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Jacques Heers lance une vigoureuse diatribe contre la vision du Moyen Age colportée par les historiens et les écrivains depuis deux siècles.
Il démontre que le Moyen Age, à proprement parler, n'a jamais existé; que la répartition des temps passés en différentes périodes chronologiques n'est qu'une convention, qui a fini par imposer comme une loi, mais ne correspond à aucune sorte de réalité; ce n'est qu'une abstraction. L'auteur s'attaque principalement, dans un long chapitre, au mythe de la Renaissance qu'il récuse dans sa totalité. Il montre que cette idée d'une Renaissance, et donc de progrès par rapport aux temps précédents, fut, à l'époque, simplement imposée par un cénacle de copains, bons publicistes à la solde d'un prince qu'il convenait de glorifier pour son mécénat et - son discernement.
"Médiéval", "féodal", "seigneurial" même demeurent de nos jours insultes ou injures. C'est le résultat d'une légende ourdie dès le XVIe siècle et savamment orchestrée depuis par les révolutionnaires de 1789, par les pontes de l'histoire engagée et surtout par les maîtres de l'enseignement public Cette légende noire est ici résolument combattue : le livre en montre les erreurs, les ridicules, plus encore les malhonnêtetés.
C'est l'occasion pour Jacques Heers de faire état des dernières recherches, en histoire sociale notamment, qui, allant à contre-courant des slogans, sont victimes d'une sorte de loi du silence.
En Histoire, certaines périodes sont portées aux nues comme l’Antiquité grecque et romaine alors que d’autres sont vouées aux gémonies comme le Moyen-Âge, considéré comme une longue période de ténèbres et d’obscurantisme qui s’achève à la Renaissance. De même, constate-t-on une différence de traitement entre l’avant 1789 et l’après, comme si un certain 14 juillet l’humanité était soudain passée comme par enchantement de l’ombre à la lumière et depuis n’avait cessé de progresser vers un avenir de plus en plus radieux. Il est aussi particulièrement difficile de situer le début de la période communément appelée « Moyen-Âge ». Doit-on le placer dès la chute de l’empire romain d’Occident ou après celle de Byzance ? Tout aussi peu évident est la datation de celui de la Renaissance. Doit-on s’en référer aux débuts de l’époque gothique ou à celle de la fin du gothique flamboyant, à l’époque de Dante, de Giotto ou de Boccace, donc au XIIᵉ, XIIIè, XIVᵉ, XVè siècle ou même après ? Les termes de « Moyen-Âge » et de « Renaissance » ne furent d’ailleurs que très tardivement utilisés par les historiens (vers 1800). Et c’est d’ailleurs en France que l’on parla en premier de Renaissance italienne alors que le terme était toujours inconnu en Italie. On comprend ainsi le côté artificiel de toutes ces notions !
« Le Moyen-Âge, une imposture » est un essai historique de grande qualité, très référencé, très documenté et taillant de jolies croupières aux tenants de l’Histoire des manuels républicains à la Michelet et autres Fernand Nathan qui servirent de références des maîtres d’école jusqu’aux maîtres de conférence pour distiller une Histoire assez éloignée de la réalité et même complètement déformée pour servir une idéologie. Quand la politique se mêle de réviser le passé, on peut s’attendre au pire… Jacques Heers, tout comme Régine Pernoud, autre référence sur le sujet, s’attache dans cet ouvrage remarquable à tordre le cou à un grand nombre d’idées fausses, de contre-vérités et mêmes de forgeries (comme l’histoire de la papesse Jeanne pour ne citer que la plus loufoque). Le lecteur découvrira un grand nombre de choses bien différentes de ce qu’on lui avait enseigné ou de ce qu’il avait entendu, lu ou vu un peu partout. Il est bon que des auteurs courageux remettent les choses du passé à leur juste place. Nous aurait-on menti, raconté des carabistouilles ? Une fois de plus, l’on constatera que si le mensonge prend l’ascenseur, la vérité ne peut prendre que l’escalier. Mais, au bout du compte elle finit quand même par apparaître un jour…
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