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Lili n'est pas d'une nature à baisser les bras. Elle a une certitude chevillée au corps : « il faut dépasser ses malheurs en klaxonnant bien fort, garder ses cheveux au vent et continuer à offrir son beau visage au soleil ».
Pourtant, les obstacles, Lili les accumule. Banlieusarde juive et kabyle, née de père inconnu, elle va trouver la force de s'en sortir, même si elle vient du mauvais côté du périphérique.
Papa... est un livre sociétal qui aborde, c’est rare, le sujet de l’intégration des immigrés en France sous un angle romanesque. Les commissions, les rapports, les thèses, les mémoires, les essais abondent…, bref du sérieux du solide du lourd et voici ce récit émouvant et tonique, souvent drôle qui en dit plus en trois cent pages qu’une bibliothèque de L’ENA.
Sylvie mi-juive mi-Kabyle (un dérapage en sortie de discothèque), blonde de surcroît grandit dans la cité des 4000 à La Courneuve. Elle est entourée d’amour – ses grands-parents séfarades originaires de Tunisie, sa mère déboussolée… et de haine : son beau-père, un abruti, raciste et bas de plafond qui fait honte à ma terre de Bourgogne dont il est issu. Pas Stone, plutôt Stone et Charden…
Sa formidable grand-mère, son éducation – malgré tout, son intelligence, son caractère et la République la font grimper dans l’ascenseur social. Là voilà bourgeoise première génération et… mère juive ! Elle se raconte avec une fraîcheur, une spontanéité, une franchise qui tranchent heureusement avec le tout-venant de l’auto-biographie. L’écriture est à l’avenant, pétillante d’esprit, populaire et crue pour ne pas oublier sa jeunesse de “caillera”, parsemée de notations piquantes, d’aphorismes réjouissants, de coups d’œil savoureux : la sacoche en skaï du beau-père, très beauf années 70… La gravité surgit à la fin du récit, un peu étirée mais c’est une faute vénielle, histoire de tuer le père qui a failli.
Papa pas Rolling Stone vient d’obtenir le Prix Lilas décerné à une femme par des femmes, principe plutôt discutable sauf qu’ici Sylvie Ohayon (son nom de mariage) démontre à l’évidence – elle et sa grand-mère, que la femme est l’avenir de l’homme notamment quand il émigre.
Cet ouvrage est un roman autobiographique et un témoignage de grande ampleur.
Il n’y avait pas de fée pour se pencher sur Lily à sa naissance avec un père inconnu et les barres d’immeubles de la Courneuve comme environnement. Pourtant, notre héroïne ne va jamais baisser les bras même si parfois elle touche les bas fonds d’une existence sordide ; C’est une (com)battante qui n’accepte jamais la défaite et cherche en permanence à dépasser ses peurs et ses douleurs.
Lily cherche un sens à sa vie avec le modèle particulier de ses grands-parents et de sa mère.
Les maîtres mots du livre sont force morale, solidarité et haine gratuite.
Tout en étant consciente du pouvoir d’un livre, l’auteur n’instrumentalise jamais la violence physique ni la violence morale. Plutôt que d’insister sur ses mille et un cauchemars, Sylvie Ohayon nous pousse à gratifier le sens de l’effort et à être les artisans de nos vies. Dommage qu’un langage de maquereau ne vienne atténuer la portée de cette saga bouleversante empreinte des racines juive et kabyle et de décloisonnement dans notre société.
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