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"Ils vont tuer vos fils" de Guillaume Perilhou : la plongée en établissement psychiatrique d'un adolescent différent

Guillaume, un jeune garçon élevé par sa mère, se découvre attiré par les robes, le maquillage et les garçons...

"Ils vont tuer vos fils" de Guillaume Perilhou : la plongée en établissement psychiatrique d'un adolescent différent

Vous avez plébiscité les romans de la rentrée littéraire de septembre 2022 et nous vous avons proposé d'en remporter des exemplaires.

Les avis ont été publiés et aujourd'hui, nous avons le plaisir de partager avec vous la chronique de Géraldine C qui donne très envie de découvrir cet ouvrage...

 

L'avis de Géraldine C sur le livre Ils vont tuer vos fils de Guillaume Perilhou (éditions l'Observatoire)

"C'est son résumé plutôt limpide et efficace qui m'a amenée à poser ma candidature auprès de lecteurs.com : j'ai une faiblesse pour les personnages qualifiés de fou, de différent, de hors norme, et avec ce roman, on est en plein dans le sujet. J'ai vu passer moult commentaires positifs, et très enthousiastes, que je n'ai pas lus pour m'éviter le spoil. Merci aux Éditions de l'Observatoire et à lecteurs.com pour cette lecture troublante, d'autant que le narrateur porte le même prénom que son auteur. Un auteur qui a le bon goût de mettre une épitaphe de Nicolas Gogol tirée de Le journal d'un fou, la folie sous tous ses états a toujours été un moteur puissant de la création littéraire.

Guillaume, c'est un jeune garçon qui grandit dans une famille monoparentale, avec une mère perturbée et instable, si absente à elle-même et son enfant que les services sociaux finissent d'ailleurs par les lui enlever, un père absent dès le départ, en bref, un couple qui l'a été juste le temps de concevoir Guillaume. Qui grandit et se découvre attiré par les robes, et le maquillage, et par les garçons. Qui devient le bouc émissaire à l'école comme souvent les enfants qui affichent leurs différences, qui portent des pantalons un peu trop colorés. Guillaume est un enfant sans repère, sans personne pour les lui donner, qui finit en foyer après des accusations de maltraitance de son père.

Le récit est court, mais intense. Il est fractionné en une multitude de courts chapitres, qui tirent au maximum jusqu'à la demi-dizaine de pages. Le flux narratif est lui-même très peu limité par une ponctuation régulière. Il tente visiblement de rétablir le fil de la réflexion, souvent distendue et irrégulière de l'adolescent, assommé par benzodiazépines et antipsychotiques, au sein de l'établissement psychiatrique. La narration en elle-même est le premier indice de l'esprit troublé de Guillaume. Si c'est sa transformation intempestive en Raffaella qui est l'une des sources de son internement, un changement de sexe occasionnel, une transformation en une version féminine de lui-même, on assiste à la lente dérive de l'esprit de Guillaume. Ou la façon de caser les enfants dont les différences ne sont pas autrement assimilables que par la case maladie.

Si la vie en institut psychiatrique n'est pas un havre de paix, et si le but est de soigner, le séjour de Guillaume pose question, il en ressort plus malade que lorsqu'il y est entré, une machine à broyer les gens, aussi bien du côté judiciaire que médical. Un récit acide, à vif, de la vie gâchée de Guillaume, celui qui ne rentrera jamais dans les standards sociaux, et de ceux qui évoluent autour de lui, aussi malmenés par cette standardisation élevée au rang de loi inique, inscrite dans le code de la morale, qui n'a pas eu besoin d'être promulguée au JO. Et l'hôpital psychiatrique comme un huis-clos ou les souffrances rebondissent indéfiniment les unes contre les autres, les individus fonctionnant comme des miroirs reflétant cette matière insaisissable.

C'est un récit dérangeant, car il perturbe tous nos repères, car il nous plonge dans un milieu que l'on se refuse à voir, les hôpitaux psychiatriques sont bien souvent dotés de jolis parc, pratiques pour dissimuler la souffrance, la déraison et tout ce que l'on ne veut pas montrer. Guillaume Perilhou nous plonge directement au milieu de ceux et celles que l'on tente à tout prix à faire rentrer dans des cases, et si ce n'est pas dans celles de la normalité, ce sera dans celles de l'anormalité, car le monde est binaire et manichéen, c'est peut-être plus facile de le catégoriser pour palier ses angoisses et anxiétés diverses et variées. L'auteur a su cerner les mal-êtres des individus, qui ne font que se bousculer à côté de la figure de Guillaume : un grand-père au passé tellement lourd qu'il l'en a dissous la chaire, et rongé jusqu'à l'os, une mère qui porte également le sien et qui l'empêche de jouer son rôle, un père irresponsable, un ami qui a perdu l'appétit. Et ce n'est pas forcément le plus évident à lire, encore moins à écrire, j'imagine, car on se passerait bien de jeter le regard sur les faiblesses de nos vies, mais cette capacité à pointer si exactement, avec les mots justes plaqués dessus, donne à cette lecture un aspect plus purificateur, inscrit le lecteur dans une démarche presque cathartique.

C'est un premier roman que les poncifs qualifieraient volontiers de coup-de-poing, je penserais de mon côté davantage à une métaphore utilisant un objet coupant et pointu. Et on le referme avec une sensation de malaise encore plus diffuse, Guillaume est un adolescent attachant, la figure même de l'enfant auquel on se lie fatalement, au-delà de tout sentiment d'empathie ou de compassion. Le constat, quant à lui, que la sensibilité et les différences sont peut-être pathologiques aux yeux de ce qui constitue nos cadres sociaux, est relativement inquiétant."

 

Merci à Géraldine C !

 

Pour retrouver d'autres avis sur le livre, c'est ici : Ils vont tuer vos fils

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Commentaires (2)

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