2018 commence abruptement avec la mort des éditeurs Bernard de Fallois et Paul Otchakovsky-Laurens et celle du grand écrivain israélien Aharon Appelfeld.
2018 commence abruptement avec la mort des éditeurs Bernard de Fallois et Paul Otchakovsky-Laurens et celle du grand écrivain israélien Aharon Appelfeld.
La Revue de Presse littéraire de juin
Michèle et Anne ont lu "Celle que vous croyez" de Camille Laurens (Gallimard)
Camille Laurens publie "Celle que vous croyez" (Gallimard) un grand roman sur la passion à l’heure de Facebook
Ta promesse
.
En apparence, c'est une histoire simple. Une histoire d'amour entre Claire, une écrivaine réputée à la vie personnelle jusqu'alors cabossée, et Gilles, un marionnettiste et metteur en scène d'opéra séducteur et brillant. Une histoire d'amour exemplaire, évidente, faite de flamboyance, de nuits enfiévrées et de repas aux chandelles sous les effluves entêtants et sucrés des mimosas en fleurs, de bonheurs partagés et de promesses. Parce que quand on s'aime et que l'on vit dans l'euphorie de la passion, quoi de plus normal que les promesses. On a envie d'y croire, elles sont un gage d'éternité, la certitude d'un amour sans fin. Et on les scelle avec entrain même si elles semblent excessives.
Mais voilà, « on n'écrit pas sur le bonheur […], la seule matière de la littérature c'est le chagrin ». Et dès les premières pages on sait qu'une des promesses n'a pas été tenue. Que derrière cette histoire aux allures idylliques se cache une autre vérité. Qu'elle a mené Claire devant un tribunal, tenue responsable d'un drame à l'issue incertaine et tragique. Mais que s’est-il passé ?
Rembobinage. Retour en arrière et dissection au scalpel d'une histoire d'amour toxique. Décryptage d'une passion dévastatrice.
.
Ce livre est une dinguerie. Il décrit avec acuité et avec minutie le phénomène terrible de l'emprise amoureuse. En le faisant raconter par la victime elle-même, l'autrice le décortique avec une précision glaçante. Avec Claire, on se laisse duper par les apparences trompeuses et on en traverse avec effroi les différentes phases de cette mécanique bien huilée. La séduction, les effusions, les flatteries, que rien ni personne ne peut tempérer. La sourde oreille aux mises en garde, les doutes écartés d'un revers de main à peine formulés. Puis l'isolement, la culpabilisation, l'addiction et le manque, brulant et permanant, qui pousse à "s'empoisonner au souvenir et à l'espérance". Et enfin la destruction finale, inévitable et fatale.
Dans cet affrontement insidieux, l'écrivaine n'a que ses mots, et encore on veut les lui ôter. Quant au pervers narcissique, marionnettiste, il tire les ficelles. A travers les dépositions de Claire, Camille Laurens pointe aussi les points saillants de cette pathologie, l'absence d'empathie, des comptes à régler avec son enfance, autant de signaux d'alerte qu'elle identifie a posteriori mais que Claire n'a pas voulu voir.
La construction de ce roman en trois actes est elle aussi habile. Commençant par la fin, mais ne livrant les informations cruciales qu'au compte-goutte, elle accroche de suite l'attention du lecteur, happé par les blancs lui restant à découvrir. Elle s’étire dans des descriptions interminables pour poser l’illusion de la normalité et anesthésier la vigilance du lecteur, comme le pervers le fait avec sa proie. Elle s'offre même le luxe de mêler à la voix de Claire celle de ses proches, et même celle de Gilles, d'un cynisme glaçant. Et c’est implacable et sans appel.
En refermant ce roman, on pense à Eric Reinhardt, forcément, qui lui aussi s’est appliqué dans son œuvre à décrire ce fléau, mais il y a ici une singularité qui chez moi a fait mouche.
Alors convaincue ? L’avez-vous lu ou vous ai-je donné envie de le lire ?
« L'amour, c'est tant qu'on y croit »
Dans ce roman fort habilement construit, Camille Laurens explore une relation qui va se terminer dans le sang entre une écrivaine et un marionnettiste. Une exploration subtile du mensonge et de la vérité, de la manipulation et de l'illusion amoureuse. Vertigineux !
Dans le roman, la narratrice s'appelle Claire Lancel. Elle est écrivaine, ayant déjà une belle œuvre à son actif. Elle a connu la douleur de perdre un enfant et sa vie sentimentale est faite de hauts et bas qui ont fait l'objet de plusieurs livres. Mais cette fois, elle fait la promesse à Gilles, son nouveau compagnon, qu’il ne sera pas un personnage dans l’un de ses prochains livres. Promesse envolée à peine scellée, si l'on considère le caractère autofictionnel de l'histoire qui le met en scène dès le chapitre initial.
Il est marionnettiste, metteur en scène d'opéra et fait la connaissance de Claire lors de la soirée de la Saint-Sylvestre 2013. Une soirée à laquelle elle avait fini par se rendre à contrecœur, ni habillée, ni maquillée, mais qui s'était terminée dans les bras de son nouvel amant.
