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Au lendemain des élections présidentielles, télévision, radio et presse écrite ne parlaient que de nous. Et de Schattenhaufen, ce si joli village alsacien qui avait si mal voté. Le nôtre, donc.
Nous nous étions distingués, il est vrai : du vote en faveur de l'extrême droite, nous détenions le record national et historique. Bien sûr, nous n'avions pas tous voté pour ce parti. Loin de là. À peine un électeur sur deux. Assez pour défrayer la chronique.
D'autres auraient peut-être été incommodés par cette notoriété soudaine. Pas nous. Car nous savons garder les pieds sur terre et la tête près du bonnet.
« Nous sommes célèbres. Et cette célébrité, mes amis, il faut l'exploiter ! » nous avait conseillé Roméo Pack-de-Crocs. Un expert, le Roméo, qui s'occupe de marketing chez Kronenbourg. L'idée du marché de Noël, c'est donc la sienne. Une bonne idée que nous allions mener à bien, doués comme nous le sommes. Les autres marchés de Noël n'étaient que beaux. Le nôtre, avec l'aide de Dieu, allait être exceptionnel.
Là résidait d'ailleurs tout le problème. Pour nous accorder son aide, Dieu se faisait tirer l'oreille. À croire qu'Il nous battait froid. Ou qu'Il voulait nous mettre à l'épreuve. Si telle était son intention, Il n'avait pas loupé son coup. Car les épreuves n'ont pas manqué.
Ainsi la vieille Mélanie est décédée et son bistrot a été repris. Par un couple. Jusque-là, rien d'anormal. Sauf que c'était un couple d'hommes. Des homos, comme on dit. Chez nous, à Schattenhaufen ! L'Arbre Vert de Mélanie tenu par un couple d'homos !
De quoi frémir.
Ensuite, il y a eu cette météo défavorable. 14° pendant tout le mois de décembre et un grand ciel bien bleu. Adieu, la jolie carte postale du joli village blanc. Sans doute ne neigeait-il pas davantage ailleurs. Mais nous, c'était notre premier marché de Noël.
La neige, nous pouvions raisonnablement y prétendre. Voire l'espérer comme un dû.
Mais ces deux épreuves n'étaient rien en comparaison de celle qui nous attendait. Car, début décembre, juste au moment des préparatifs les plus intenses qui exigeaient de nous tous une bonne santé, Antoine Habter, notre infirmier libéral, notre bel Antoine aux yeux bleus, nous avait annoncé son départ en vacances. Cette défection brutale nous fut un choc. Bientôt suivi du coup de grâce quand Odette nous apprit que le remplaçant d'Antoine Habter s'appelait Aziz Amtawia.
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