve pourtant les éléments qui fomentent son univers à commencer par le cœur de l'action qui se déroule en grande partie à Brooklyn, sans oublier les thèmes austériens récurrents comme l'athéisme forcené, la sexualité décomplexée et bien entendu les travers et autres aspects sombres de l'âme humaine. On suit donc avec plaisir les déambulations de Nathan Glass et de son neveu Tom Wood, leurs discussions littéraires où comme à son habitude Auster en profite pour parler des auteurs qu'il apprécie à commencer par Kafka dont il nous raconte, par l'entremise de Tom Wood, l'un des pans de la vie par le biais de l'histoire de la poupée dont je ne vous dévoilerais rien ici. Cet aparté dans le récit est ce que j'ai coutume d'appeler "l'histoire touchante du roman". Dans chacune de ses œuvres, Paul Auster réussit toujours dans un moment de grâce à nous conter une anecdote qui va sortir du lot et laisser planer sur le reste du roman un état d'apesanteur, à l'instar de "La nuit de l'oracle" où le beau-frère du personnage principal retrouve des diapositives disparues de sa femme décédée et les découvre par le biais de jumelles permettant de voir en 3D. Mais revenons plutôt à ce "Brooklyn follies" qui, malgré ses aspects ludiques, pose toutefois problème sur certains points. Les personnages ont beau affronter des épreuves en pagaille, il y a dans ce roman une dose effroyable de bons sentiments qui fait que chaque nouvelle situation périlleuse ne l'est jamais bien longtemps, que chaque problème ne s'envenime jamais vraiment. Les personnages sont droits ou repentants et prompts à pardonner même à une sœur qui a abandonné sa fille, rejoint une secte religieuse et fait de la pornographie. Si on reconnaît des éléments familiers, on ne retrouve pas vraiment Paul Auster tant "Brooklyn follies" le ferait presque passer pour "gâteux". J'exagère bien entendu, car le roman se lit avec plaisir et facilité, mais il fait pâle figure quand on le compare par exemple avec "Le livre des illusions". Si vous ne connaissez pas encore cet auteur, mieux vaut donc ne pas débuter par ce roman, car il n'est pas du tout représentatif de son univers et s'avère au final plus une gourmandise qu'un repas de gourmet.
Une retraite mouvementée
Je n'ai jamais été déçue par un livre de Paul Auster, et là non plus : Brooklyn Follies, aux éditions Actes Sud.
Nathan Glass, tout juste sorti d'un cancer et fraîchement divorcé, vient de s'installé à Brooklyn, où il a passé sa jeune enfance, pour y mourir... Du moins c'est ce qu'il croit.
Il se met d'abord en tête d'écrire un livre sur les anecdotes de sa vie, puis sur celles de ses proches. Il commence à prendre ses habitudes dans ce nouveau quartier et, coïncidence, il retrouve, dans sa librairie préférée, son neveu, Tom, qu'il n'avait pas vu depuis un bon bout de temps. Il redeviennent les amis qu'ils avaient été. Puis un jour débarque Lucy, la nièce de Tom...
Aurora, la sœur de Tom, était une jeune femme qui avait toujours eu une vie chaotique. Mais Lucy refuse de dire où elle se trouve. Nathan fait aussi plus ample connaissance d'Harry, le patron de Tom, qui a eu une vie assez mouvementée lui aussi : homosexuel marié à une femme riche, galeriste d'art qui a fait de la prison pour escroquerie, amoureux du faussaire, il l'a fait envoyer en prison...
Bref, la vie de Nathan devient tout de suite plus agité et il devient en quelque sorte l'ange gardien de tout ce petit monde : oncle, ami, conseiller, entremetteur, il fait en sorte que tout se passe le mieux possible pour ceux qui l'entourent ; mais c'est sans compter sur les aléas de la vie, qui aiment mettre des bâtons dans les roues des gens...
On retrouve les thèmes de la ville (New York surtout), de la famille et de la vie en général, souvent au cœur des romans d'Auster, et dans une vie justement qui semble si normale, voilà une multitudes d'aventures qu'on découvre et on se dit que oui, finalement, nous aussi parfois il nous arrive des choses dignes d'un roman !
Le roman tacle aussi la politique Bush dès que possible, et ça, c'est toujours bienvenu.
C'est donc un roman très agréable, mais qui ne mâche pas ses mots.
Pas seulement en raison de ma passion pour New-York et de ma découverte de Brooklyn en 2010.
J'adore et je ne sais pas pourquoi
Vieillesse et famille
Auster comme on n'a pas l'habitude de le lire, j'ai beaucoup aimé
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