À compter de ce moment, leur relation va s'apparenter à un bonheur de tous les instants. Un temps qui mérite d'être raconté en vers libres et que les témoins, comme son amie Carole, voient comme une parenthèse enchantée. À l'entente sexuelle viennent s'ajouter des projets communs et l'installation dans une maison dénichée à Hyères et qu'ils achètent ensemble. Comme le dit Balzac, « ils furent heureux comme nous rêvons tous de l'être ».
Ici l'usage du passé n'est pas fortuit, car l'idylle a pris fin. On le comprend lorsque l'on lit que la police trouvé Claire assise par terre en sang devant sa maison. Qu'elle va être mise en examen. Que la juge et l'avocate entrent en scène. Une avocate qui va chercher à comprendre ce qui s'est passé et enjoint sa cliente à « déconstruire l’idylle, sinon on ne va pas y arriver ».
Dans cette seconde partie du roman, Claire va donc tenter d'approcher au plus près de la vérité. De revivre son histoire d'amour en la déconstruisant pièce par pièce. Elle va « recomposer le chaos » et découvrir la manipulation dont elle a été victime. « Le dictionnaire amoureux qu’elle croyait connaître par cœur, ce dictionnaire était ravagé, illisible, des pages manquaient ou étaient déchirées. Elle a dû redonner forme et sens à l'incohérence. Comprendre l’incompréhensible. Tirer la vérité du déni et de l’oubli — de leur déni à tous les deux. Elle a eu du mal. L’obscurité était plus épaisse, sans doute — la lumière fait mal quand on sort du noir ».
Dans un suspense allant crescendo, la troisième partie est celle du procès. Celle qui va révéler que « l'être n'est qu'une syllabe du paraître » ou, pour reprendre la formule de l'expert psychiatrique énonçant la technique du prédateur, « séduire, réduire, détruire ». Mais c'est bien Claire la prévenue, accusée de meurtre avec préméditation.
Camille Laurens est trop bonne romancière pour ne pas avoir compris qu'avant l'épilogue, son récit devait s'enrichir de rebondissements, jusqu'à un ultime coup de théâtre. Mêlant avec raffinement les genres littéraires du roman psychologique à la poésie en vers libres, du thriller au roman de procès, elle embarque le lecteur dans un maelstrom d'émotions. Et comme à son habitude, elle emmêle avec jubilation la réalité et la fiction. Il est, par exemple, aussi question d'assignation en justice pour atteinte à la vie privée, comme ce fut le cas en 2003 après la publication de L'amour. Et voilà la formule « tout le reste est littérature » illustrée avec style !
NB. Tout d'abord, un grand merci pour m'avoir lu jusqu’ici ! Sur mon blog vous pourrez, outre cette chronique, découvrir les premières pages du livre et en vous y abonnant, vous serez informé de la parution de toutes mes chroniques.
https://urlr.me/e2RUrS
Qu'est ce que ça veut dire et qu'est ce que ça engendre de naitre fille dans les années 60 ? Comment on grandit ? Quelle perception de soi la societé, les maux et les regards des autres engendrent ? Comment on s'affirme ? Comment on devient femme ? amoureuse ? mère ? ...
Un roman ? ou un essai ? je me suis parfois posée la question tellement il est précis dans les mots, dans les définitions. UN texte qui m'a ouvert les yeux parfois mais surtout qui m'a fait encore plus prendre conscience du poids de naitre femme, même si ça a quand me^me un peu évolué.
Un texte à partager, à offrir, à mettre entre toutes les mains.
Début des années 60 à Rouen. C'est entre un père, vieille France, médecin de ville et un mère, dévouée à son époux et femme au foyer, que vont grandir Laurence et sa sœur.
A chaque grossesse, le père espère que ce sera un garçon mais manque de chance c'est toujours une fille. Va pour la première, mais ça se complique pour la seconde, comme si c'était une humiliation.
Le père, machiste de première, est très souvent absent et quand il est là c'est pour régenter, ordonner et décider de la vie de ses filles. La mère, qui sait où est sa place, acquiesce.
Mais comment les filles vivent elles cela ?
Camille Laurens, avec ce roman, va nous expliquer ce qu'il y a derrière ce mot "fille" et le parcours qui y est associé surtout à cette époque : on apprend aux filles à se faire discrètes et si jamais il leur arrive quelque chose elles en portent une part de responsabilité. On ne leur demande pas leur avis afin que cela ne porte préjudice à personne. Et qu'arrive -t-il quand une femme se rebelle ?
Si l'écriture est bien maîtrisée, le sujet tel qu'il est abordé ne m'a pas convaincu. Il a juste mis en lumière l'évolution de notre société en matière des droits des femmes même si aujourd'hui on voudrait plus or on constate un recul dans beaucoup de domaines notamment dans certains pays (le droit de disposer de son corps, le droit de se vêtir comme bon vous semble, le droit d'aimer différemment, le droit de ne pas être mère... la liste est longue).
https://quandsylit.over-blog.com/2023/06/fille-camille-laurens.html
Il n'y a pas encore de discussion sur cet auteur
Soyez le premier à en lancer une !
Dans ce recueil de 13 nouvelles, la jeune autrice mexicaine frappe fort mais juste
Une fiction historique glaçante et inoubliable, aux confins de l’Antarctique
Découvrez les derniers trésors littéraires de l'année !
"On n'est pas dans le futurisme, mais dans un drame bourgeois ou un thriller atmosphérique"