"On n'est pas dans le futurisme, mais dans un drame bourgeois ou un thriller atmosphérique"
2006, Arthur creuse des trous au Yemen où il vit avec femme et enfants (4 filles). L’éloignement d’avec sa maîtresse Laurence, fonctionnaire orléanaise, cinquantaine alerte, pétillante et sensuelle, est éclairé par leurs échanges via le clavardage.
Loins de les séparer, la grande distance, grâce à Internet et les débuts de la webcam ajoute du piment à leur histoire d’amour et de sexe. Oui, mais voilà, les limites sont là et la présence physique manque… Laurence est en manque, alors ils inventent un autre petit jeu. Laurence s’inscrit sur un site de rencontre et partage tout via internet avec son Cauquin.
Le clavardage des deux amants n’a rien de débridé, de vulgaire. Non, le style de Laurence est vivant, malicieux, spontané. C’est elle qui est dans « l’action », qui « recrute » ses amants, qui dirige les ébats. Arthur est dans la domination littéraire et dirige les débats. Il se pose en maître, va jusqu’à créer un autre profil sur le site de rencontre et chercher les futurs « jouets érotiques » de Laurence . Il ne manque pas d’expliquer, de guider son « élève », une élève fort docile et consentante. Lorsque Gilles, le canadien, arrive, j’ai comme l’impression d’une petite jalousie qui ajoute du piment à leurs jeux érotiques. Nouvelle demande d’Arthur ;transformer ces échanges en un livre
« — c'est une très bonne idée, quand est-ce qu'on commence ?
— Nous en avons déjà écrit un bon tiers !
— avec nos tchats ?
— Oui !
— mais on n'a rien conservé
— Moi, si ! »
Batifolage sur les ondes à l’abri de regards indiscrets. C’était le bon temps où se filmer et se montrer par écran interposé ne portait pas encore à conséquence.
Un livre à plusieurs lectures. Un échange érotique entre deux amants séparés ; les élucubrations érotiques et solitaires d’un homme ou d’une femme ; une mise en abyme d’un monde où le virtuel est de plus en plus présent remplaçant le réel, le présentiel (un néologisme qui a des relents de Covid ma chère Lucette!).
J’ai souri en lisant le badinage délicat, polisson, érotiquement délicieux des deux amants.
Merci Serge Safran, bonne pioche !
Pétillant, voici un charmant roman qui fait la chasse à la morosité. Le lire en confinement prend un sens certain. Alain Bonnand délivre des échanges via la toile entre Arthur (parti au Yémen) creuser des trous (si si). Travaillant pour une grande société, il se déplace aux quatre coins du monde. Néanmoins, dans le centre de ce récit, il est au Yémen et Laurence sa correspondante de cœur est en France. Nous sommes en 2006 dans l’ère naissante des réseaux tel que Meetic. Laurence et Arthur vivent une aventure étant tous les deux en famille. Ils vont résister à la distance en mettant en place une relation virtuelle, osée, piquante et malicieuse. Mais attention ! il faut bien lire les en-têtes des échanges. Il y a un jeu des plus pertinents et l’auteur s’amuse. Parfois il s’agit de Arthur Cauquin et Laurence, ou bien seulement Arthur et Laurence. Et là, la forme change. Nous sommes face à des protagonistes paraboliquement masqués dans un carnaval des grands cœurs. La puissance visuelle est telle que Laurence dont son auteur fétiche est Queneau, ici, reste altière. Nous ne sommes pas sur une patinoire et Laurence est plus subtile, plus nuancée, résistante. Elle est la somme de tous et de toutes. Elle est cette vulgarisation exacerbée d’un nouveau mécanisme de communication. Alain Bonnand fait de la dérision, emblème de tours de manège. Chaque invité sur la toile rejoint le centre d’un relationnel qui cherche une soupape de sécurité, une preuve de se savoir véritablement écouté et le virtuel devient une preuve. Aléatoire, certes, mais concrète pour tenir la cadence d’une séparation. Les hommes sont là. Ils sont l’éphémère, les anti-héros, le glacé d’une contemporanéité superficielle. Alain Bonnand délivre une histoire qui affirme l’existence d’une communication dont on peut déjouer les codes. Marionnettes virtuelles qui ne restent en surface que le temps de cliquer. Trois petits tours et puis s’en vont… Néanmoins, ce récit à lire en plein été ou dans le sombre d’une chambre est le papier calque d’une réalité dont ne peut prétendre qu’elle n’existe pas. Dans cette aube du XXIème siècle, le virtuel est si présent que « Arthur Cauquin au Yémen » dans une deuxième lecture est aussi sociologique. Il sonne comme un avertissement. Certaines personnes briseront la solitude en cliquant sur le clavier de l’ordinateur. S’imagineront vivantes, profondément vivantes. Alain Bonnand dresse un tableau virtuel d’une société dont les tabous tombent comme un château de cartes. Arthur et Laurence se retrouveront t’ils en vérité ? Agréable, frais à l’instar d’un bain dans les plus vives cascades sensuelles, « Arthur Cauquin au Yémen » est une vue sur le monde. Une mise en réalité virtuelle, originale. Publié par les majeures Editions Serge Safran éditeur.
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