"On n'est pas dans le futurisme, mais dans un drame bourgeois ou un thriller atmosphérique"
http://alombredunoyer.com/2015/11/20/tout-est-de-ma-faute-jean-pierre-tulle/
Dans cette période un peu trouble et ô combien compliquée avec les événements récents, j'avais besoin de m'évader, me changer les idées et donc me distraire. Ça tombe bien, j'avais reçu il y a un mois environ de la part de l'agence Anne et Arnaud, Tout est de ma faute! Mes trois ans dans l'intimité de François Hollande de Jean-Pierre Tulle, un petit essai humoristique excellemment documenté.
Mais qui est donc Jean-Pierre Tulle? Il se présente comme l'ancien chauffeur et conseiller spécial du président. Rien que cela me direz vous...
“Jean-Pierre, j’aime votre franchise. Vous êtes le seul qui me dise la vérité. J’ai une proposition à vous faire : accepteriez-vous de me suivre à l’Élysée ? Vous serez mon conseiller en normalité. Je suis entouré de gens anormaux, vous serez ma connexion avec la réalité. Qu'en dites-vous?
Et là, il y a eu un coup terrible du destin. Au moment même où j'allais répondre à François qu'il avait perdu la boule, le facteur a sonné chez moi avec un recommandé des impôts, et moi, au coup de sonnette, j'ai crié : J'arrive tout de suite.
Voilà ce qu'il s'est passé. A quoi cela tient, le destin d'un pays.”
12 chapitres et 189 pages plus tard, le conseiller en normalité nous nargue:
Mais qui suis-je vraiment? Essayer de trouver...
"Devinez, devinez qui je suis! Au bas masqué, ohé ohé!"
Ne comptez pas sur moi pour prendre les paris sur la personnalité réelle de cet auteur. Ce qui est sûr et certain, c'est que le livre, sorte de confession fictive et humoristique, est un florilège d'anecdotes. L'auteur est parfaitement au courant des choses et ne devait pas être bien loin du Président de la République.
Et bien sûr, tout est de sa faute! Tout y passe: la campagne, Merkel, Sarkozy, Cahuzac (qu'il a conseillé), Leonarda, Valls, le mariage pour tous, le chômage, ... Jean-Pierre Tulle finit par prendre toutes les décisions à la place de François. C'est bien écrit, drôle, parfois hilarant et navrant. Cela se lit très rapidement et avec le sourire aux lèvres. Surtout, même si cela est une satire, cela semble terriblement plausible!
"Résilience et surtout, modestie, Jean-Pierre: Tout notre programme réside la dessus."
"Ce qu'on avait retenu du point sur le chômage, c'est que ça ressemble beaucoup au cancer: on ne connait pas les causes, l'issue ne dépend pas de nous, mais la bonne humeur, ça aide.
– La reprise est au coin de la rue. Il y a des initiatives extraordinaires dans ce pays : il y a des viviers d’innovations, des success stories dont les médias ne parlent pas.
– Vous avez des exemples?
– Oui. Nous. Pôle emploi. Ça se passe super: tous les voyants sont au vert. Franchement, j’ai jamais bossé dans une boîte comme ça : la demande explose, on est leader en parts de marché, leaders en satisfaction clients, on a optimisé nos process, on a des ambitions à l’international… Et on embauche à tour de bras : 4000 personnes rien que cet été, sans parler des prestataires.”
Le style est simple mais la plume est vive et acérée. La critique est souvent réelle derrière les traits d'humour comme ci-dessous par exemple:
"Il a convoqué une réunion au sommet avec le premier ministre, le ministre de l'Armée, le général en chef des armées et une brochette de conseillers: le conseiller en début de conflit qui ne va pas tarder, le conseiller en prise de décision à prendre en cas de conflit armé, le conseiller en opération militaire à mettre en route si une décision était prise et le conseiller en mise en route d'urgence des décisions quand elles sont prises.
Pour la première fois, je me suis fait cette réflexion: est-ce que trop de conseiller ne tue pas le conseil?"
“Avec François, on a regardé le premier discours de politique générale de Valls, tout en mangeant des chips devant la télé. Nous avions fait un pari : à chaque fois que Valls prononçait le mot ‘France’, François prenait une poignée de chips; à chaque fois qu’il prononçait le mot ‘socialiste’, j’en prenais une. François a fini par aller vomir aux toilettes et moi, je suis resté sur ma faim. Trente-deux fois ‘France’ contre trois ‘socialiste'”.
Improvisations, hésitations, doutes... et finalement couacs et plantages à répétitions, cela pourrait être un bon résumé de cette carrière qui aura duré 3 ans pour l'auteur.
Ce n'est pas toujours politiquement correct.
“La France est en burn-out : après un mandat entier d’omniprésidence, elle a surtout besoin de calme et de modestie. Ça, c’est un job pour moi. Je serai le joint qui fera décrocher le pays après cinq ans de cocaïne”.
Si vous aimez et suivez la politique, je vous conseille ce petit opus. J'ai passé un excellent moment avec Jean-Pierre et ne peux que le recommander.
Allez une petite dernière: un dernier tacle au petit nerveux d'en face!.
“Le 19 septembre, Nicolas Sarkozy n’a surpris personne en annonçant son retour en politique. Mais il a surpris la France entière en ajoutant, non pas qu’il avait changé, mais qu’il allait changer l’UMP, ‘de fond en comble’, dès qu’il aurait pris la présidence du parti. A l’Elysée, les conseillers en stratégies en sont restés babas:
– Il a changé de façon de changer.
– Il est très fort. Il a toujours un coup d’avance.”
4/5
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