"On n'est pas dans le futurisme, mais dans un drame bourgeois ou un thriller atmosphérique"
La Terre a bien changé et Jeanne habite dans ce qui reste de la France, même si ce nom et ceux des autres pays ont désormais disparu. Après un an sans nouvelles de son frère, parti rejoindre Shusharrah - dernière lueur d'espoir dans la dureté du quotidien -, elle décide de partir à son tour pour le retrouver. Son périple jusqu'à cette ville-état n'est cependant pas de tout repos, entre passeurs sans scrupules et mer déchaînée... Alors qu'elle est abandonnée seule dans un canot, elle est sauvée par les garde-côtes et découvre un camp situé à l'extérieur de la ville regroupant les immigrés qui souhaitent intégrer Shusharrah.
Après plusieurs jours, elle accepte de passer l'examen pour rejoindre les rangs de cette ville. Elle découvre cependant que la disparition de son frère est liée à un clan de rebelles, nommé la Petite France, qui sévit dans le bidonville. Elle décide alors de les approcher afin d'en apprendre plus. Retrouvera-t-elle son frère ?
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--- Une nouveauté Scrineo signée Anthelme Hauchecorne et Emmanuel Chastellière ---
Si j'attendais Shusharrah avec autant d'impatience, c'est parce que j'ai apprécié, voire adoré, certaines oeuvres de ces auteurs dont le talent ne fait aucun doute. Je pense notamment à Journal d'un marchand de rêves, one-shot aussi déluré que brillant pour lequel j'ai eu un gros coup de coeur, et à Célestopol 1922, un recueil de nouvelles qui met en scène des personnages forts dans un univers uchronique passionnant.
Après ces belles découvertes, Shusharrah ne pouvait être qu'une bonne lecture, pas vrai ? Eh bien, pas tant que ça ! Je remercie tout de même les éditions Scrineo pour l'envoi de ce roman qui plaira à d'autres lecteurs, j'en suis certaine.
--- du post-apocalyptique… enfin presque ! ---
Vous l'ignorez peut-être, mais je suis une férue du genre. J'aime les récits basés sur la survie, comme la trilogie Apocalypse Blues de Chloé Jo Bertrand, par exemple. J'attendais donc de Shusharrah de l'action, de la tension, de l'urgence. Autant d'éléments qui m'ont manqué, même s'ils sont présents en arrière-plan.
J'ai d'ailleurs eu l'occasion d'en discuter brièvement avec Emmanuel Chastellière sur Instagram. Il m'a ainsi révélé que c'était une réelle volonté de proposer quelque chose de différent. Pari réussi, en l'occurrence. Pour une fois néanmoins, je recherchais justement les codes classiques du genre, ce qui explique mon ressenti mitigé.
--- Jeanne, une héroïne peu attachante ---
Tout au long du récit, elle se pose des questions – beaucoup de questions ! -, doute sans cesse et regrette nombre de ses choix, ce qui ralentit considérablement le rythme. Shusharrah est donc davantage dans l'introspection que dans l'action.
Cela permet bien évidemment de s'interroger sur l'immigration, de s'imaginer à la place de Jeanne, déboussolée depuis le départ de son frère. le hic, c'est que je ne suis pas attachée à elle, alors qu'elle est le point central de l'histoire. La plupart du temps, je ne comprenais pas ses réactions. Alors que je m'insurgeais, elle restait totalement apathique. Alors que je me méfiais d'un personnage, elle lui accordait trop rapidement sa confiance. Bref, Jeanne et moi n'étions pas sur la même longueur d'ondes !
Quant aux autres personnages, ils ne m'ont pas fait forte impression. J'ai très vite apprécié Ben pour sa simplicité et sa capacité à se contenter de peu. En revanche, j'ai eu beaucoup de mal à cerner Dayot et Cham, mais c'est probablement un souhait des auteurs.
--- Shusharrah, la cité de toutes les promesses ? ---
Le roman porte son nom, la désignant comme le but ultime, l'objectif à ne pas perdre de vue. Cependant, quand j'ai enfin mis les pieds dans la cité en compagnie de Jeanne, j'ai quelque peu déchanté. Tant d'efforts pour si peu de surprises !
Par chance, les auteurs finissent par nous révéler ce qui se cache sous le vernis reluisant de la cité, mais cela prend du temps. Surtout, les explications manquent de profondeur. Malgré un véritable potentiel, les auteurs ont choisi de ne pas creuser plus avant. Par exemple, Shusharrah impose des cours à ses citoyens, mais en quoi consistent-ils ? Quel est le programme de chacun ? Quelles fonctions sont-ils destinés à occuper ? Autant de questions qui sont restées sans réponses…
--- Un final plein de révélations, mais trop vite expédié ---
Explosives, les 50 dernières pages sont riches en rebondissements, ce qui a ravivé mon intérêt. Avouez tout de même que c'est un peu tard pour renouer avec l'intrigue. En outre, j'aurais apprécié que les auteurs prennent leur temps pour amorcer le dénouement, qu'ils s'attardent davantage sur certains points, qu'ils offrent des explications plus fournies.
Bien sûr, ils ne possèdent pas les solutions aux problématiques que soulève l'immigration, monde post-apocalyptique ou pas. D'ailleurs, leur priorité est sûrement ailleurs. Selon moi, ce n'est pas tant l'envie de raconter une histoire qui les a motivés, mais plutôt celle d'alerter. Shusharrah rappelle sans détours qu'il est facile de rejeter la différence chez autrui, ou même de vouloir la détruire. Pourtant, n'est-on pas tous humains ? Un beau message que voilà !
Quoi qu'il en soit, cela n'a pas suffi à rendre cette lecture incroyable…
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