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Tout est chaos

Couverture du livre « Tout est chaos » de Carmen Bramly aux éditions Presses De La Cite
Résumé:

" Le métier de publicitaire a beaucoup à voir avec mes activités extraprofessionnelles. Dans les deux cas, je mets en scène, j'invente un contexte, un cadre, pour décomplexer une pulsion, consumériste dans un cas et sexuelle dans l'autre. "

À 24 ans, Paloma Madar est conceptrice-rédactrice... Voir plus

" Le métier de publicitaire a beaucoup à voir avec mes activités extraprofessionnelles. Dans les deux cas, je mets en scène, j'invente un contexte, un cadre, pour décomplexer une pulsion, consumériste dans un cas et sexuelle dans l'autre. "

À 24 ans, Paloma Madar est conceptrice-rédactrice pour le département luxe d'A.T.K., prestigieuse agence publicitaire. Elle apprend les ficelles du métier sous la houlette de son responsable, le charismatique et singulier Benjamin Esposito.

Le soir, entre rencontres sans lendemain et amants épisodiques, elle consomme les hommes à l'envi.

Mais l'ambiance s'envenime au sein de l'agence quand son mentor adulé est accusé de harcèlement sexuel.

Paloma se trouve alors aux prises avec un dilemme qui provoque chez elle une remise en question existentielle.

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Avis (1)

  • La fille de l’agence de pub


    Un quart de siècle après « 99 francs », Carmen Bramly retourne dans une agence de publicité pour en décortiquer les mœurs. Dans les pas d'une jeune conceptrice-rédactrice, elle explore les nouveaux codes de la société, le rapport à l'autre, la sexualité. Un roman...
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    La fille de l’agence de pub


    Un quart de siècle après « 99 francs », Carmen Bramly retourne dans une agence de publicité pour en décortiquer les mœurs. Dans les pas d'une jeune conceptrice-rédactrice, elle explore les nouveaux codes de la société, le rapport à l'autre, la sexualité. Un roman de formation à l'ère post #MeToo.



    Les moins de vingt ans ne peuvent pas connaître 99 Francs. Paru en 2000, ce roman autobiographique de Frédéric Beigbeder retraçait les dérapages du monde de la publicité et a notamment valu à son auteur d'être renvoyé de son agence, Young & Rubicam en l'occurrence.
Si j'en parle à l'occasion de cette chronique, c'est parce que Carmen Bramly, en racontant le même univers aujourd'hui, nous offre en quelque sorte un regard actualisé sur ce monde, avec ses invariants mais surtout ses bouleversements.
Il met en scène Paloma Madar, 24 ans, conceptrice-rédactrice au sein du département luxe de l'agence A.T.K. 
C'est par un épisode de sa vie privée que s'ouvre le roman, son rendez-vous avec Jérémy, un artisan ébéniste déniché via une application de rencontres. Elle entend lui démontrer qu'elle est une fille bien en lui exposant sa théorie du karma et tout ce qu'elle fait pour compenser son boulot qu'elle juge moralement discutable. Si Jérémy reste très critique, il n'en est pas moins séduit par l'humour et la faconde de Paloma. Il ne se doute pas qu'il n'est alors qu'un nom de plus à ajouter dans le cahier des conquêtes de la jeune fille qui ne veut pas se lier, qui n'entend pas confondre sexe et amour.
Il faut dire qu'elle a d'autres chats à fouetter, à commencer par faire son trou au sein de l'agence. Pour cela, elle peut compter sur un allié de poids, Benjamin Esposito, son directeur de création qui est aussi son mentor. Il a pris la jeune conceptrice-rédactrice sous son aile et lui a appris le métier. 
Si l'ancienne étudiante en philosophie se dit quelquefois qu'elle n'a rien à faire là, qu'elle a poussé la mauvaise porte, elle continue vaillamment à « produire du désir en série dans un environnement qui cherche à "neutraliser l'humanité" (...), où chaque consommateur est traité comme "un centre du monde" auquel on vend "une certaine idée de lui-même" ».
Margot Wilson, leur patronne, a demandé à Benjamin et Paloma de repositionner une marque de mode. L'occasion pour Paloma de suivre Benjamin sur un terrain plutôt inattendu : « Selon une étude, quatre jeunes sur dix n’ont pas fait l'amour au cours de l’année 2021 et beaucoup affirmaient avoir perdu le goût de la masturbation. C'est un phénomène que j’ai moi-même pu observer sur les applications de rencontre. Des garçons m'ont déjà dit qu'ils ne se sentaient pas « sexuels » ou bien qu’ils étaient trop « fatigués » pour me voir. C’est comme si la solidarité dans le plaisir s'était étiolée. Aujourd’hui, la jeunesse n’a plus envie de l’autre, cette énigme terrifiante. Sa libido a été lessivée par un déferlement continu d'informations contradictoires et anxiogènes. On présente la sexualité comme un rapport de force où la femme serait a priori la victime de l’homme. Le désir des uns est criminalisé quand celui des autres est étouffé, Pour moi, c’est différent. Je ne suis pas tout à fait jeune et je n'ai jamais confirmé les statistiques de ma génération. C’est aussi pour cela que Benjamin a souhaité faire équipe avec moi. Je suis l’outsider des insiders, s’il fallait le formuler en des termes publicitaires. Avec la complicité de cette marque, si elle l’accepte, Benjamin s’est donné pour mission de rendre à la jeunesse l’envie d’avoir envie. »
Une fois le concept lancé, il va demander à une stagiaire de rechercher des photos pour illustrer ce propos, exemples à l'appui. Une tâche assez classique, mais la jeune fille va se considérer harcelée sexuellement et va se plaindre auprès de Margot. C'est le début d'un engrenage infernal dans lequel l'accusation vaut déjà condamnation. 
Carmen Bramly, à travers ce portrait de cette jeune publicitaire, questionne les compromis moraux du métier, l'authenticité des relations humaines et la quête d'identité dans un milieu où la quantité a remplacé la qualité, ou la vitesse a remplacé le sens. « Aujourd’hui la publicité nous traque, nous écoute, s’infiltre partout, elle parasite les vidéos que nous regardons sur YouTube et mine nos réseaux sociaux, les articles que nous lisons en ligne, nos pornos... Moi, par exemple, mon téléphone me déteste. Sinon, pourquoi me proposerait-il toute la journée des opérations de chirurgie esthétique, des vêtements amincissants, des régimes à gogo et des podcasts pour faire remonter la libido ? »
S'il a tout du roman de formation, ce roman est aussi un formidable miroir de notre société et en particulier de sa jeunesse, angoissée et désorientée. S'il débouche sur des perspectives plutôt sombres – génération désenchantée –, il a le grand mérite de nous ouvrir les yeux, de nous inciter à réagir. Salutaire !

    https://urlr.me/JARuWQ

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