"On n'est pas dans le futurisme, mais dans un drame bourgeois ou un thriller atmosphérique"
Rosine Delsaux est une femme, une compagne, une amie, une mère parfaite. Pourtant, un jour, à l'heure du bain, elle noie ses deux filles. Tous s'interrogent : comment a-t-elle pu commettre ce geste irréparable ? Rosine, elle, ne donne aucune explication tangible à son acte, et elle ne cesse de répéter qu'elle est un monstre. Mais on ne tue pas ses enfants par hasard. C'est en tout cas ce dont Clélia, enquêtrice de personnalité auprès des tribunaux de Paris, est persuadée. Forte de cette conviction, elle va chercher ce qui dans la vie de Rosine a pu mener à ce crime.
Rosine, 35 ans, fraîchement divorcée et mère de deux adorables petites filles, bien insérée dans la société et sans problème d’aucune sorte, noie ses deux filles dans leur bain, un soir pendant le journal de 20h. Sans signe avant coureur, après une conversation un peu douloureuse avec son amoureux du moment, elle maintient la tête de sa cadette pendant 6 longues minutes sous l’eau, puis réitère avec son aînée. Arrêtée et incarcérée, elle n’explique rien, ne se défend pas, attend sa condamnation et se mure dans le silence et le chagrin. Son crime est monstrueux et en apparence inexplicable : elle va en prendre pour 30 ans et la Justice passera à l’affaire suivante. Sauf que tout acte de ce type trouve ses racines quelque part, et c’est l’enquêteuse de personnalité mandatée par la Justice, Clélia, qui entreprend de remonter le fil de l’histoire de Rosine.
Ça n’arrive pas souvent qu’un petit roman noir d’une auteure inconnue, avec un titre et une couverture banale, vous mette une vraie claque ! C’est ce qui est arrivé avec le roman de Sandrine Cohen « Rosine, une criminelle ordinaire », qui après un premier chapitre glaçant, met en scène une femme ordinaire à laquelle n’importe qui peut s’identifier. Rosine était une mère parfaite, ses deux petites filles faciles et adorables, une épouse amoureuse dans un couple parfait puis une rupture et un divorce exemplaire. Avant la mort de sa mère, ses parents s’aimaient comme au premier jour, et la relation avec sa mère était fusionnelle. Heureuse dans son travail, heureuse en amitié, avec un nouveau petit ami bien sous tous rapport, il n’y a rien dans la vie de Rosine qui ne soit pas parfait avant le geste fatidique. Tant de perfection est anormal, tant d’unanimité est suspecte aux yeux de l’enquêtrice de personnalité mandatée par le juge d’instruction. Au fil des divers entretiens, difficilement, à force de recoupements et d’intuition, Clélia parvient à tirer le fil qui l’amènera à a vérité. Ce roman est l’occasion de mettre en scène un auxiliaire de justice mal connu : l’enquêteur de personnalité. Ni policer, ni psy, l’enquêtrice Clélia creuse obstinément la personnalité de Rosine, rencontre ses proches, et va au-delà des apparences. Dans le roman de Sandrine Cohen, Clélia a une personnalité très excessive, presque improbable. Borderline au possible, toujours à limite la violence ou l’insulte au bord des lèvres, elle s’emporte souvent, juge très (trop) vite le monde entier, ne fait confiance à personne et se comporte souvent en bulldozer. Difficile d’imaginer une auxiliaire de justice se comportant ainsi, c’est sans doute le tout petit bémol de ce roman par ailleurs épatant. Rarement j’aurais lu dans un polar une analyse psychologique aussi pointue. La vérité soulevée par l’enquête de personnalité est forte et parfaitement crédible. Comme je ne veux rien dévoiler, je n‘en dis pas plus mais la Vérité qu’on voit se dessiner tout doucement au fil des paragraphes (il n’y a pas de chapitre), telle un filigrane, est imparable et malheureusement aussi douloureuse que banale. Le roman fait référence à des faits divers bien réels et bien connus, telle l’affaire Courjault (l’affaire des bébés congelés), ce qui l’ancre encore plus dans la réalité. Les dernières pages, qui se composent du réquisitoire du procès, puis de la plaidoirie et enfin du verdict, se termine sur une note de suspens bien tenue. N’ayons pas peur des mots : « Rosine, une criminelle ordinaire » est une vraie réussite, il se lit vite, facilement et laisse un souvenir fort. J’espère que Sandrine Cohen, dont c’est le premier roman, nous en proposera plein d’autres de cette qualité à l’avenir.
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